Lu sur le site de Radio-Canada, mercredi: 10% des Canadiens croient que les Mayas avaient raison, 10% des Canadiens pensent que ce sera la fin du monde aujourd'hui.

Je refuse de croire à ça. Mais non, je ne refuse pas de croire à la fin du monde! Je refuse de croire à ce pourcentage: impossible.

Juste 10%?

Vous voulez me faire accroire que pour une fois qu'on avait une question permettant de mesurer le taux de connerie dans la société, comme le taux de gras dans le sucre, qu'on arrive à ça, à une personne sur dix?

Pour le fun, j'ai demandé à Twitter - où il n'y a presque pas de cons - de compléter la phrase suivante: «C'est la fin du monde et je...»

... et je suis encore en train de faire un *&?! de PowerPoint (@joeston);

... et j'ai raté ma vie

(@NicolasMorin20);

... et je me fais enlever par un aigle (@fauchonmathieu);

... et j'ai enfin trouvé un moyen de résilier mon contrat cellulaire sans frais

(@double_menton);

... et j'ai pas encore un maudit cadeau d'acheté (@VGaudreau).

On rit, on rit, mais il y a quand même quelques problèmes qui viennent avec la fin du monde. Il y a la commune de Bugarach, en France, qui est au centre de rumeurs: le pic de Bugarach serait épargné par le cataclysme qui fera RESET sur l'humanité.

Le maire Jean-Pierre Delord a eu ces mots solennels: «Je lance un appel à la planète...»

(J'appuie sur PAUSE, ici: le maire d'un village gros comme une poussière d'étoiles, 189 personnes, a bel et bien dit «Je lance un appel à la planète...», et je dis qu'il faut bien que ce maire soit français...)

«Ne venez pas à Bugarach.»

Photo du Figaro: un type en veste de toute évidence tricotée en laine de lama joue d'un instrument que je crois être de la flûte de pan, musique officielle de la fin du monde (comme chacun le sait), et qui est photographié, filmé et épié par des journalistes qui affichent leur mine officielle de travailleurs de l'information blasés...

Légende sous la photo: «Plus que des hurluberlus, ce qu'il y a surtout en ce moment à Bugarach, ce sont des journalistes.»

Question existentielle: moi qui chronique sur la fin du monde, suis-je plus ou moins con que ces journalistes qui ont fait le voyage dans le Languedoc-Rousillon?

Ne me répondez pas.

On rapporte qu'en Chine, des gens auraient fait des arches, pour la montée des eaux.

Deux observations, là-dessus...

1) Comment sait-on que l'humanité sera noyée par des mers déchaînées? Les Mayas n'ont pas précisé leur pensée là-dessus. Ont-ils envisagé l'attaque nucléaire? Le virus de l'Ebola? Les Mayas ont prévu la date de la fin du monde, mais pas le cataclysme.

2) Vouloir survivre à la fin du monde... Pourquoi, grands dieux, mais pourquoi? Avez-vous lu La route, coudonc? Dans le grand totem des calamités, mourir d'un coup vaut mieux que mourir du scorbut, l'os du tibia rongé par son voisin affamé, non?

En tout cas...

Ce qu'il y a de bien, avec la fin du monde, c'est que, qu'elle survienne ou non, ce sera la fin des commentaires sur la fin du monde imminente. Parce que les statuts Facebook et les tweets sur la fin du monde - et les statuts Facebook et les tweets sur le ras-le-bol devant les statuts et les tweets sur la fin du monde -, on n'est plus capables...

Surtout que ça commence à manquer sérieusement d'originalité: quand même Salman Rushdie, l'immense écrivain, accouche sur Twitter d'une niaiserie - Bof, si le monde ne finit pas ce soir, ce ne sera pas la fin du monde -, c'est que c'est le temps que ça finisse....

Je préfère, personnellement, le tweet de @yushihec: «C'est la fin du monde et je dois mettre des sous-vêtements propres, au cas où...»

Ceux qui ne rient pas, ce sont les scientifiques du climat qui, eux, en 2012 plus que jamais, nous annoncent la fin du monde. On ne le croit pas, bien sûr, petites grenouilles que nous sommes, dans la casserole d'eau qui commence à bouillir...

Il manque quoi à leurs savants calculs sur le réchauffement climatique? Il manque quoi pour qu'on capote pour vrai?

Une date.