La semaine dernière, l'hebdomadaire Sports Illustrated a publié à la une, et en gros caractères, sa prédiction sur le Championnat de football universitaire américain: «Ducks 45, Bucks 41».

À l'intérieur, l'analyse était fouillée: rappel des forces en présence, statistiques et tout le reste... Le magazine, comme à son habitude, a proposé un travail en profondeur.

Seul problème: le match ne s'est pas du tout déroulé comme prévu. Les Buckeyes de l'Université Ohio State ont remporté une victoire sans appel de 42-20 contre les Ducks de l'Université d'Oregon. Et vlan pour la prédiction, pas même venue près de se réaliser!

Bien sûr, tout cela n'a aucune importance. Sports Illustrated nous a offert un article intéressant, et c'est l'essentiel. Dans les médias, les prédictions servent à stimuler la discussion et à présenter de manière originale les forces en présence.

Beaucoup de lecteurs aiment bien lorsque les journalistes se mouillent un peu. Et lorsque leur boule de cristal s'avère embrouillée, ce qui arrive souvent, ils n'hésitent pas à le rappeler à ces intrépides scribes. Eh oui, je parle en connaissance de cause!

Les analyses les plus poussées ne tiennent guère compte des éléments impondérables. Ceux-ci font d'ailleurs la beauté du sport. Le caractère imprévisible des matchs explique pourquoi les droits de télé ont grimpé en flèche au cours des dernières années. Le sport demeure la programmation la plus surprenante qui soit. Personne ne sait comment l'émission prendra fin!

Tenez, peu de gens croyaient que les Broncos de Denver joueraient un si mauvais match contre les Colts d'Indianapolis, dimanche dernier.

Des 13 experts d'ESPN, un groupe composé d'anciens joueurs, d'ex-entraîneurs et de journalistes couvrant le football 12 mois par année, un seul a prédit la victoire des Colts, qui ont pourtant dominé les 55 dernières minutes de l'affrontement.

Bien sûr, après coup, il est facile de trouver des raisons pour expliquer cette contre-performance des Broncos. Peyton Manning était blessé, certes. Mais à Green Bay, Aaron Rodgers a aussi joué sur une jambe, ce qui ne l'a pas empêché, le même jour, de mener les Packers à la victoire aux dépens des Cowboys de Dallas.

Vingt-quatre heures après la défaite des Broncos, l'entraîneur-chef John Fox a quitté son poste. Avec raison, la direction a jugé l'équipe mal préparée. Les Bears de Chicago songeraient maintenant à embaucher Fox. Si la rumeur se confirme, souhaitons-lui bonne chance! Jay Cutler est le quart des Bears. Oui, Fox s'ennuiera de Manning, même blessé...

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Au début de la saison, au micro de Guy Simard au 98,5, j'ai prédit une victoire des Colts au Super Bowl. Un choix audacieux, j'en conviens, mais qui colle à mon goût en matière de prédiction. J'aime souvent choisir des équipes avec un fort potentiel, mais légèrement négligées par rapport aux grandes favorites.

Dans les circonstances, je favorise évidemment les Colts pour renverser les Patriots de la Nouvelle-Angleterre, dimanche.

Comme l'écrivait avec justesse mon collègue Miguel Bujold, lundi, toute la pression sera sur les joueurs de Bill Belichick. Tom Brady ne jouera pas éternellement et ils ne voudront pas rater cette occasion d'atteindre le Super Bowl. On verra comment ils réagiront à la situation, eux qui ont échoué à ce test lors des deux dernières saisons.

Les Patriots ont plus d'un tour dans leur sac, comme les Ravens de Baltimore l'ont amèrement constaté samedi dernier. L'entraîneur Bill Belichick et le coordonnateur à l'attaque Josh McDaniels ont utilisé un jeu truqué pour marquer un gros touché, en plus de confondre leurs rivaux avec des formations inattendues sur la ligne de mêlée.

À moins que les Patriots n'aient d'autres surprises en réserve, ce qui est toujours possible, les Colts auront eu l'occasion, cette semaine, de trouver des moyens pour contrer ces idées originales. L'effet de surprise devrait être diminué.

Les Patriots devront aussi se méfier d'Andrew Luck. Le jeune quart-arrière des Colts fait preuve d'un aplomb formidable.

À Denver, son attitude sur le terrain a été encore plus marquante que son jeu. Luck était en plein contrôle, zéro panique, malgré l'immense défi de jouer devant ce public hostile, dans le froid et en altitude.

On était loin des conditions parfaites du domicile des Colts, doté d'un toit rétractable. Mais Luck ne s'est pas laissé impressionner, ni par l'environnement ni par son adversaire.

Le joueur de 25 ans, dont le père Oliver a lui-même été quart-arrière dans la NFL, avait d'ailleurs annoncé ses couleurs quelques jours plus tôt.

Interrogé sur sa rivalité avec Peyton Manning, que les Colts ont laissé filer en 2012 afin de miser sur lui, il a déclaré à NFL.com: «Ce n'est pas un match quart-arrière contre quart-arrière. Nous ne sommes pas sur le terrain au même moment. J'ai un immense respect pour lui, mais je me préoccupe de la défensive des Broncos, rien d'autre.»

Parions qu'il adoptera la même attitude face à Tom Brady et les Patriots.

Dans la conférence nationale, le match entre les Packers de Green Bay et les Seahwaks de Seattle s'annonçait aussi un classique. Malheureusement, la blessure d'Aaron Rodgers diminue sa mobilité sur le terrain. Les chances de son équipe s'en trouvent réduites.

Devant leurs partisans, les Seahawks constituent une force redoutable. Pour les vaincre, les Packers devront réussir un petit miracle. Sans un Rodgers en pleine santé, le défi me semble trop grand.

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Voici donc ma prédiction: Colts contre Seahawks au Super Bowl, le 1er février, en Arizona. Mais rappelez-vous: les prédictions sont un jeu, pas un art ni une science.

Et peu importe le résultat des deux matchs de dimanche, les amateurs de football assisteront à des rencontres intrigantes. C'est tout ce qui compte.