Comme si de rien n'était, l'animateur Joël Legendre a lancé toute une bombe sur sa page Facebook. Présentant l'affaire comme s'il s'agissait de la Bonne Nouvelle GM de la semaine, l'animateur a annoncé que son conjoint et lui attendaient des jumelles pour l'été. Jusque-là, pas de problème, l'homoparentalité étant de plus en plus acceptée socialement à mesure que les couples gais et lesbiens affichent leur désir d'avoir des enfants et obtiennent le droit d'en adopter.

Mais il ne s'agit pas ici d'adoption. Il s'agit de fécondation in vitro, payée par l'État québécois. Il s'agit aussi - et c'est là où je commence à avoir le tournis - d'ovules achetés aux États-Unis et d'une mère porteuse made in Québec.

En principe, la mère est une amie du couple, mais pas au point de vouloir offrir ses propres ovules aux deux papas. Ce qui revient à dire que cette femme n'est pas tant une amie qu'une vraie mère porteuse qui ne fait que porter des embryons qui n'auront aucun lien génétique ou filial avec elle. L'État québécois, par l'entremise de l'ex-ministre de la Santé Réjean Hébert, a accepté de payer les frais de cette fécondation sans qu'il y ait débat, questionnement, amendement, réflexion collective.

Pourtant, il y avait matière à discussion. Car lorsque Julie Snyder a fait pression sur le gouvernement pour que l'infertilité soit reconnue comme un problème de santé et que son traitement (par fécondation) soit fait aux frais de l'État, elle l'a fait au nom des femmes infertiles qui N'AVAIENT PAS LES MOYENS de se payer de tels traitements. Il n'a jamais été question de payer les traitements d'une mère porteuse engagée par un couple gai qui gagne très bien sa vie, merci.

Il est vrai qu'à ce chapitre, les couples lesbiens sont avantagés par rapport aux couples gais. Mais s'il y a une inégalité, elle est biologique. L'État doit-il la corriger ? Cela reste à voir.

Habituellement, les femmes qui acceptent d'être mères porteuses ne prêtent pas leur ventre. Elles le louent à prix fort. On ignore si c'est le cas pour Joël Legendre et son conjoint. Ce qui m'amène à un autre point : pourquoi lancer une telle bombe pour aussitôt devenir incommunicado et ne fournir aucune explication, sauf à une animatrice amie qui ne risque pas de poser des questions musclées ou dans le cadre d'une émission - Tout le monde en parle - où les questions embarrassantes ne devraient pas être légion ? Serait-ce parce qu'on ne veut surtout pas réfléchir à un sujet difficile avec des centaines d'implications, y compris pour les enfants à naître ?

La question des mères porteuses est controversée. Et bien que leur activité ne soit pas illégale chez nous, le vide juridique qui entoure leur statut permet toutes les dérives. Personnellement, je suis contre le concept, même et encore plus quand les femmes y ont recours pour ne pas déformer leur corps ou mettre de côté une carrière en pleine ascension. Rendus à ce stade avancé de procuration, nous ne sommes plus dans la maternité ni dans l'humanité. Nous sommes dans l'industriel.

Ceux qui défendent le concept des mères porteuses invoquent souvent l'entraide ou l'altruisme de femmes qui travaillent soi-disant pour le bien de la reproduction de l'espèce. Et puis quoi encore ! À l'exception de celles qui le font pour aider une soeur ou une amie proche, je ne crois pas à l'altruisme ni au missionnariat des mères porteuses. Le plus souvent, les mères porteuses sont des femmes pauvres, exploitées par des couples en moyens. Quant aux enfants qu'elles portent, je partage à leur sujet la position de Margaret Somerville, sommité sur les questions d'éthique de McGill. «En général, a-t-elle confié à ma collègue Louise Leduc, les bébés issus des mères porteuses deviennent des produits manufacturés, coupés de leurs racines et de leur identité génétique.»

Bref, toute cette question n'est pas seulement délicate, épineuse, elle mérite aussi un vrai débat de société. Joël Legendre aurait pu en être l'instigateur. Il a préféré l'éviter. Ce faisant, il n'encourage pas la réflexion ni la responsabilité parentale. Il encourage la propagande.

ON EN PARLE TROP

Du poids du ministre de la Santé. Enfin, tout le monde en parle, sauf le principal intéressé. Ce serait intéressant de l'entendre sur le sujet.

ON N'EN PARLE PAS ASSEZ

De la foire Papier 14 qui a installé son chapiteau à l'intersection des rues Sainte-Catherine Ouest et Clark, devant la Maison du développement durable. Des dizaines de galeries de Montréal, mais aussi de Toronto et de Calgary y offrent tout un éventail d'oeuvres sur papier aussi bien de grands noms comme Riopelle, Lemoyne ou Marc Séguin que d'inconnus comme ce graffiteur de New York ou cet autre qui peint des visages sur des tickets de métro. Même si on n'a pas toujours les moyens d'acheter, regarder tout ce qui s'offre à l'oeil est un pur ravissement. Jusqu'à demain.