Victime d'un mouvement de ressac dans plusieurs pays - où de plus en plus de citoyens se plaignent de la trop grande porosité de leurs frontières devant l'arrivée d'immigrants de toutes natures - le libre-échange fait lui aussi les frais de la montée du protectionnisme qu'alimentent généreusement les politiciens populistes.

L'érection de murs semble être devenue la grande tendance de l'heure dans plusieurs pays du monde.

Au-delà du mur-frontière que veut construire entre le Mexique et les États-Unis le candidat présidentiel Donald Trump ou celui plus modeste - 1 kilomètre de long sur 4 mètres de haut - que le ministre de l'Immigration britannique s'apprête à ériger pour contenir les milliers de migrants qui s'entassent à Calais, il y a des murs invisibles qui sont aussi en train de se dresser.

Les Britanniques ont décidé cet été de se retirer de l'Union européenne prétextant l'inefficacité et la lourdeur de la structure bureaucratique de l'UE qui ne répondait pas aux besoins des insulaires.

Mais la décision du Brexit a été aussi une réponse à l'initiative de la chancelière allemande Angela Merkel d'ouvrir les frontières de son pays et de l'ensemble de l'Europe à 1,1 million de migrants du Proche-Orient et de l'Afrique du Nord. On a confondu en Grande-Bretagne mondialisation et crise humanitaire.

Le Canada, qui a signé une entente de libre-échange avec l'Union européenne, peine depuis trois ans à la faire ratifier par les 28 pays membres de l'Union.

S'il n'y pas encore un mur formel contre la ratification de l'accord, on voit déjà des lézardes apparaître du côté de l'Allemagne et de l'Autriche où les mouvements populistes antimondialisation se font de plus en plus entendre.

Le sommet du G20 qui vient de se terminer à Hangzhou a été l'occasion de constater que le crédo libre-échangiste ne génère plus la même adhésion qu'il y a 20 ans lorsque la mondialisation des échanges commerciaux était perçue comme la planche de salut qui allait permettre aux pays en développement d'enfin bénéficier d'une croissance économique viable.

Il est quand même étonnant que les leaders des 20 pays les plus industrialisés de la planète se soient sentis obligés de rappeler dans leur communiqué final qu'ils sont toujours engagés à lutter contre toute forme de protectionnisme en matière de commerce et d'investissement.

Voulait-on ainsi solidariser le prochain président de la plus importante force économique mondiale quand on sait que les deux candidats à la présidence font campagne contre les accords de libre-échange ?

LE BOIS D'OEUVRE SACRIFIÉ

Toujours à Hangzhou, la ministre canadienne du Commerce extérieur, Chrystia Freeland, a relancé le secrétaire américain au Commerce, Michael Froman, sur le dossier du bois d'oeuvre canadien.

Le dernier accord sur le bois d'oeuvre entre le Canada et les États-Unis datait de 2006 et il est arrivé à échéance en octobre 2015. Les producteurs canadiens et américains avaient un an pour ratifier une nouvelle entente, mais, visiblement, les deux parties n'arriveront pas à s'entendre d'ici le 12 octobre.

Les Américains maintiennent que les producteurs canadiens sont subventionnés et qu'ils font du dumping sur le marché américain, ils veulent imposer une taxe de 18 à 20 % sur les exportations de bois canadien.

« Les producteurs américains avancent toujours que nos approvisionnements sont subventionnés parce que beaucoup de notre bois est récolté sur des terres publiques.

« Ils ne reconnaissent pas les modifications au régime forestier qui ont été apportées et qui font que nos producteurs paient de 15 à 20 % plus cher leur bois que s'il provenait du privé », déplore encore une fois André Tremblay, PDG du Conseil de l'industrie forestière du Québec.

Le dossier va immanquablement être porté devant un panel de l'Organisation mondiale du commerce qui devra statuer si oui ou non les producteurs canadiens profitent d'un traitement de faveur.

Depuis 1983, avant même la signature du premier accord de libre-échange avec les États-Unis, c'est la 4fois que les producteurs américains se présentent devant un tribunal d'arbitrage. Chaque fois, l'OMC a statué que leurs prétentions n'étaient pas fondées, que les producteurs canadiens ne bénéficiaient pas d'avantages indus.

Les Américains consomment annuellement 50 milliards de pieds cubes de bois d'oeuvre et les producteurs américains sont capables d'en produire seulement 35 milliards.

On a besoin, aux États-Unis, du bois d'oeuvre canadien qui comble environ 35 % des besoins des constructeurs américains, mais lorsque le dollar canadien favorise nos producteurs, on invoque mille et une raisons pour les discréditer.

Malgré l'Accord de libre-échange nord-américain, le bois d'oeuvre fait l'objet de perpétuelles disputes. Imaginez ce que ce sera si Donald Trump ou Hillary Clinton décide de passer la hache dans l'ALENA.

Photo Patrick Sanfaçon, Archives La Presse

Le dossier du bois d'oeuvre va assurément être porté devant un panel de l'Organisation mondiale du commerce qui devra statuer si oui ou non les producteurs canadiens profitent d'un traitement de faveur.