Ça ne pouvait pas être plus soporifique que l’an dernier, avec à la barre le malheureux duo d’animateurs formé par Anne Hathaway et James Franco.

Pour cette 84e Soirée des Oscars, l’Académie des arts et des sciences du cinéma a décidé d’y aller avec une valeur sûre: Billy Crystal. La vedette de When Harry Met Sally et autres films d’un autre siècle animait la soirée strass et paillettes de Hollywood pour la neuvième fois, en remplacement d’Eddie Murphy (qui a renoncé à l’animation dans la foulée des commentaires homophobes de son ami producteur Brett Ratner).

S’il n’a pas livré une performance mémorable, Billy Crystal s’est acquitté honorablement de la tâche ingrate de mener à bon port un navire lourd et lent, toujours en retard. Crystal s’est intégré en ouverture, comme à son habitude, à plusieurs séquences des films en nomination. Avec beaucoup d’autodérision, en se moquant du fait qu’il n’est pas l’animateur le plus en demande en ce moment...

Son numéro de chant façon Broadway - «Vous ne pensiez pas que j’allais m’en passer?» -, avait le charme suranné des galas d’antan, et c’est tout naturellement que la soirée, dominée par des films célébrant une autre époque du cinéma (The Artist et Hugo), s’est drapée de nostalgie.

Le style vieille école de Billy Crystal, à l’avenant, a donné lieu à quelques vannes de circonstance, mais rien de bien méchant: «Il n’y a rien qui peut mieux nous consoler des problèmes économiques de la planète qu’une bande de millionnaires s’offrant des statuettes dorées.» Les Oscars ne sont pas les Golden Globes et Billy Crystal, décidément pas Ricky Gervais.

À quelques reprises, on a senti l’animateur cherchant un peu trop à se montrer «dans le coup», en se moquant de l’âge de Christopher Plummer (pour se rajeunir lui-même?), en parlant de son iPad ou en poussant quelques blagues douteuses du type: «Veuillez accueillir un de mes rêves récurrents: Cameron Diaz et Jennifer Lopez.» Mononcle Billy...

Le Cirque du Soleil, qui avait préparé un numéro inédit en marge de son spectacle permanent à Los Angeles, Iris, a réussi son pari d’épater la galerie. Aussi en mode nostalgie, la célèbre troupe montréalaise a offert un très joli numéro d’acrobates (ils étaient 54 en tout) sur le thème de «l’expérience du spectateur au cinéma», imaginé par Jean-François Bouchard, sur fond d’images célèbres de l’histoire du cinéma.

Les remerciements les plus suaves sont venus de Christopher Plummer, qui a grandi à Montréal, et qui a remporté son premier Oscar (pour son rôle de soutien dans Beginners de Mike Mills) à l’âge de 82 ans. «Quand je suis sorti du ventre de ma mère, je préparais déjà mon discours de remerciements aux Oscars», a blagué M. Plummer, le plus vieux lauréat de l’histoire des Oscars.

«Quand j’ai entendu mon nom, je me suis dit que la moitié des États-Unis s’est dit: «Oh non! Pas encore elle!» Tant pis...» a dit Meryl Streep, visiblement ravie d’avoir défié les pronostics en remportant son premier Oscar depuis 1983. L’émotion la plus visible sur scène fut celle d’Octavia Spencer, lauréate de l’Oscar de l’actrice dans un rôle de soutien pour The Help. Elle a, comme elle l’a si bien dit, «commencé à perdre la tête» en acceptant son prix.

Le Français Michel Hazanavicius, grand gagnant de la soirée pour The Artist, a remercié les films et la vie, «qui est parfois formidable», en anglais dans le texte. «J’adore votre pays», a déclaré Jean Dujardin en allant chercher son Oscar du meilleur acteur, avant d’ajouter en criant, dans la langue de Godard: «Génial, merci, formidable!»

Sans surprise, l’Iranien Asghar Farhadi a remporté l’Oscar du meilleur film en langue étrangère pour le remarquable Une séparation. Son discours, à forte connotation politique, s’est terminé par ce souhait: «J’offre ce prix aux gens de mon pays, qui respectent toutes les cultures et les civilisations, et détestent l’hostilité et le ressentiment.»

Les plus sages paroles de la soirée.