Le docuréalité 24 CH, qui nous entraînera dans les coulisses du Canadien, diffusera-t-il les réunions où la direction discute du cas P.K. Subban?

Sûrement pas et c'est bien dommage! Car cette impasse contractuelle, à moins d'un règlement rapide, pourrait définir la saison du Canadien.

Analysons les choses froidement: le Canadien forme une équipe modeste. Les résultats de l'an dernier ne sont pas un accident. Et durant l'été, seuls des joueurs de soutien ont été ajoutés à la formation.

Dans ce contexte, l'absence de cet excellent jeune défenseur est regrettable.

Joueur le plus utilisé de l'équipe en 2011-2012, Subban a complété le calendrier avec une fiche de " 9, en plus de terminer cinquième pointeur. Tout cela pour 875 000$, un salaire largement inférieur à sa contribution.

P.K. Subban exige une entente à long terme. Marc Bergevin refuse d'accéder à cette demande. Le DG estime qu'un contrat transitoire de courte durée, accepté par la plupart des jeunes joueurs dans la situation de Subban, constitue un compromis honorable.

Dans la LNH, la rémunération repose largement sur des éléments comparatifs. À ce chapitre, les faits soutiennent la position de Bergevin. Subban ne compte en effet que deux saisons complètes d'expérience dans la LNH. Et il n'a obtenu aucun honneur individuel.

En revanche, Bergevin est d'abord payé pour mettre la meilleure formation possible sur la patinoire.

Remporter à l'usure une guerre de principe lui vaudra sûrement le respect des autres directeurs généraux, toujours inquiets qu'un précédent finisse par coûter cher à leur propre organisation, mais cela n'améliorera pas les chances du Canadien de participer aux séries éliminatoires.

Bergevin a pourtant affirmé qu'il s'agissait-là de son objectif cette saison. Dans un court calendrier de 48 matchs, chaque rencontre prend une grande importance. Chaque fois que Subban n'est pas en uniforme, il s'agit d'une très bonne nouvelle pour les rivaux du Canadien.

Les séries représentent aussi des revenus appréciables pour le Canadien. En être privés une deuxième saison consécutive ne constituerait pas une bonne nouvelle pour les propriétaires. Bergevin ne peut ignorer cette composante de l'équation. Certaines économies finissent parfois par coûter cher.

On reproche parfois à Subban son manque de maturité. Cela joue sûrement un rôle dans le refus du Canadien de lui accorder un contrat à long terme.

Ses nombreuses activités durant le lock-out n'ont sans doute pas fait l'unanimité. P.K. a semblé s'amuser même durant le conflit de travail. Ironiquement, cette joie de vivre explique en partie sa popularité auprès des fans.

On dit aussi que Subban tombe parfois sur les nerfs de ses coéquipiers. Peut-être. Mais l'important, c'est qu'il tombe aussi sur les nerfs de ses adversaires. Ce qu'il réussit plutôt bien. Le Canadien manque de joueurs énergiques comme lui.

Admettons néanmoins que la forte personnalité de Subban a provoqué des frictions la saison dernière. À sa décharge, reconnaissons que l'environnement n'était pas propice au développement harmonieux des espoirs de l'équipe.

Jacques Martin, qui s'est peu à peu habitué à la nouvelle génération de hockeyeurs, n'était peut-être pas prêt à gérer un gars aussi exubérant que Subban.

Quant à son successeur, Randy Cunneyworth, il n'était pas prêt à gérer qui que ce soit.

Dans cette ambiance de vaudeville, où Michael Cammalleri fut même échangé durant un match, l'équipe a perdu ses repères. Difficile de bien encadrer un esprit fougueux comme celui de Subban dans ces circonstances.

Michel Therrien, qui a connu du succès avec de jeunes joueurs à la barre des Penguins de Pittsburgh, possède les atouts pour tirer le meilleur parti de Subban. Le jour de sa nomination, il était déjà impatient de le diriger, le qualifiant de pur-sang.

Si Subban rentre au bercail, il se retrouvera devant un entraîneur avec de la poigne, prêt à lui transmettre des messages importants.

On ne peut certainement pas reprocher à Subban de négocier durement. Si les joueurs ont appris quelque chose lors du renouvellement de la convention collective, c'est que leurs patrons ne se gênent pas pour étirer eux-mêmes l'élastique.

Quant à la règle du contrat transitoire, elle n'est pas inscrite dans la convention collective. Bergevin pourrait très bien choisir une autre voie.

Cela dit, ce dossier devra se régler avant longtemps. Plus il se prolongera, plus il laissera des séquelles importantes. Surtout si un éventuel règlement final fait mal paraître l'une des parties.

Si le Canadien se retrouve vite dans une position précaire au classement et que le cas Subban demeure en suspens, Bergevin ne pourra demeurer inactif. Il devra envisager un échange.

Malheureusement, les autres équipes devineront vite que Bergevin est dans le pétrin et les offres ne répondront sans doute pas à ses attentes.

Chose sûre, l'impasse actuelle risque d'empoisonner la direction du Canadien. L'équipe n'est pas spectaculaire et Subban est un des rares joueurs capables de soulever la foule.

Mais le jeune défenseur doit lui aussi bien étudier ses choix. Une longue absence ne servira pas son développement. Elle pourrait aussi irriter ses coéquipiers. Si c'est le cas, ils ne lui réserveront sans doute pas le plus bel accueil à son retour.

Pour ses débuts dans un poste de DG, Bergevin se retrouve dans une situation délicate. La manière dont il réglera ce dossier donnera, très tôt dans son mandat, une excellente idée de ses capacités de gestionnaire.