Acheter bas. Vendre haut. Voilà la règle de base pour faire de l'argent à la Bourse. Archi simple, me dites-vous. Pourtant, les investisseurs font souvent le contraire, comme le raconte mon collègue Richard Dufour dans son dossier sur les erreurs les plus communes des investisseurs.

Malheureusement, les gens qui achètent des fonds communs de placement commettent aussi cette gaffe classique. Ils ont le don d'investir ou de vendre au mauvais moment. Ce problème de timing leur coûte cher.

Bien des études ont démontré que les épargnants obtiennent un rendement inférieur à celui affiché par les fonds communs qu'ils détiennent, à cause de cette manie de déplacer leurs billes d'un fonds à l'autre.

Aux États-Unis, on observe un écart de 2,5% entre le rendement des détenteurs de fonds et le rendement moyen des fonds, depuis 10 ans. Plus précisément, l'investisseur moyen a gagné 4,8% par année, tandis que le fonds moyen a grimpé de 7,3%. Une énorme différence!

Comment arrive-t-on à calculer le véritable rendement des investisseurs? On ajuste le rendement du fonds en fonction des entrées et des sorties de capitaux. Ainsi, on peut mesurer le rendement de l'argent réellement investi dans le fonds tout au long de l'année.

Prenez un fonds qui aurait bondi de 20% au cours des six premiers mois de l'année, pour ensuite stagner durant le reste de l'année. Si la majorité des investisseurs ont acheté le fonds au milieu de l'année, le véritable rendement des investisseurs dans ce fonds sera plus près de zéro que de 20%.

***

Au Canada, les données ne permettent pas de réaliser une étude aussi exhaustive. Mais la tendance est la même qu'aux États-Unis, comme j'ai pu le constater en analysant un échantillon des plus gros fonds de l'industrie avec l'aide de Christian Charest, de Morningstar Canada.

Dans trois grandes catégories de fonds, nous avons sélectionné les cinq plus importants fonds pour lesquels le rendement des investisseurs était disponible.

Dans la catégorie des fonds d'actions, l'écart est particulièrement frappant. Sur des périodes de 3, 5 et 10 ans, les investisseurs ont systématiquement obtenu un rendement inférieur à celui affiché par le fonds, à une exception près.

Pour le fonds de dividendes canadiens RBC, par exemple, les investisseurs ont obtenu un rendement annuel de 7,5% sur 10 ans, soit un point de pourcentage de moins que le rendement affiché par le fonds (8,5%).

Autrement dit, si les investisseurs avaient conservé leurs fonds d'actions sans rien faire, pendant 10 ans, ils auraient obtenu de meilleurs résultats. Mais au plus sombre de la crise du crédit, les investisseurs apeurés ont pris leurs jambes à leur cou et sont sortis des fonds d'actions.

Du coup, ils ont raté une partie du rebond. Et quel rebond! Depuis son creux de 2009, la Bourse canadienne a pratiquement doublé, et l'indice S&P/TSX a atteint un sommet historique il y a quelques jours, dépassant le niveau atteint avant la crise.

Du côté des fonds d'obligations, les investisseurs sont aussi à la traîne. Mais l'écart entre leur véritable rendement et celui affiché par leur fonds est moins prononcé.

Quant aux fonds équilibrés, le portrait est plus nuancé. Dans certains cas, les investisseurs ont eu un bon timing, dans d'autres, un peu moins. Mais l'écart est faible. Cela porte à croire que les investisseurs conservent ces fonds bien diversifiés pour du long terme. Ils sont moins portés à chambarder leur portefeuille pour un oui ou un non.

***

Est-ce à dire qu'il faut arrêter d'ouvrir ses relevés de compte, se boucher les yeux et ne plus rien faire dans son portefeuille? Bien sûr que non!

Néanmoins, ces chiffres nous rappellent le mérite des bonnes vieilles règles de base.

D'abord, évitez les fonds à la mode. Vous vous souvenez de la vague de fonds internet en 1999? C'était juste avant l'explosion de la bulle des technos. Depuis, la majorité a fermé. La Chine? L'or? Les investisseurs ont aussi déchanté. Méfiez-vous des fonds spécialisés.

À la place, faites une répartition d'actifs en fonction de votre âge et de votre tolérance au risque. Puis, gardez le cap en rééquilibrant votre portefeuille périodiquement. Si les actions montent, vous en vendez un peu pour racheter des obligations. Ainsi, vous vendrez haut et rachèterez bas. Pour minimiser les coûts de transaction, vous pouvez simplement investir vos nouvelles cotisations dans la catégorie d'actifs qui a le moins bien fait.

Et si vous n'avez pas envie de vous casser la tête, pourquoi ne pas mettre en place un mécanisme d'épargne automatique qui vous permettra d'investir régulièrement dans un fonds de revenus mensuels ou un fonds équilibré qui s'occupe de la répartition d'actifs et du rééquilibrage pour vous? Ou encore, un fonds cycle de vie qui ajuste le niveau de risque au fur et à mesure que vous approchez de l'âge de la retraite?

Vous serez alors à l'abri de vos propres erreurs de comportement.