Le Canadien a perdu hier et la signification de ce revers est limpide comme le ciel bleu au-dessus de Tampa Bay. La saison de l'équipe est à toutes fins utiles terminée. Et la fin des émissions pourrait survenir dès ce soir, alors que la quatrième rencontre sera présentée.

À l'heure actuelle, le CH n'a ni l'adresse, ni l'entrain, ni la force mentale pour vaincre le Lightning quatre fois d'affilée. Surtout après avoir été ainsi frappé par la foudre dans la dernière seconde du match. Alors que tout annonçait une prolongation, l'extraordinaire Tyler Johnson a passé le K.O. à ses rivaux. Le genre de droite au visage dont on ne se relève pas.

Pour Marc Bergevin et Michel Therrien, ce résultat représente une immense déception. Le repos de deux jours après l'affrontement de dimanche avait permis au groupe de mettre derrière lui cette triste performance.

Soupers d'équipe, réunions et un bon entraînement, tout permettait d'espérer un rebond susceptible de donner enfin une victoire à l'équipe. Sans compter le plaisir de jouer au hockey en mai, comme l'a rappelé Therrien en matinée. Mais ces bons sentiments n'ont pas été suffisants pour incliner le cours des choses.

Le Canadien n'a pas disputé un vilain match, loin de là, même si sa première période n'a pas été convaincante. On se serait attendu à un sentiment d'urgence plus marqué en lever de rideau. Mais les choses se sont replacées par la suite et l'attaque a créé plusieurs occasions de marquer.

Mais encore une fois, le manque de punch offensif a été l'histoire du match. Dans cette équipe, personne ne semble capable de mettre la rondelle dans le filet, de compléter un jeu en poussant le disque derrière le gardien. Il a fallu un extraordinaire effort de Brendan Gallagher, un vrai guerrier, pour déjouer Ben Bishop.

Le hockey n'est pas de la physique nucléaire et on sait tous que gagner sans compter un minimum de buts est une mission impossible.

On dira que le Canadien a frappé trois fois le poteau et que le sort ne l'a pas favorisé. Sans être faux, ce constat maquille la réalité. En clair, des malchances semblables font toujours plus mal à une équipe fragile. Elles renforcent en effet son sentiment d'impuissance et augmentent ses doutes. Ce n'est pas la bonne recette pour gagner.

Le Lightning compose une équipe rapide et électrisante, qui atteindra peut-être la finale de la Coupe Stanley. En théorie, perdre contre un adversaire de ce calibre n'est pas déshonorant.

Mais il y a la manière. Et les ennuis du Canadien dans la majorité de cette série suscitent des questions. La belle performance du calendrier régulier a-t-elle représenté un mirage?

Il ne faut pas s'y tromper: si le Canadien est balayé en quatre matchs, cela laissera inévitablement des traces. Le seul côté positif de cet échec sera de révéler clairement les lacunes de l'équipe. Ce sera alors à Marc Bergevin de se remettre au travail.

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Les visages étaient moroses dans le vestiaire de l'équipe. Pendant que Carey Price rangeait lentement son équipement, la peine inscrite au visage, Max Pacioretty répondait de son mieux aux questions. La confrontation n'est pas terminée, a-t-il répété de toutes les façons.

«On ne reviendra pas dans la série en gagnant trois matchs en un soir, a-t-il dit. Alors il faut uniquement se préoccuper de la prochaine rencontre.»

- Ce sera difficile de demeurer positif après un revers aussi brutal?

- On a tous affronté de l'adversité dans nos carrières. Si chacun d'entre nous veut faire la différence, si on a cette approche et cette mentalité, si on joue avec l'énergie de ce soir, et si on trouve le moyen de mettre des rondelles dans le filet, on aime nos chances.

Un beau discours, bien sûr. Mais qui illustre néanmoins l'ampleur du défi. Surtout que le Lightning amorcera le le duel de ce soir le couteau entre les dents. Cette équipe possède de nombreux atouts, notamment un excellent gardien. Elle est aussi très bien dirigée. Lorsqu'elle pèse à fond sur l'accélérateur, elle devient difficile à stopper.

Tenez, voici le commentaire de P.K. Subban à propos des dernières secondes de jeu: «On aurait dit qu'ils étaient sept sur la patinoire. Ils avaient des gars partout...»

Même si le Canadien fait face à une tâche herculéenne ce soir, attendons-nous à ce qu'il se batte avec énergie. Et bizarrement, la situation troublante dans laquelle l'équipe se trouve diminue la pression sur ses épaules. Le rendement sera peut-être meilleur si les attentes sont moins élevées.

