Un PDG de multinationale ou un économiste chevronné de Harvard qui auraient été téléportés hier dans les couloirs et les salles de conférence du Hilton Bonaventure n'auraient jamais eu la moindre idée que la Conférence de Montréal - qui s'est ouverte hier - se déroule sous une extrême sécurité.

Malgré un nombre très restreint de manifestants qui s'étaient rassemblés hier matin devant l'entrée principale du Hilton, rue De La Gauchetière, la présence policière était pour le moins imposante et surtout très dissuasive. À un point tel qu'on ne dénombrait plus seulement qu'une dizaine de manifestants sur l'heure du midi. Ils n'étaient manifestement pas bienvenus sur le site et ils l'ont bien compris.

Depuis hier et pour les trois prochains jours, le Hilton et toute la Place Bonaventure se sont transformés en une véritable forteresse. Toutes les entrées du 800, rue de La Gauchetière ont été fermées. Les employés des bureaux et des commerces de cet immeuble doivent accéder par des entrées latérales pour aller travailler.

Pour la première fois de ma vie, j'ai pu stationner ma voiture au niveau P-3, plutôt qu'au P-7 ou au P-8. Mises à part les places réservées au mois, le vaste parking multiétages de la Place Bonaventure était vide.

En arrivant au rez-de-chaussée de l'immeuble, impossible toutefois d'accéder de l'intérieur au Hilton même avec une accréditation. Il faut sortir et passer le cordon policier pour accéder à l'hôtel. Bref, il aurait été fort surprenant que même un seul manifestant réussisse à investir les lieux.

C'est que les organisateurs du Forum économique international des Amériques avaient un défi de taille sur les bras.

Rassembler à Montréal durant quatre jours de grands décideurs économiques du monde entier pour discuter des enjeux économiques et financiers de l'heure alors que la ville croule depuis trois mois dans l'anarchie la plus totale était un défi périlleux.

D'autant que les griefs à l'origine de la contestation étudiante ont largement débordé le cadre de la simple opposition à l'augmentation des droits de scolarité universitaires.

Aujourd'hui, tous les manifestants qui protestent ont leurs propres raisons de le faire, mais la très grande majorité d'entre eux milite surtout et avant tout pour un meilleur partage de la richesse et pour un plus juste équilibre entre les privilèges de certains et les obligations des 99% d'autres.

Un événement comme la Conférence de Montréal est justement un lieu où des gens d'horizons divers et qui ont des champs d'expertise uniques discutent de ces clivages sociaux, économiques et financiers et alimente la réflexion pour le bien du plus grand nombre.

Il est réducteur de prétendre qu'un événement comme la Conférence de Montréal n'existe que pour faire l'apologie du système et pour fortifier l'emprise de ceux qui le contrôlent.

Et c'est même dommage que l'interminable crise sociale qui secoue le Québec et le climat de paranoïa permanent dans lequel on est forcés d'évoluer obligent la tenue de cette conférence en circuit fermé. On aurait tous profité du fait qu'elle soit diffusée sur grand écran.