Officiellement, c'est une microdéchirure à l'ischiojambier qui m'empêche de courir depuis trois semaines. Une blessure que je me suis autodiagnostiquée - hum ! - après un match de hockey. Officieusement, le vortex polaire et son facteur vent n'ont pas contribué à ce que je me rétablisse plus promptement. Courir à - 10 °C, bien habillé, toujours partant. Courir à - 25 °C, dans le vent, pas tellement...

La bonne nouvelle est venue sous la plume de ma collègue Marie Tison, cette semaine. Faire de l'exercice ne fait pas maigrir (ou si peu). De quoi se réconcilier avec ces quelques kilos en trop accumulés pendant les Fêtes. J'aurais couru 50 km par semaine, mon « régime » estival habituel, que mon tour de taille n'en aurait rien su...

Si, en théorie, brûler des calories par un exercice soutenu devrait favoriser la perte de poids, les experts s'entendent pour dire que ce qu'il y a de mieux pour faire osciller l'aiguille du pèse-personne vers le bas, c'est de surveiller ce qu'il y a dans son assiette. Ceux qui s'entraînent ont tendance à surestimer ce qu'ils peuvent manger par la suite, annulant par une « collation bien méritée » la dépense calorique de leur course/nage/séance de spinning matinale. Limiter l'apport calorique à la source a des effets plus directs et concrets.

L'exercice n'est pas le meilleur moyen de maigrir, donc, mais que l'on ne s'y trompe pas : il est extrêmement bénéfique pour la santé.

On vit plus longtemps, et en meilleure santé, lorsqu'on fait de l'exercice. Le consensus médical en la matière est indiscutable. En revanche, la sédentarité, selon une étude publiée à la mi-janvier, aurait des effets plus nocifs sur la santé... que le tabagisme.

Les chercheurs de la Cleveland Clinic, aux États-Unis, ont analysé les résultats de 122 000 patients ayant participé à des tests physiques sur tapis roulant entre 1991 et 2014. Il ne s'agissait donc pas de simples sondages, auxquels on peut répondre en exagérant le temps que l'on passe à faire de l'exercice (aveu : il y a des semaines, même l'été, où je ne cours pas du tout 50 km). Ils en ont conclu que le manque d'exercice était aussi dangereux pour la santé que la cigarette, le diabète et l'hypertension.

Être actif ne procure pas seulement des bienfaits à long terme sur la santé physique. Une nouvelle méta-analyse, publiée la semaine dernière par JAMA Psychiatry - toujours aux États-Unis - à partir d'un échantillon de quelque 600 000 personnes, démontre que l'exercice joue aussi un rôle important dans la réduction du risque de dépression.

L'entraînement physique, notamment à la course à pied (je prends des notes), permet une meilleure circulation sanguine au cerveau et stimule la sécrétion d'endorphines. Pour certains, de l'avis des chercheurs, l'exercice peut être aussi efficace qu'une psychothérapie ou la prise d'antidépresseurs. C'est-à-dire qu'il s'agit d'une stratégie de prévention de la dépression à part entière.

À l'aube de la Semaine de prévention du suicide, alors qu'il a été beaucoup question de santé mentale ces derniers jours, c'est une nouvelle encore meilleure que celle que j'évoquais à la blague en début de chronique. C'est aussi une source de motivation supplémentaire. Aujourd'hui, froid ou pas, je vais courir dehors. Parce que c'est bon pour le moral.

Tant pis pour la microdéchirure (que je ne ressens plus). Tant pis pour l'ischiojambier (que j'aime traduire littéralement de l'anglais hamstring par « ficelle de jambon »). Et tant pis pour le vortex polaire, qui peut aller se rhabiller.

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Parlant de vortex polaire, je ne suis pas le seul parent - je le constate sur les réseaux sociaux - à s'inquiéter de la tenue drôlement légère des adolescents dans nos rues enneigées, depuis l'arrivée de l'hiver. Je les vois marcher en grappes vers l'école, le manteau de printemps parfois grand ouvert, sans tuque ni mitaines, leurs socquettes laissant leurs chevilles à l'air au-dessus de leurs chaussures d'intérieur.

J'ai envie de leur crier « Habillez-vous ! », tellement j'ai froid pour eux. 

Il n'y a du reste pas deux jours qui passent sans que je fasse la remarque à Fiston, plutôt coquet, qui ne veut sans doute pas sacrifier sa coiffure à la statique d'un bonnet de laine, ni avoir l'air d'un bonhomme Michelin dans un chaud manteau d'hiver digne de ce nom.

Je dois avouer qu'en toute franchise, si je me remémore mes 15 ans, les choses ont très peu changé. J'ai en tête le souvenir précis de longues attentes à des arrêts d'autobus, sans tuque ni mitaines, des Stan Smith aux pieds, avec pour toute protection contre les rigueurs de l'hiver québécois une veste de feutre avec manches en cuirette aux couleurs de mon équipe de hockey. Le nombre de fois où j'ai cru qu'on devrait amputer mes extrémités, tellement j'étais gelé, en fin de soirée, en attendant de rentrer chez moi...

Il ne faut surtout pas le dire à Fiston, mais je ne me souviens pas avoir porté une tuque, un chapeau ou tout autre couvre-chef entre les âges de 12 à 17 ans. Je ne suis même pas sûr que je possédais une paire de bottes, et si tel est le cas, je n'ai pas senti le besoin d'en user les semelles.

Alors je peux bien répéter à Fiston, tous les matins, en profitant du flou artistique qui subsiste entre température réelle et température ressentie : « Il fait - 30 dehors, tu ne peux pas sortir comme ça ! » La vérité, c'est qu'à son âge, mes parents me disaient exactement la même chose. Et qu'il en sera ainsi, de génération en génération, pour des siècles et des siècles, tant que l'hiver survivra au dérèglement climatique. Amen.