Un gouvernement stable après quatre années de chicanes parlementaires, une opposition dynamique qui devra son succès au Québec : voilà un résultat finalement positif.

Un gouvernement stable après quatre années de chicanes parlementaires, une opposition dynamique qui devra son succès au Québec : voilà un résultat finalement positif.

L'hécatombe qui a enterré le Bloc, jusqu'à son chef dans son propre comté, est un événement que nul n'aurait osé prédire hier, et qui aura d'énormes répercussions sur le mouvement souverainiste auquel Gilles Duceppe avait bien imprudemment lié son sort à la fin de la campagne. À court terme, en tout cas, le Québec sortira gagnant de cette élection, dans la mesure où il a crevé la bulle opaque qui l'enfermait dans une solitude hargneuse et improductive.

L'équation Québec = Bloc québécois était un mythe. Cette équation vient d'exploser. Le Bloc meurt, le Québec vit.

Les leçons de cette élection sont nombreuses.

Primo: contrairement à ce que l'on croyait, la désaffection envers la politique, illustrée depuis des années par le faible taux de participation, n'est pas une tendance lourde. Cette fois, les électeurs ont voté en grand nombre... parce qu'ils ont eu envie de voter, parce qu'il se passait quelque chose de nouveau, parce qu'il y a eu cette vague d'enthousiasme pour le NPD.

Deuxio: l'argent et l'organisation ne peuvent triompher de la volonté humaine. Le Bloc roulait sur l'or, grâce aux subventions fédérales octroyées aux partis, et il avait une organisation imbattable grâce aux puissants renforts du Parti québécois. L'électorat n'en voulait plus, et il a eu le dernier mot.

Tertio: un parti incapable de susciter l'adhésion d'une majorité de la population a intérêt à éviter l'éparpillement, et, plutôt que de faire campagne avec une intensité égale à la largeur du pays, à cibler les comtés «prenables» et les clientèles sympathiques à son message. C'est ainsi que les conservateurs ont obtenu leur majorité, grâce notamment aux villes de la banlieue ontarienne et aux citoyens d'origine immigrante dont les valeurs sont plus conservatrices.

Quarto : la concentration des médias sur les chefs a occulté complètement les candidats, en particulier ceux du NPD, qu'on jugeait moins important (il y a un mois). Non seulement a-t-on découvert sur le tard que les poteaux du NPD au Québec étaient des blagues ambulantes, mais l'immense majorité des Canadiens ignorent tout de la vraie nature du parti qui forme maintenant l'opposition officielle.

Qu'est-ce qu'il y avait dans son programme, avant que le parti n'élabore sa courte plateforme électorale? Quelles résolutions ont été votées lors de ses congrès des dernières années? Qui forme l'entourage du chef? Qui compte, dans sa députation? Autant de questions auxquelles on n'a pas la réponse, car les médias ne se sont jamais donné la peine de «couvrir» les activités de ce parti qu'on croyait éternellement réduit au rôle d'un tiers parti...

Résultat: Lawrence Cannon, un ministre qui représentait honorablement le Québec, se voit évincé par un dénommé Ravignat, un instructeur bénévole de karaté qui, aussi tard qu'en 1997 (huit ans après l'effondrement de l'URSS), se définissait comme communiste et souhaitait le retrait du Canada de l'ALENA!

Cinquo: les gens ont un faible pour les leaders qui triomphent de l'adversité. On disait Layton sur la voie de la retraite parce qu'il relevait d'un cancer et d'une opération à la hanche... Au contraire, ces épreuves l'auront drôlement bien servi, surtout au Québec, où Lucien Bouchard n'a jamais été autant aimé que dans les mois suivant son amputation. À la canne de Bouchard, succéda celle de Layton...

En passant, et moins sérieusement, un conseil à Jean Charest: c'est le temps qu'il s'achète une canne, ce serait sa meilleure chance de rehausser son image!