Je ne l'avais même pas lue, cette histoire. C'est dans Le Devoir, m'a dit Véronique, ça doit être aussi dans ton journal.

Comme son prénom ne l'indique pas, Véronique est d'origine algérienne, née à Paris de parents algériens qui vivent aujourd'hui sur le Plateau. Elle est au début de la trentaine. En congé de maternité, elle est infirmière privée - elle a été l'infirmière d'un vieux monsieur que je connais un peu -, bref, as-tu lu, me disait-elle, cette horrible histoire d'une femme, à Lahore, au Pakistan, enceinte, lapidée par sa famille à coups de briques?

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C'est donc l'histoire d'un monsieur qui, couic, étrangle sa femme parce qu'il en aime une autre. Il est arrêté, puis relâché après avoir payé le «prix du sang», mais on n'embarquera pas là-dedans. Bref, il retourne vers celle qu'il aime et la met enceinte. Mais voilà, la famille de sa nouvelle épouse est très très fâchée. Parce qu'elle s'est laissé engrosser par un assassin? Pas du tout. Parce qu'elle n'a pas épousé le cousin que les membres de sa famille lui destinaient. Tellement fâchés qu'ils la tuent. Ils tuent leur propre fille. À coups de briques. En pleine ville, à Lahore, 10 millions d'habitants. La police? Elle était là. Elle n'a pas bronché. Elle ne se mêle pas des affaires de famille.

Racine, à côté, c'est du bonbon et sa Phèdre, une midinette.

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Retour à Véronique l'Algérienne. Son mari, Urbain, est Noir d'origine béninoise. Ils se sont connus chez les Fusiliers du Mont-Royal, où ils étaient tous les deux réservistes. Ils sont ensemble depuis une dizaine d'années. En 10 ans, Urbain n'a jamais mis les pieds chez les parents de Véronique. Il ne les a jamais rencontrés. Ils viennent d'avoir un bébé, les parents de Véronique ne savent pas qu'il y a un bébé.

Te destinaient-ils à un cousin?

Pas à un cousin. Ni à un garçon du village dont nous venons, encore que c'eût été l'idéal. Mais au moins à un Algérien. À la grande rigueur à un Québécois. Mais jamais de la vie à un Noir.

Quand Véronique a annoncé à ses parents qu'elle allait se marier avec Urbain, il y a eu un conseil de famille.

On vient d'enterrer ta grand-mère, tu veux m'enterrer aussi, c'est ça? lui a reproché sa mère. Son frère et sa soeur étaient là, son autre frère aussi. Même s'il était en Allemagne, il avait été averti, il a téléphoné: «Tu peux pas te marier avec un Noir, c'est pas un bon parti.»

Pourquoi?

Les Noirs n'ont aucune chance de réussir dans la vie.

Obama n'est-il pas Noir?

Oui, mais il ferait un bien meilleur président s'il ne l'était pas.

Ils ne me lapideront pas, c'est certain; c'est pas une pratique courante sur le Plateau, disait ironiquement Véronique. Ils ne me jetteront pas de briques. N'empêche qu'ils m'ont jetée, moi. J'ai pensé à tous ces gens qui ont lu la même histoire dans Le Devoir ou dans ton journal, d'abord horrifiés, puis rassurés...

Rassurés?

Tu sais bien, c'est toujours l'effet que font ces nouvelles-là. Elles nous disent que, ouf! comme on est bien sur le Plateau! Comme on est loin du Pakistan! Si tu pouvais mettre une petite note dans ta chronique pour leur dire que oui, c'est loin.

Mais pas tant que ça.

PIS MOI? - Il y a 35-40 ans, au Québec, le vélo n'existait presque pas. Dans l'indifférence générale, une toute petite gang de militants préparaient son formidable avènement, une demi-douzaine de pionniers qui ont défriché la piste, si j'ose dire, aux Michel Labrecque, Suzanne Lareau, Jean-François Pronovost et tous les autres architectes du Québec cyclable que l'on connaît aujourd'hui.

Moi, là-dedans? La mouche du coche, comme d'habitude. Je pédalais beaucoup, j'en parlais dans le journal, j'étais à la fois proche de Vélo Québec et critique de... comment dire? Je les trouvais un peu curés, un peu moumounes - sécurité avec leurs pistes cyclables... -, j'ai toujours été contre les pistes cyclables, j'ai toujours dit: il ne faut pas construire des ghettos à pédales, il faut plutôt rendre les rues cyclables. Comme en Europe. J'ai écrit ça 100 fois en 30 ans.

L'autre jour, ils ont fait venir de France un expert en vélo urbain qui leur a dit exactement ça: c'est pas les pistes qui font qu'une ville est cyclable, c'est les rues.

Ils l'ont trouvé génial.

Pis moi d'abord? Je suis un con? Ça fait 35 ans que je le dis. M'ont traité de tous les noms. Même d'assassin. Ouais, s'il y a pas de pistes, les petites vieilles vont se faire tuer dans le trafic...

Je vous ferai remarquer: les petites jeunes aussi.

L'ESPRIT SPORTIF EST L'ESPRIT QUI ANIME LES SPORTS (Aristophane) - Plus t'avances [dans les séries], plus ça fait mal [de perdre], disait Michel Therrien jeudi soir après l'élimination du Canadien. C'était à vous de perdre avant. Ça aurait bien fait mon affaire. J'aurais préféré que vous vous fassiez planter par les Bruins, l'idéal total eût été que vous perdiez devant Tampa Bay. Étonnamment, vous êtes tombés devant les Rangers alors que je me résignais déjà à vous voir aller jusqu'au bout en battant ces mêmes Kings qu'en 1993.

Vous l'avez compris, M. Therrien, j'hayiiis le Canadien. Vous n'en êtes pas la raison. Il n'y a pas de raison. C'est comme ça. Du plus loin que je me souvienne, j'ai toujours souhaité la défaite du Canadien, sauf pour le court règne de Guy Carbonneau derrière le banc. J'ai toujours aimé Guy Carbonneau, je sais, il n'y a pas tellement de raisons non plus.

Bon, maintenant qu'on se contrecrisse de qui gagnera la Coupe Stanley, on peut passer au basket en attendant la Coupe du monde de soccer. Dans la NBA, Miami devrait décapiter qui se rendra en finale, San Antonio ou Oklahoma. Au soccer, je sais pas, mais je mettrais un petit deux sur l'Allemagne. Au tennis, question d'un journaliste à Eugenie Bouchard: Do you can speak French, with French accent?

Réponse: Je pense que j'ai un accent un peu plus comme anglais, je ne parle pas si souvent français, mais... je ne parle pas avec un accent québécois, alors au moins, ça, c'est bon.

Moi non plus, lalalèreu, j'ai pas l'accent québécois.