Avouez que votre club ne vous inspire guère confiance.

Le Canadien joue comme une équipe qui n'est pas plus intéressée qu'il ne le faut à participer aux séries. «Inexcusable», «inacceptable»: les qualificatifs utilisés par Jacques Martin et Josh Gorges pour commenter la contre-performance du Canadien contre les Hurricanes de la Caroline, jeudi soir, étaient parfaitement justifiés.

Depuis une semaine, on dirait que le Canadien se laisse porter par le courant, comme si la quasi-certitude de se qualifier pour les séries le dispensait de pagayer ferme pour atteindre son objectif. S'il continue comme ça, il risque de voir sa saison chavirer rapidement.

 

À l'exception de l'infatigable Brian Gionta, les gros canons se sont métamorphosés en tire-pois. Michael Cammalleri, visiblement pas tout à fait remis de sa blessure au genou quand il est revenu au jeu, il y a deux semaines, tarde à retrouver sa touche autour du filet adverse. Benoît Pouliot est retombé dans l'inertie qui l'avait relégué au statut de joueur de second plan avec le Wild du Minnesota. Tomas Plekanec marque des buts, mais il n'a que deux passes à ses 22 dernières parties (ce qui, en toute justice, en dit plus long sur l'inefficacité de ses ailiers que sur la qualité de son jeu). Et je n'ai pas encore parlé de Scott Gomez, ni des frères K.

La stérilité offensive du Canadien, qui a marqué à peine deux buts en moyenne lors de ses 10 derniers matchs, ne représente toutefois qu'une partie du problème. Plus inquiétants sont les multiples revirements, surnombres et erreurs de couverture qui ont permis aux Hurricanes, et aux Islanders avant eux, de trancher dans la défensive montréalaise comme dans du beurre mou.

Jaroslav Halak ne peut pas toujours faire des miracles.

Relégué à la galerie de presse lors du match à Raleigh, Mathieu Darche avait une place de choix pour analyser le jeu du Canadien. Son verdict est juste: «On essayait de jouer un peu trop fancy», a-t-il dit hier après l'entraînement du CH, à Brossard. «Dans les vidéos de nos bons matchs, nos cinq joueurs apparaissent souvent tous dans l'image. Ce n'était pas le cas (en Caroline): on essayait des longues passes et on tentait de faire des petits jeux à la ligne bleue au lieu de lancer la rondelle dans le fond de la zone adverse. Ça créait des revirements. Il faut corriger ça, parce qu'en séries, ça va vraiment nous faire mal.»

La victoire des Rangers, hier, accentue la pression sur le Canadien, à quelques heures de son dernier match de la saison régulière. Certes, le CH pourrait perdre contre les Leafs et se qualifier malgré tout. Mais entreprendre les séries au lendemain d'une série de défaites serait le pire des scénarios pour l'équipe de Jacques Martin.

Rappelez-vous l'an dernier. Le CH avait perdu ses quatre derniers matchs et, sans un point arraché lors d'un revers en prolongation contre Boston, aurait carrément raté les séries. On connaît la suite: le Canadien a été balayé par les Bruins en première ronde.

Josh Gorges reconnaît qu'il y a un parallèle entre ce qui se passe cette semaine et la fin de la saison régulière du Canadien, il y a un an. «Il y a des similitudes», dit le défenseur, récipiendaire méritant, hier, du trophée Jacques-Beauchamp remis à la «quatrième étoile» du Canadien.

«Mais la différence, c'est que l'an dernier, nous sommes partis en vrille à partir du match des Étoiles. Cette année, nous avons joué du bon hockey, dans l'ensemble, depuis la pause olympique. Les deux derniers matchs ont été sous la moyenne, pour dire le moins, mais si nous avons une bonne partie (contre Toronto), nous sommes en séries. C'est la différence. L'an dernier, nous allions dans la mauvaise direction. Cette année, nous bâtissons vers le bon style de jeu.»

C'est une façon de voir les choses. Mais ce n'est pas la seule. Vrai, on ne sent pas cette année la panique et l'anarchie qui régnaient dans le vestiaire il y a un an. Mais la série de six victoires consécutives qui explique en grande partie la fiche de 10-5-3 du club depuis les Jeux de Vancouver a pris fin il y a déjà plus de trois semaines. Depuis, le Canadien a perdu sept de ses 10 derniers matchs!

On ne se prépare pas pour les séries comme ça. C'est pourquoi le Canadien doit se secouer les puces et offrir ce soir son meilleur effort collectif des dernières semaines. C'est pourquoi il doit impérativement vaincre les Leafs. Si les joueurs du CH ne sont pas capables de se motiver pour un match contre les éternels rivaux de Toronto, un samedi soir d'avril à Montréal, leur printemps ne durera pas longtemps.