Quarante ans plus tard, on se souvient des événements de Mai 68. Mais la question demeure: la célèbre révolte antigaulliste trouve-t-elle ses origines dans le cinéma, comme le veut la légende? Le monde du cinéma a-t-il été à l'avant-garde de ces grands bouleversements?

Début février 1968, le ministre de la Culture André Malraux renvoie le légendaire fondateur de la Cinémathèque française, Henri Langlois, lui reprochant avec raison sa gestion désordonnée et chaotique. Les cinéastes de la Nouvelle vague, dont Langlois est un champion, montent au créneau, sous l'impulsion de François Truffaut.

Les cinéphiles, en particulier les étudiants, leur emboîtent le pas. C'est le début de la confrontation. Pendant une manifestation devant la Cinémathèque, le 14 février, Truffaut, Jean-Luc Godard, Bertrand Tavernier et Jacques Rivette sont tabassés. Dans la foule se trouve le jeune Daniel Cohn-Bendit, l'une des figures de proue du mouvement de contestation qui prend forme.

Est-ce le germe de la révolte à venir? Malraux, dépassé par les événements, réinstalle Langlois. Trois mois plus tard, une grogne plus générale gagne les rues. Le Festival de Cannes n'est pas épargné. Godard et Truffaut mènent le mouvement de solidarité avec les grévistes et les étudiants, empêchant l'événement de se poursuivre. Monica Vitti, Roman Polanski, Louis Malle et Terence Young se retirent du jury. Alain Resnais, Claude Lelouch, Milos Forman, Carlos Saura et plusieurs autres refusent que leurs films soient projetés en compétition. La boucle est bouclée.

Quarante ans plus tard, les historiens se demandent toujours si «l'affaire de la Cinémathèque» a réellement été un prologue du soulèvement de Mai 68 (interprété par certains comme une métaphore du meurtre du père par la société française). C'est de cette manière que l'évoquent les cinéastes (Bernardo Bertolucci récemment, avec The Dreamers). Si ce n'était pas un prologue, c'était certainement un mouvement en phase avec son époque. Comme l'est souvent le cinéma.

Un film français

On reproche souvent au cinéma français de négliger l'histoire au profit des procédés cinématographiques. Il est vrai que le cinéma français récent a une tendance au minimalisme formel et à l'introspection psychologique au détriment d'une forme narrative plus classique.

Un baiser s'il vous plaît est tout ça à la fois. Récit linéaire, raconté à travers une mise en abyme ingénieuse, cette fable au ton décalé, voire loufoque, est une métaphore brillante de la société moderne. C'est aussi un film authentiquement français dans sa forme, qui séduit par sa finesse et son doigté.

Emmanuel Mouret, qui signe le scénario et la réalisation, est irrésistible dans le rôle de Nicolas, un professeur de mathématiques célibataire aux prises avec un besoin d'affection irrépressible... dont les conséquences seront graves pour son amie Julie (Virgine Ledoyen). À l'affiche la semaine prochaine.

Indémodables années 80

J'ai une affection toute particulière, comme bien des cinéphiles dans la trentaine, pour le cinéma de John Hughes. The Breakfast Club, en particulier, a été une révélation pour le préadolescent que j'étais en 1985. Ce fut sans doute le premier film à m'interpeller authentiquement. Le premier film à me proposer des personnages auxquels je me suis spontanément identifié.

The Breakfast Club est aussi le premier film que j'ai revu à plusieurs reprises. J'y ai trouvé une intelligence, un humour et une sensibilité qui ont fait de John Hughes le maître incontesté d'un genre: le film pour ado des années 80, beaucoup moins rose bonbon qu'on pourrait le croire (en pensant à Pretty in Pink, dont Hughes a signé le scénario).

L'humour pince-sans-rire d'Uncle Buck ou de Ferris Bueller's Day Off n'est peut-être pas aussi osé que celui de Superbad, mais la série des «National Lampoon», également scénarisée par John Hughes, a certainement influencé les comédies régressives produites aujourd'hui par Judd Apatow (Knocked Up, 40 Year Old Virgin).

Aussi, je n'ai pas été surpris d'apprendre cette semaine, dans un article de La Presse Canadienne, que les classiques de John Hughes se retrouvent toujours parmi les titres les plus loués du site de location en ligne Zip.ca et qu'ils ont été adoptés par une nouvelle génération d'adolescents.

Un classique reste un classique, peu importe son genre et son époque. On n'ose à peine le reconnaître tellement ça nous paraît improbable, mais il y a après tout une part d'indémodable dans les années 80.

Les pires films des années 80

Je n'ai pas été le seul, cette semaine, à être intrigué par un article de Cyberpresse sur les «Les pires chansons des années 80» (selon le site Popdose.com, Physical, d'Olivia Newton-John remporte la palme). Le texte s'est retrouvé parmi les plus lus de la semaine.

C'est ce qui m'a donné l'idée de chercher dans les archives des Razzies (qui célèbrent chaque année ce que le cinéma américain a de moins intéressant à offrir), la liste des pires films des années 80. Et les finalistes sont: Bolero (1984), mettant en vedette Bo Derek nue et son cheval, Howard the Duck (1986), avec un canard au phrasé particulièrement affligeant, The Lonely Lady (1983) avec Pia Zadora, Mommy Dearest (1981) avec Faye Dunaway, et Star Trek V (1989), réalisé par William Shatner lui-même. C'est Bolero, ce grand classique de fin de soirée à TQS, qui a finalement remporté le titre du pire film des années 80.