Le temps, c'est de l'argent. Et les consommateurs ne devraient pas se priver d'exiger un dédommagement des commerçants qui les ont fait poireauter.

Vous avez perdu une journée de travail à attendre un technicien qui n'est finalement jamais venu réparer votre appareil défectueux?

Vous avez gaspillé des heures dans les méandres du service à la clientèle d'une grande entreprise incapable de démêler votre dossier?

Tombé sur un citron, vous faites constamment la navette chez le concessionnaire qui n'arrive jamais à mettre le doigt sur le bobo?

Tout cela mérite une compensation. Combien? Très variable. Très subjectif. Mais à vue de nez, les consommateurs qui poursuivent un commerçant aux petites créances obtiennent entre 100 et 1000 $ pour la perte de temps, les troubles, le stress, les inconvénients ou la perte d'usage d'un bien, avance Dominique Gervais, responsable du service juridique d'Option consommateurs.

Mais il ne suffit pas d'aller se plaindre devant le juge. Il faut prouver que vous avez subi des dommages. Et surtout, il faut les quantifier. Mieux vous serez préparé, plus le juge sera enclin à vous accorder la somme réclamée.

Comme un avocat, calculez tout votre temps. « Quand vous avez un litige avec un commerçant, notez chaque conversation. Inscrivez la date, l'heure, la personne à qui vous avez parlé, la durée de l'appel », suggère Me Gervais.

Si vos démarches vous ont obligé à manquer le travail, vous pourrez multiplier le nombre d'heures perdues par votre taux horaire. Si vous gagnez 25 $ l'heure, votre après-midi de congé à attendre en vain le technicien pourrait ainsi valoir une centaine de dollars.

Si vous avez fait les démarches à l'extérieur de vos heures de travail, vous pouvez quand même réclamer une indemnité pour compenser la perte de votre qualité de vie.

C'est ainsi qu'une étudiante au doctorat a obtenu une compensation de 700 $ aux petites créances. Elle avait confié son sac de travail contenant son ordinateur et d'autres appareils électroniques à la consigne d'un hôtel Quality Inn. Or, le sac a disparu. L'étudiante a mis 35 heures à récupérer les données perdues, sans compter le temps passé à magasiner de nouveaux appareils et à négocier avec l'hôtel.

Notez scrupuleusement toutes vos démarches. Conservez les lettres et les courriels de plaintes que vous avez rédigés. Si vous avez été obligé de vous déplacer, n'oubliez pas de calculer votre kilométrage et le temps d'attente en succursale pour la réparation.

Par exemple, un client de Telus a perdu 10 heures et parcouru 376 km pour aller porter chez le détaillant son téléphone cellulaire qui a fait défaut trois fois en moins d'un an. Comble de frustration, Telus a transféré à une agence de recouvrement le compte qu'il refusait de payer en attendant le règlement du litige. Cela lui a causé encore plus d'ennuis. Pour toutes ces raisons, la juge lui a accordé 700 $ en dommages et inconvénients.

Mais les consommateurs ne doivent pas abuser non plus. Ce n'est pas un bar ouvert !

Prenez une Montréalaise qui a eu de nombreux ennuis avec son réfrigérateur. Sears lui avait vendu un frigo qui faisait l'objet d'un rappel, à son insu. Le détaillant l'a fait attendre plus de deux mois avant de remplacer l'appareil défectueux par un autre modèle, sans frais.

La dame réclamait 800 $ pour la nourriture gaspillée, 1900 $ pour son temps perdu et 5360 $ pour avoir été privée de frigo durant 67 jours.

D'accord, elle a dû jeter le contenu de son frigo à deux reprises. Mais la juge a coupé sa réclamation en deux, car elle considérait que la liste des aliments était exagérée: certains contenants étaient probablement entamés, les fruits et légumes pouvaient être conservés à l'extérieur du frigo, etc.

Bien sûr, la cliente a été obligée de se débrouiller sans frigo durant deux mois. Mais était-ce une raison pour prendre tous ses repas au restaurant et réclamer 80 $ par jour, sans aucune pièce justificative? Non. Un client lésé a toujours l'obligation légale de minimiser ses dommages.

Vrai, la consommatrice a dû attendre plusieurs fois les visites d'un technicien, lesquelles ont parfois été reportées. Avec de multiples autres démarches, elle a perdu 137 heures. Quelle histoire !

Mais condamner le détaillant à lui verser jusqu'à 7000 $ en dommages constituerait un enrichissement injustifié de la cliente, surtout que le frigo valait moins de 1300 $. La juge a donc accordé à la dame 400 $ pour la nourriture perdue et 500 $ pour les autres inconvénients.

Ce que les juges accordent aux petites créances pour...

Un réfrigérateur défectueux pendant 67 jours?

- Une somme de 400 $ pour la perte de nourriture et 500 $ pour perte de temps, troubles et inconvénients.

Un sac de travail contenant un ordinateur perdu à la consigne d'un hôtel?

- Au total, 1000 $ pour le temps perdu à récupérer les données, à magasiner de nouveaux appareils et pour le retard au travail provoqué par la perte de l'ordinateur.

Un téléphone cellulaire toujours défectueux après trois réparations en moins d'un an?

- Une somme de 700 $ pour la perte de temps, les troubles, ennuis et inconvénients causés au client qui a perdu 10 heures et parcouru 376 km pour aller porter son appareil chez le détaillant.