Tout le monde s'entend là-dessus: sans argent, pas de médailles olympiques. Voilà pourquoi la question du financement des athlètes canadiens est si cruciale.

En annonçant une injection de 100 millions dans le développement du sport de haute performance au cours des quatre prochaines années, le Comité olympique canadien (COC) a relevé un défi considérable.

Ce chiffre fait rêver Marcel Aubut depuis son arrivée à la présidence de l'organisme. Cent millions, c'est presque deux fois plus que la somme recueillie durant le cycle 2008-2012.

«Le secteur privé nous soutient à fond, explique Aubut. Sans son appui, on serait comme le Titanic s'apprêtant à frapper l'iceberg.»

Le COC n'a pas dévoilé le nom de nouveaux partenaires corporatifs, hier. Il a plutôt fait l'addition des ententes de commandite déjà confirmées et de celles qui le seront bientôt.

Si plusieurs partenaires du COC ont renouvelé leur engagement pour quatre autres années, près de la moitié du montant représente de l'argent neuf. Dans un contexte économique difficile, où les grandes sociétés canadiennes sont bombardées de demandes de soutien, la prolongation de ces contrats représente une réussite.

Ces entreprises auraient pu investir leur argent dans d'autres secteurs. D'autant plus que contrairement au cycle olympique précédent, elles ne profiteront pas de la visibilité de Jeux olympiques au Canada. Il y a quatre ans, «Vancouver 2010» avait représenté une formidable force d'attraction.

Voilà pourquoi, avec raison, le COC est fier de son coup. Soustraire le financement des athlètes aux aléas de l'économie, et assurer sa progression constante, est une clé du succès.

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Comprendre le financement des athlètes de haut niveau au Canada est un exercice ambitieux! Les intervenants sont nombreux: gouvernements fédéral et provinciaux, Comité olympique canadien, organisme À Nous le Podium, fédérations sportives et secteur privé.

En clair, voici comment les choses fonctionnent.

Le gouvernement fédéral investit environ 200 millions par année. De ce montant, une part de 27 millions est versée directement aux athlètes brevetés, c'est-à-dire l'élite canadienne. Les athlètes de niveau senior reçoivent une aide mensuelle de 1500 $ et ceux en développement de 900 $. Ces montants sont non imposables.

Une autre tranche de 20 millions soutient l'organisation de compétitions internationales au Canada.

Le pays hôte a droit à un plus grand nombre d'inscrits, ce qui permet à notre relève de se mesurer aux meilleurs du monde. Cette expérience inestimable représente une autre manière de développer le sport de haute performance.

Le solde de 150 millions est attribué aux organisations nationales de sport, qu'on appelle communément les fédérations. Chacune reçoit un montant de base.

De cette enveloppe, 64 millions sont versés sous la recommandation d'À Nous le Podium. Comme son nom l'indique, le mandat de cet organisme est clair: favoriser la conquête de médailles par des athlètes canadiens aux Jeux olympiques.

À Nous le Podium identifie les meilleures chances de succès et distribue les subventions en conséquence. Les athlètes d'été reçoivent 36 millions par an; ceux d'hiver, 22 millions. Une enveloppe de 6 millions est destinée aux sports d'équipe.

En 2012, le budget d'À Nous le Podium était de 71 millions. Le Comité olympique canadien comble l'écart.

Hier, Marcel Aubut a promis qu'une partie «majeure» du 100 millions sera destinée aux athlètes de haut niveau. «C'est notre priorité absolue», a-t-il dit. Le COC agira sous la recommandation d'À Nous le Podium.

Plusieurs gouvernements provinciaux ont aussi des programmes d'appui aux athlètes.

Celui du Québec est reconnu parmi les meilleurs au Canada. Non seulement dans le soutien direct, mais aussi au plan des investissements dans les installations (centres d'excellence) et les services (nutrition, psychologie sportive et autres).

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Bon, alors tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes? Le Canada se prépare à une récolte monstre de médailles aux Jeux d'hiver de Sotchi en 2014?

Pas si vite! La réalité est plus complexe. Le mois dernier, par exemple, on a appris que l'équipe canadienne de ski acrobatique avait perdu ses commanditaires en vue de la prochaine saison.

Les entreprises qui appuyaient l'équipe ont mis fin à leur participation. Les dirigeants de la Fédération n'ont pas vu venir le coup, provoquant ainsi la colère d'Alexandre Bilodeau. Seul un fabricant de vêtements s'est engagé à fournir du matériel.

Pourtant, avec des figures aussi connues que Bilodeau, médaillé d'or des Jeux de Vancouver, Mikaël Kingsbury et les soeurs Dufour-Lapointe, ce groupe ne manque pas de têtes d'affiche.

Certains de ces skieurs comptent sur des commanditaires personnels et profitent de l'appui d'À Nous le Podium. Mais il est tout de même troublant qu'à un an des Jeux de Sotchi, l'équipe n'ait pas déniché de partenaire privé.

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Marie-Claire Rouleau est président de Patinage de vitesse Canada. Elle a accueilli avec plaisir l'annonce du COC hier, rappelant la réussite de nos athlètes à Vancouver.

«Maintenant qu'on a pris goût à la victoire, on veut poursuivre dans la même direction, a-t-elle dit. On a constaté que si c'était l'fun de participer, gagner était vraiment très agréable.»

Pas de doute là-dessus. Mais la concurrence est féroce sur la scène internationale. Pour réussir, il faudra encore plus d'argent.