Vous connaissez Nigella Lawson, sublime créature aux formes généreuses qui semble tout droit sortie de La dolce vita de Fellini? Cette Britannique de 53 ans n'est pas qu'une beauté voluptueuse, c'est une star du monde de la cuisine. Ses émissions comme Nigella Bites sont diffusées en Grande-Bretagne, en France, en Australie et, depuis peu, aux États-Unis. Ses livres de recettes, dont le célèbre et controversé How To Be a Domestic Goddess, se vendent à des millions d'exemplaires.

Mais le livre qui résume le mieux sa philosophie face à la nourriture, taxée par certains de porno gastronomique, c'est Feast: Food That Celebrates Life. (Festin: la nourriture qui célèbre la vie)

Jubilation pure, bonheur en bouteille, plaisir sensuel, célébration jouissive, voilà les mots qui me viennent à l'esprit quand je vois au petit écran Nigella qui trempe son doigt dans la sauce et le lèche avec ravissement.

Je ne suis pas sans savoir que la vie des stars n'est pas facile, mais Nigella m'apparaissait comme l'heureuse exception. C'était une illusion. L'été dernier, des paparazzis ont croqué sur le vif une scène terriblement disgracieuse où Nigella, la déesse domestique, est littéralement prise à la gorge à l'extérieur d'un resto par son richissime mari (le marchand d'art Charles Saatchi), qui semble vouloir l'étrangler.

Nigella a demandé le divorce, plaidant qu'elle était victime de violence et de terrorisme intime de la part de son mari. Cette semaine, témoignant dans une affaire de fraude impliquant deux employées de son ex, elle a admis avoir pris de la cocaïne à plusieurs reprises, torpillant d'un coup l'aura de plénitude domestique qu'elle a toujours dégagée.

Le cas de Nigella, semblable à tant d'autres, m'amène à un mot: célébrité, cet excès de notoriété qui imprime un visage dans le regard public, le propulse sous une lumière aveuglante et modifie à jamais son rapport aux autres. Les conséquences de la célébrité sont nombreuses, mais rarement positives, sinon financièrement, bien entendu.

La célébrité est une drogue dure, une dépendance, un poison, toxique et euphorique, qui fait dérailler les meilleures intentions et brûle les ailes de ses sujets. Évidemment, la drogue et la violence domestique ne sont pas que l'apanage du demi-monde de la célébrité.

Mais s'il fallait dresser des statistiques sur le sujet, le pourcentage de gens affligés serait à coup sûr pas mal plus élevé chez les célébrités. Au risque d'exagérer, je doute qu'il existe sur Terre une seule personne célèbre qui soit saine d'esprit. Je pense sincèrement que la célébrité rend fou. Que la pression qu'elle exerce sur ceux qui ont rêvé d'être célèbres et le sont devenus est aussi énorme qu'inhumaine.

Au Québec, le phénomène existe dans une moindre mesure, mais il exerce sans doute, à une moindre échelle, les mêmes ravages. C'est ce que nous pouvons découvrir depuis samedi à la chaîne Ici Radio-Canada Première.

L'animatrice Catherine Pogonat a conçu un documentaire radio de cinq épisodes sur la célébrité. De René Simard à Véronique Cloutier, en passant par Julie Snyder, Xavier Dolan et Michèle Richard, elle sonde le coeur et l'âme des célébrités de chez nous et cherche à mesurer l'impact que la célébrité a eu sur leur vie. René Simard raconte que l'éternel sourire qu'il affiche n'est pas qu'une façade. C'est une protection.

Xavier Dolan avoue qu'en devenant célèbre, il s'est mis à douter de l'authenticité des rapports des autres avec lui. Vero admet sans ambages que la célébrité est une drogue dure dont elle a besoin pour vivre, quitte à aller chercher pendant ses périodes creuses sa dose (d'amour) sur les réseaux sociaux.

Quant à Michèle Richard, toute sa vie a été construite autour de la célébrité. C'est ce qu'elle voulait depuis toujours, et elle en a payé le prix. Autant de témoignages qui ne changeront rien aux tourments de Nigella Lawson, mais qui confirmeront qu'en fin de compte, elle n'a jamais été une exception.

Sous les étoiles: gros plan sur la célébrité. Samedi 11 h au 95,1.

ON N'EN PARLE PAS ASSEZ

Du pont du Mississippi à Minneapolis. Le 1er août 2007 en pleine heure de pointe, le pont semblable au pont Champlain et construit à la même époque, s'est partiellement effondré, faisant 13 morts et 145 blessés. L'usure, la corrosion, le mauvais entretien ont eu raison d'un pont qui a pourtant été reconstruit en un temps record - un an - au coût de 234 millions US. Matière à réflexion.

ON EN PARLE DRÔLEMENT

De la pauvreté. Le jour de la grande guignolée des médias, on a entendu à C'est pas trop tôt une touchante entrevue d'archives avec un nécessiteux évoquant l'obligation morale pour les pauvres comme lui de trouver un moyen de faire vivre leur famille. L'entrevue a été immédiatement suivie d'un topo sur une nouvelle navette d'hélicoptères offrant un trajet aller simple entre le DIX30 et Montréal pour 99 $. Qu'est-ce qu'on voulait nous dire? Qu'on est toujours le nécessiteux de quelqu'un?