À trois jours de la date butoir du 31 janvier, Greg Jamison n'a pas complété l'achat des Coyotes de Phoenix. Du coup, la question a réapparu: la ville de Québec pourrait-elle retrouver ses Nordiques?

Hélas, un miracle ne semble pas dans les cartes. Jamison, ancien président des Sharks de San Jose, est un type sérieux, proche de Gary Bettman et familier des arcanes du pouvoir dans la LNH. Les chances qu'il boucle la transaction demeurent excellentes.

Il n'en reste pas moins que la situation à Glendale est intrigante. Lorsque le lock-out dans la LNH a pris fin, on croyait que Jamison confirmerait l'acquisition de l'équipe dans les jours suivants. Ce ne fut pas le cas.

Le nouveau maire de Glendale, Jerry Weiers, est lui-même étonné du silence de Jamison. Dans une entrevue au quotidien Arizona Republic, il a demandé: «S'il détient les sommes nécessaires, pourquoi retarder l'annonce?»

Excellente question! La seule réponse plausible, c'est que Jamison peine à attacher tous les fils du dossier. Ce n'est pas étonnant: sauver le hockey dans le désert semble en soi une recette pour perdre de l'argent. Le maintien de la LNH en Arizona est une entreprise farfelue.

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Gary Bettman sera le premier à féliciter Jamison s'il enlève le morceau. Ce sera pourtant une mauvaise nouvelle pour la LNH.

Le commissaire aura certes préservé son héritage, soit l'implantation du circuit dans le sud des États-Unis, mais il aura surtout prolongé une situation malsaine où une équipe est incapable de subvenir à ses besoins sans l'appui massif des organisations les plus riches.

La LNH n'a aucune bonne raison de maintenir une équipe dans un marché où le hockey demeurera toujours un sport mineur. Sans les 308 millions promis par la Ville de Glendale au cours des 20 prochaines années, Jamison aurait d'ailleurs abandonné son projet depuis longtemps.

Il n'est pas rare qu'une administration publique investisse dans la construction d'un stade ou d'un amphithéâtre. Mais cette fois-ci, Glendale va beaucoup plus loin.

Ce contrat de gestion du Jobing.com Arena, conditionnel à l'achat de l'équipe, cache plutôt une aide directe aux activités des Coyotes. On n'investit plus dans le béton, mais carrément dans l'épicerie.

Dans ce contexte, le nouveau conseil municipal n'accordera pas de délai à Jamison s'il n'a pas finalisé l'achat de l'équipe jeudi. Voilà pourquoi cette échéance est si importante.

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Le renouvellement à long terme de la convention collective devrait normalement fournir une occasion en or à la LNH. Le moment est idéal pour élaborer une stratégie axée sur une augmentation marquée des revenus. La NFL, par exemple, veut plus que doubler les siens d'ici 2027, selon le Sports Business Journal.

À son échelle, la LNH pourrait aussi viser un objectif de croissance ambitieux.

Mais en multipliant les efforts pour sauver les Coyotes, Gary Bettman démontre qu'il ne s'agit pas de sa priorité. La concession générerait en effet des revenus beaucoup plus importants à Québec, une ville où un nouvel amphithéâtre est en construction et où un géant des communications, Québecor Média, souhaite implanter une équipe.

Ainsi, la saison dernière, les Coyotes ont attiré 12 500 amateurs par match, qui ont en moyenne versé 36$ pour leur billet. C'est donc dire que l'organisation a touché environ 18,5 millions aux guichets. Il s'agit d'une estimation généreuse, compte tenu des nombreuses promotions de l'équipe pour attirer des spectateurs.

Comparons ces chiffres à ceux de Winnipeg, le plus petit marché canadien dans la LNH. La moyenne d'assistance est de 15 000 personnes et le coût moyen d'un billet est supérieur à 80$. En clair, les Jets ont généré près de 50 millions aux guichets à leur retour dans la LNH.

Sur le plan de la commandite d'entreprise et des droits de télévision locaux, Winnipeg empoche beaucoup plus d'argent que les Coyotes. Les Jets ne font d'ailleurs pas appel au programme de péréquation de la LNH pour boucler leur budget.

Si Winnipeg représente un aussi grand succès sur le plan financier, il n'y a aucune raison pour que Québec ne fasse pas aussi bien... si on lui en fournit l'occasion!

L'économie de la capitale nationale est en expansion, le taux de chômage est bas et la passion du hockey demeure très forte.

Une ligue en santé est composée d'organisations financièrement solides. Or, les Coyotes continueront d'être le canard boiteux de la LNH. Le groupe de Jamison ne fournira pas de remède miracle. Au plan hockey, les caractéristiques fondamentales du marché de l'Arizona ne changeront pas.

En fait, si Jamison annonce l'achat des Coyotes cette semaine, une seule chose sera sûre: les organisations à hauts revenus, comme les Rangers de New York, les Maple Leafs de Toronto et le Canadien, continueront de les subventionner pendant des années.

Il s'agit d'un bien curieux modèle d'affaires. Surtout dans la foulée de ce transfert réussi des Thrashers d'Atlanta à Winnipeg.

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Au quotidien Arizona Republic, Jamison a indiqué hier que malgré la complexité de la transaction, il s'attendait toujours à la compléter avant la date butoir.

Compte tenu de tous les efforts consentis par la LNH pour sauver les Coyotes, le contraire serait étonnant. Gary Bettman veut qu'ils demeurent en Arizona. Attendons-nous donc à une annonce confirmant la vente au groupe de Jamison dans les prochaines heures.

Dommage, parce que Québec serait un bien meilleur choix pour l'avenir de cette concession.