Tom Brady éclaboussé

Cent quarante-trois pages de dynamite! Voilà comment décrire le coeur du rapport soumis à la Ligue nationale de football (NFL) par les enquêteurs chargés d'examiner la conduite des Patriots de la Nouvelle-Angleterre dans l'affaire des ballons dégonflés, survenue en finale de la Conférence américaine, le 18 janvier dernier.

Les conclusions de l'équipe dirigée par l'avocat Paul Wells, un criminaliste réputé, ne sont pas «hors de tout doute raisonnable» pour reprendre l'expression consacrée. Mais elles frappent très fort.

Le préposé au vestiaire des officiels Jim McNally, un employé des Patriots, a «plus probablement que non» réduit la pression des ballons destinés à Tom Brady quelques minutes avant le coup d'envoi. Et cela avec la complicité d'un responsable de l'équipement, John Jastremski.

Plus important encore: Brady lui-même connaissait «plus probablement que non» et «au moins de manière générale», les activités illicites des deux hommes.

Le célèbre numéro 12 sort éclaboussé de ce récit qui se lit d'un trait. D'abord, on apprend qu'il a refusé de collaborer entièrement avec les enquêteurs, ne leur donnant pas accès à ses textos, ses courriels et le registre téléphonique de son cellulaire concernant cette affaire.

Ensuite, durant son entretien avec les enquêteurs, Brady a affirmé qu'il ne connaissait pas le nom de McNally avant les événements, ni la nature de ses responsabilités. «Nous jugeons ces prétentions improbables, d'autant plus que d'autres preuves les contredisent» lit-on dans le rapport.

En fait, à la demande de McNally, Brady lui a fourni des artefacts signés de sa main, comme deux ballons et un chandail. Il a aussi fait des cadeaux à Jastremski.

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Dans le passage le plus révélateur du rapport, on raconte comment McNally, qui se décrivait lui-même comme le «deflator», s'y est sans doute pris pour dégonfler les ballons.

Rappelons d'abord ceci: dans la NFL, chaque unité offensive apporte ses propres ballons au match. Leur pression est testée avant la rencontre par les officiels, qui les gardent en leur possession jusqu'au coup d'envoi.

Ce jour-là, pour la première fois en 19 ans de carrière, l'arbitre Walt Anderson n'a pas retrouvé le sac contenant les ballons des Patriots et des Colts avant de se rendre sur le terrain. Cela l'a profondément choqué au point où il a utilisé un mot vulgaire, ce qui n'est pas dans ses habitudes.

McNally, sans la permission d'un officiel, a pris les sacs et s'est dirigé vers le terrain. Chemin faisant, il s'est arrêté dans une toilette se verrouillant de l'intérieur, où il est resté 1 min 40 sec selon la caméra de surveillance installée dans le couloir. Des simulations ont démontré que cette période de temps est suffisante pour réduire la pression des ballons à l'aide d'une aiguille.

Aux enquêteurs, McNally a raconté avoir déposé les deux sacs dans un coin de la toilette avant d'utiliser l'urinoir. Il a indiqué avoir souvent agi ainsi dans le passé, une assertion qui semble fausse. D'ailleurs, la toilette n'est pas dotée d'un urinoir.

Brady est manifestement devenu nerveux lorsque l'affaire a éclaté. Il a eu six entretiens téléphoniques avec Jastremski dans les trois jours suivants. Une anomalie, puisqu'il n'avait eu aucun échange avec lui par texto ou téléphone dans les six mois précédents. Il l'a aussi convoqué dans la salle des quart-arrières des Patriots pour la première fois depuis son arrivée avec l'équipe.

D'autre part, les préférences de Brady en matière de pression des ballons sont au coeur des échanges de textos entre McNally et Jastremski au fil des mois précédents.

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Robert Kraft, le propriétaire des Patriots, et Bill Belichik, l'entraîneur, sortent indemnes de l'enquête.

Quant au commissaire Roger Goodell, qui avait promis une enquête étoffée, il a tenu parole. Kraft, un de ses plus fidèles alliés, ne lui pardonnera pas de sitôt. Hier, il a dit ne pas comprendre pourquoi la NFL avait consacré autant de ressources à cette enquête. Malgré sa colère, il a déjà annoncé que les Patriots se plieraient aux décisions disciplinaires du circuit.

Que fera la NFL à propos de Brady? Une amende salée? Une suspension? Goodell jouera gros dans ce dossier. Chose sûre, la NFL devra modifier ses pratiques concernant la surveillance des ballons avant les matchs.

La pression des ballons n'a rien changé au résultat du match entre les Patriots et les Colts. Mais une ligue ne peut accepter que ses règlements soient contournés de la sorte. Brady, dont la réputation était jusque-là sans tache, ne s'est pas illustré dans cette affaire.