La Bourse de Toronto a mis fin hier à une séquence de sept séances baissières, enregistrant ainsi la plus longue série de reculs quotidiens consécutifs des quatre dernières années tout en portant à plus de 5% les pertes encourues par l'indice S&P/TSX durant le mois de juillet. Le comportement des titres du secteur de l'énergie et des matières premières est en grande partie responsable de la contre-performance de la Bourse canadienne.

L'indice de la Bourse de Toronto, qui avait produit un rendement de 8% pour l'année 2014, cumule aujourd'hui une perte de 9% pour les 12 derniers mois.

Là encore, cette dévalorisation du marché des actions canadiennes n'est pas étrangère à la malédiction qui pèse sur les matières premières et sur le fait que la valeur boursière des entreprises qui les exploitent représente 30% de l'indice canadien.

La corrélation entre la performance de la Bourse canadienne et le marché des matières premières devient encore plus manifeste quand on sait que l'indice Bloomberg des matières premières, qui suit le comportement quotidien des prix de 22 produits de ressources naturelles, a tout juste touché, la semaine dernière, son plus bas niveau des 13 dernières années.

Ce sont bien sûr les prix du pétrole qui ont le plus brutalement chuté au cours de la dernière année avec un repli de plus de 50%. Mais le nickel, le cuivre, le fer et l'or ont aussi tous subi des baisses de prix durant les 12 derniers mois qui sont venus affaiblir des cours déjà déprimés.

La forte dépréciation des prix des ressources naturelles n'a pas comme seule incidence de déprimer notre marché boursier, elle est aussi responsable de la dévalorisation de notre dollar, qui fait les frais de la demande anémique pour nos produits de matières premières.

Certains optimistes seraient portés à croire que l'atteinte d'un creux de 13 ans marque peut-être le début d'un renversement de tendance.

La Chine, frein au redressement

On peut rêver. Il y a 13 ans, en 2002, les prix des matières premières avaient effectivement atteint un niveau d'extrême déprime.

La semaine dernière, je rappelais, dans une chronique qui faisait le parallèle entre la situation économique canadienne actuelle et celle qui prévalait au début des années 2000, que c'est en janvier 2002 que le dollar canadien a touché son creux de tous les temps en clôturant à 61,79 cents US, en raison notamment de l'effondrement des prix de ses matières premières.

Coïncidence ou fatalité, c'est lorsque les prix des ressources naturelles ont été couchés au plancher qu'ils ont finalement amorcé leur redressement à partir de 2002.

Dopés par une demande soudaine et vigoureuse en provenance des économies émergentes de la Chine, de l'Inde, du Brésil et de la Russie - qui sont devenus les moteurs de la croissance économique mondiale -, les prix des matières premières ont entrepris une belle progression pour atteindre des niveaux records jusqu'au moment où l'économie mondiale s'est effondrée dans le sillage de la crise financière internationale de 2007-2008.

Depuis 2011, la Chine a révisé sa politique d'expansion économique en mettant en sourdine les grands travaux d'infrastructures pour réorienter la croissance par la voie de la consommation intérieure.

La Chine n'a plus l'appétit d'antan pour les produits de ressources naturelles canadiens et sa croissance économique, bien que toujours vigoureuse, est en perte de vitesse, comme en ont fait foi les dernières statistiques sur la production manufacturière de juillet, qui affiche son plus bas niveau des 15 derniers mois.

Pire encore, le marché boursier chinois qui a amorcé à la mi-juin une sévère correction de plus de 30%, en l'espace de quelques semaines seulement, vient d'effacer 4000 milliards US de valorisation, de l'argent détenu à 85% par des petits investisseurs dont un nombre non négligeable devront forcément ralentir leur train de vie.

Ce qui n'est pas de bon augure pour les pays producteurs de ressources naturelles, dont le Canada, bien sûr. Soit dit en passant, les prix du pétrole ont chuté de plus de 20% depuis le 10 juin, ce qui coïncide avec le début du mouvement de correction du marché des actions chinois.

La Chine est le plus grand pays consommateur de matières premières au monde et le deuxième consommateur de pétrole de la planète. Si son économie accuse le moindre ralentissement qui soit, la malédiction des matières premières pourrait peser encore un bon moment sur l'économie canadienne.