En 1994, Mitt Romney a voulu devenir sénateur de l'État du Massachusetts. Ses chances de vaincre Ted Kennedy étaient presque nulles. Mais quelques bons sondages l'ont encouragé.

Kennedy a alors enclenché la vitesse supérieure. Et il a servi une leçon de politique à son rival.

Dans Turnaround, un livre où il raconte son expérience aux Jeux olympiques de Salt Lake City, Romney assure que sa femme et lui n'entretenaient aucune illusion.

«Nous savions que nous allions perdre. Mais la défaite a fait encore plus mal que nous l'avions imaginé. Pendant plusieurs mois, on s'est demandé: "Pourquoi avons-nous fait ça?"»

En écoutant Romney concéder la victoire à Barack Obama, j'ai repensé à ce passage. Si le candidat républicain a souffert d'une défaite évidente à ses débuts en politique, comment vivra-t-il son cuisant échec de cette semaine?

Son regard ébranlé lorsqu'il a prononcé son allocution, combiné aux traits tirés de sa femme Ann et de son colistier Paul Ryan, en a fourni une indication.

Perdre après avoir cru à la victoire, perdre après avoir récolté 57 millions de votes constitue sûrement une expérience dévastatrice.

Les analystes politiques emploient souvent des expressions du monde du sport dans leurs commentaires. Entre un grand match de championnat et une soirée électorale déterminante, les parallèles sont en effet nombreux. Pas au niveau des enjeux, évidemment. Mais certainement sur le plan émotif.

Romney était sonné après sa défaite. Comme un boxeur battu par un K.-O. décisif au dernier round. Comme une équipe qui perd le septième match de la Coupe Stanley. Comme un olympien qui rate le podium de peu.

En sport comme en politique, certaines défaites sont plus déchirantes que d'autres.

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En revanche, il y a aussi des victoires exceptionnelles. Celle de Barack Obama s'inscrit dans cette liste.

Après un mauvais premier débat, Obama s'est retrouvé dans l'eau chaude. Comme un athlète étonné par la sortie en force de son adversaire. C'est alors que le président a amorcé son grand retour.

Pendant quatre semaines, il a fait montre d'une incroyable pugnacité. Il n'a pas frappé de coup de circuit, mais il a plutôt réussi des simples dans toutes les directions. Il a remporté les deux derniers débats, ajouté du mordant à ses discours, ciblé ses publicités et soigné son organisation électorale.

Et, surtout, Obama n'a jamais perdu confiance. En sport comme en politique, c'est la marque d'un grand champion.

À CNN, l'excellent commentateur John King a expliqué la manière dont le président s'y était pris pour demeurer à la Maison-Blanche.

«Barack Obama a fait comme les grandes équipes sportives qui gagnent leurs matchs à domicile, a-t-il dit, en substance.

«Il a protégé son territoire. Mitt Romney n'a arraché que deux États remportés par Obama en 2008, l'Indiana et la Caroline-du-Nord. Or, il s'agit d'États dont l'ADN est républicain. Le président a protégé ses autres acquis. Comme tenu des difficultés économiques, c'est assez remarquable.»

Il était près de 2h du matin lorsqu'Obama s'est adressé à ses partisans réunis à Chicago. Il a livré un discours enflammé.

Les mots d'Obama avaient la puissance de ceux de 2008, lorsqu'il a saisi l'imagination de millions de personnes dans le monde. Sa conclusion, où il a évoqué l'unité du peuple américain malgré les différences entre ses citoyens, était à couper le souffle.

Après deux années difficiles, Obama est manifestement ragaillardi.

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Le résultat de l'élection ne m'a pas surpris. Pourquoi? Parce que je suis un fan de Nate Silver, un passionné des chiffres qui a décortiqué les sondages durant cette campagne.

Les billets de Silver, publiés sur le site du New York Times, ont connu un succès éclatant. À quelques heures de l'élection, il a estimé à 90,9% les chances d'Obama de conserver la présidence.

Silver s'est d'abord fait connaître avec ses analyses statistiques... dans le sport! Il a établi des modèles originaux au baseball, ce qui lui a permis de bâtir sa renommée. Il aussi étudié le soccer, le football et le basketball.

Une semaine avant le vote, dégageant une tendance lourde, il a expliqué pourquoi Obama était le favori pour l'emporter.

«Les chances du président sont égales à celles d'une équipe de la NFL menant par trois points avec trois minutes à jouer au quatrième quart. Plusieurs choses peuvent alors aller mal. Parfois, cela se produit. N'empêche qu'une équipe dans cette position remporte 79% des matchs.»

Selon Slate.com, l'élection de mardi a couronné deux vainqueurs: Barack Obama et... Nate Silver! Hier, les ventes de son dernier livre étaient en hausse de 800% aux États-Unis.

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En plus de choisir un président, les Américains ont comblé des centaines d'autres postes mardi. À Glendale, en Arizona, un nouveau maire a été élu.

Son nom est Jerry Weiers. L'idée que son administration finance par la bande les Coyotes de Phoenix ne l'emballe pas.

«Glendale n'est pas votre caisse enregistreuse», a-t-il lancé à l'intention de la LNH, actuellement propriétaire de l'équipe.

L'arrivée de Weiers aux commandes complique le défi de Gary Bettman, qui souhaite maintenir les Coyotes en place.

Le nouveau maire semble réticent à l'idée de verser 300 millions en 20 ans au groupe de Greg Jamison pour gérer le Jobing.com Arena.

Sans cet accord, Jamison aura des ennuis à acheter les Coyotes.

Le feuilleton du hockey dans le désert se poursuit et les gens de Québec se remettent à espérer.