La liste des problèmes que doit régler Montréal est longue et ardue. Alors pourquoi, en attendant, ne pas commencer par de petites choses, des transformations peu coûteuses qui peuvent, elles, commencer à changer la ville? Pour glaner des idées durant cette campagne électorale municipale, la chroniqueuse Marie-Claude Lortie est allée rencontrer plusieurs Montréalais amoureux de la métropole. Voici le créateur Denis Gagnon et ses souhaits pour la cité.

«Juste juste avant le début du défilé, quelqu'un est venu me voir en me disant «il y a un problème» avec le genre de ton qui annonçait le pire. Et puis on m'a dit «Il y a des centaines de personnes à la porte qui ne peuvent pas entrer.» Je n'en revenais pas.»

 

Le moins qu'on puisse dire, c'est que la présentation du styliste Denis Gagnon à la Semaine de mode de Montréal, vendredi dernier, a attiré les foules et fait sensation. Auditoire compact. Critiques élogieuses. À la demande générale, le défilé a même dû être présenté en rappel. Du jamais vu à la SMM.

Denis Gagnon, «c'est un de nos trésors nationaux», a écrit Lisa Tant, la rédactrice en chef du magazine Flare, sur Twitter. «Denis Gagnon est un de nos héros cachés», a renchéri Adrian Mainella, l'animateur de Fashion File, à la CBC.

 

Photo: Bernard Brault, La Presse

Le souhait du designer Denis Gagnon? La création assistée d'un quartier de shopping qui verrait les stylistes québécois réunis, concentrés sur quelques pâtés de maisons, afin que les visiteurs puissent facilement les trouver.

Tout vêtu de noir, le regard encadré par de spectaculaires lunettes Lanvin de style Wayfarers surdimensionnées, le designer fait maintenant partie de ceux qui comptent sur la scène de la mode non seulement montréalaise, mais également canadienne. Pourtant, il n'a même pas de commerce officiel dans la métropole.Vous voulez voir ses créations de cuir, de mousseline, ses drapés, ses fourreaux déconstruits et ses innombrables fermetures éclair? Il faut aller chez lui. À son appartement.

Malgré ses immenses succès, sans la moindre aide financière (sans investissements privés, sans subvention), Gagnon doit en effet fonctionner ainsi pour le moment.

«Mais j'aimerais vraiment avoir une boutique, quelque part, comme sur la rue Saint-Paul», explique-t-il.

Le créateur se voit niché dans un petit commerce, près d'autres designers ou de détaillants originaux. Même un demi-sous-sol ferait son affaire. En fait, il voudrait surtout participer à former, avec des collègues, une sorte de noyau qui deviendrait le moteur d'un quartier de magasinage de mode allumée. Le tout attirerait les touristes et deviendrait une destination en soi.

Son idée pour transformer Montréal, c'est ça. Créer un quartier de shopping qui, sans être réservé uniquement aux designers d'ici, verrait les stylistes québécois réunis, concentrés sur quelques pâtés de maisons, afin que les visiteurs puissent facilement les trouver. Important: on pourrait y marcher d'une boutique à l'autre aisément. On y retrouverait des vêtements, évidemment, mais aussi de beaux objets, des bijoux, des chaussures...

Et il y aurait des vitrines, bien entendu, un regard sur la rue, une interface avec la vie urbaine.

«Quand on va dans une grande ville qu'on aime bien, c'est souvent beaucoup pour le magasinage», explique Gagnon. «À Londres et à New York, il y a Soho, à Paris, c'est le Marais.»

En revanche à Montréal, continue-t-il, tout est éparpillé. Où va-t-on magasiner? «Il y a Marie Saint Pierre sur de la Montagne, Philippe Dubuc rue Saint-Denis, d'autres dans le Mile End...» Le visiteur doit arpenter la ville d'un bout à l'autre pour tout voir. Ou alors, il choisit uniquement un quartier commercial, mais n'a pas nécessairement un bon aperçu de ce qui s'invente ici.

Le Vieux-Montréal, croit Gagnon, serait idéal pour créer cet îlot. La rue Saint-Paul, où quelques boutiques sont déjà installées: Espace Pépin, Michel Brisson, Reborn...

Son modèle serait une version commerciale de la Cité du multimédia, où il y aurait de l'aide financière pour que les créateurs québécois puissent s'installer dans une zone désignée, quitte à intégrer le tout avec leurs bureaux de design. «Ça serait l'fun. Et ça attirerait bien du monde», lance Gagnon, qui a accepté de nous parler et de faire quelques photos avant de partir à Toronto présenter ses créations. «Il me semble que Montréal pourrait profiter de ça.»