Les slogans dont on nous rabat les oreilles, durant cette campagne électorale, reflètent bien le vide intellectuel qui la caractérise.

Les slogans dont on nous rabat les oreilles, durant cette campagne électorale, reflètent bien le vide intellectuel qui la caractérise.

Dans une pub télévisée, le Parti libéral nous inflige un minable calque du célèbre «Yes we can» d'Obama: «On peut», dit le PLC. On peut quoi? Pouvoir est un verbe transitif! Ce n'est même pas du français.

Les conservateurs ne nous parlent que de «régions», comme si les villes n'existaient pas. On a une petite nouvelle pour eux: le 2 mai, ils n'existeront pas à Montréal, et ce sera bien fait. Le PCC en remet avec une traduction littérale de l'anglais: «Ici pour le Canada». «Here for Canada», cela se défend. En français, cette expression ne veut rien dire.

Avec son insipide «Travaillons ensemble», le NPD en rajoute dans l'insignifiance.

Quant au Bloc, il n'a pu trouver d'inspiration ailleurs que dans le registre des codes postaux: «Parlons Qc»... On n'a même pas l'élégance d'écrire Québec au complet. Voilà qui illustre bien l'usure mentale de ce parti qui a depuis longtemps dépassé sa date de péremption.

Ce n'est pas d'hier que les Québécois essaient de se dégager de l'emprise du Bloc québécois qui ne leur promet que l'impotence et les jérémiades.

En 2004, un timide flirt s'était amorcé avec le Parti conservateur, pour retomber assez vite sous le poids de la déception mutuelle. Cette fois, le Québec fait mine de tomber dans les bras du NPD. Cet engouement, dont on ignore s'il est un feu de paille épisodique ou le début d'un mouvement, ne se traduira pas par des gains tangibles, le NPD n'ayant pas l'organisation requise pour traduire sa popularité en sièges. Il reste que le parti est devenu le premier parti fédéraliste au Québec, et que cette surprenante montée va lui servir au Canada anglais, en accentuant la saignée du Parti libéral.

Bien sûr, on dira que les Québécois manifestent un singulier talent pour choisir des partis voués à l'opposition... en même temps qu'une troublante attirance pour les chefs malades. Lucien Bouchard n'a jamais été aussi populaire que dans les mois suivant son amputation, et Jack Layton, malgré sa bouille pétante de santé et sa forme physique, est tout de même un homme qui se relève d'un cancer de la prostate et d'une opération à la hanche.

Cela dit, si les Québécois ne s'intéressent plus aux deux grands partis, ces derniers n'ont qu'à s'en prendre à eux-mêmes: à l'histoire récente peu glorieuse du PLC, à la faiblesse du leadership de Michael Ignatieff, à la gouvernance rigide de M. Harper et à son goût inquiétant pour le secret.

D'ailleurs, même s'il a toujours été un tiers parti, le NPD n'est pas du tout comparable au Bloc. Le Bloc incarne la marginalité absolue malgré la puissance de sa voix aux Communes, car c'est une voix qui parle dans le vide, et qui représente en outre la négation de la politique, qui est l'art de la négociation et du compromis.

L'intérêt exclusif du Bloc pour le Québec, paradoxalement, enferme le Québec dans une bulle toxique, le privant de la capacité d'influencer positivement l'évolution de la fédération à laquelle il appartient toujours. Le NPD, par contre, est résolument «dans la parade». Il croit au Canada, ce qui est bien la moindre des choses pour un parti siégeant aux Communes, il aspire au pouvoir, ce qui est normal pour un parti politique, et ma foi, il n'est plus impensable que le NPD, s'il continue sur cette lancée, forme un jour l'opposition officielle...