La grande vedette du Bye bye 2018 a été - et de loin - Anne Dorval. Non, mais, quel talent brut, cette actrice. Même ses participations les plus discrètes - comme en madame à lunettes funky du vox pop de Guy Nantel ou en soeur affectueuse de François Legault - ont toujours brillé dans cette enfilade de sketchs courts et rythmés.

Le Hubert Lenoir d'Anne Dorval a été parfait. Même sans l'effet de surprise des éditions précédentes, sa Melania Trump (prises dans les griffes du Damien de Fugueuse 2), son Kim Jong-un et son garçon édenté de la pub d'auto de 2016 lui valent plusieurs étoiles dorées dans son bulletin personnel.

Je lui ajoute un gros collant doux pour son Anouk Meunier survoltée de l'horrible téléréalité SOSO de TVA.

Claude Legault a, lui aussi, été étonnant et épatant, que ce soit en François Lambert (bien hautain), en Olivier Primate (juste assez bling-bling), en Marc Bergevin (excellent) ou en Donald Trump, sa meilleure imitation. Vraiment, la recrue Legault a habilement enfilé les patins accrochés par Marc Labrèche.

La célèbre revue de fin d'année de Radio-Canada a également attribué de beaux rôles à Patrice L'Ecuyer, qui a été délicieux en Isabelle Brais (l'épouse du premier ministre Legault), en Justin Trudeau façon Bollywood, ainsi qu'en Robert Lepage complètement à côté de ses pompes pendant la mise en scène de Black Panther.

Avec l'enfilade de vedettes invitées pour fêter le 50e anniversaire, il n'est resté que très peu de matériel consistant pour Véronique Claveau et Pierre Brassard, qui a tout de même été très comique en Guy Nantel et en Cary Tauben, chérie. Cela écrit, mention spéciale à la Pénélope McQuade de Véronique Claveau, quasi identique à l'originale.

Au final, ce Bye bye 2018 a été fédérateur et sympathique, mais il manquait vraiment de mordant, je trouve. Les textes auraient pu égratigner davantage. Et on a moins rigolé que d'habitude.

Le contexte de rectitude politique qui englue actuellement les médias a probablement freiné les ardeurs de Radio-Canada, qui ne souhaitait pas déclencher la première controverse de 2019. Ça se comprend et ça se défend. Allô, SLĀV et Kanata.

L'émission phare de Radio-Canada - notre Super Bowl à nous - n'a pas renfermé de moments forts comme la vidéo du magazine Vogue de Céline Dion de l'an dernier. Oui, Marc Labrèche a refait notre diva de Charlemagne - complètement hallucinée - dans sa publicité de vêtements non genrés. Reste que l'impact a été beaucoup moins grand.

Plusieurs bons flashs auraient pu être mieux exploités. Je pense à L'humoriste écarlate, qui a fait patate, et au pastiche du film Les affamés, rebaptisé Les assoiffés, qui s'est étiré inutilement. L'académie des réseaux sociaux avec Catherine Brunet aurait tellement pu pousser ses gags plus loin. Constat similaire pour House of CAQ.

Pas sûr, non plus, que c'était une bonne idée de ressusciter Le tour du monde de RBO. On a déjà connu ces gars-là plus baveux, plus caustiques.

Bien aimé, par contre, la Safia Nolin de party campée par Véronique Cloutier. Visuellement, la Catherine Dorion d'Hélène Bourgeois Leclerc était réussie, sauf que ses répliques n'ont pas visé au centre de la cible.

Presque tout ce qui a suivi le décompte entamé par la grande Dominique Michel n'a pas été enthousiasmant. Mario Pelchat ou Manon Massé, on s'en serait passé. À jeter au bac à compost du Pacte avec Le fake Bye bye de Donald Trump ! Tant qu'à faire, ajoutons-y donc la pub dégueulasse de la mycose des ongles. On garde cependant la formidable réclame du lait inspirée du « whassup » de Budweiser sorti en 1999.

LES BONS COUPS DE JEAN-RENÉ

Jean-René Dufort a de nouveau enfilé une série de perles scintillantes pour son intelligente et divertissante rétrospective de l'année 2018. Rien de terne ici. On en prendrait même une demi-heure de plus.

Parmi les faits saillants, signalons l'autodérision de Guylaine Tremblay à propos de son association avec le voyagiste Sinorama, Mario Pelchat maquillé en Hubert Lenoir et le retour de Ti-Coune (Denys Paris) en correspondant étranger du G7 à Charlevoix.

Notre Infoman a décroché une interview avec la star du porno Stormy Daniels, qui lui a donné la fessée avec L'actualité et lui a dédicacé un livre pour Justin Trudeau.

Beaucoup de belles trouvailles dans cette heure de télé compacte, dont le dessin animé Les caquisteux, Maude Guérin en lectrice de nouvelles nord-coréenne, Catherine Dorion qui roule avec son gros char et Marc Bergevin qui annonce l'échange de l'animateur d'Infoman.

En entrevue avec les politiciens, Jean-René Dufort adopte l'approche complice et réussit toujours à leur arracher des confidences surprenantes. Comme François Legault, qui admet que son ministre Simon Jolin-Barrette peut parler 10 minutes sans rien dire. Cette citation suivra M. Legault très, très longtemps.

LES KIDNAPPÉS SUR LEUR TRENTE ET UN

L'édition spéciale d'En direct de l'univers demeure un classique indémodable du réveillon du 31 décembre, année après année. Les quatre invités de 2018 (Claude Legault, Maude Guérin, Pier-Luc Funk et Kim Thúy) ont été kidnappés par l'IPL Madeleine Tessier (Marie-Chantal Perron) et jetés dans la fourgonnette de Lietteville d'Unité 9.

Numéro d'ouverture pétaradant, mêlant le traditionnel et le moderne, défilé de vedettes à n'en plus finir, feu roulant d'anecdotes et segments plus émouvants : la fête organisée par France Beaudoin ne faiblit jamais.

Le numéro le plus flyé a été celui des drag queens personnifiées par Alexandre Goyette et Normand D'Amour avec Marjo en accompagnement. Maude Guérin n'en revenait pas.

Kim Thúy a explosé de joie en voyant son ami chauffeur de taxi débarquer en scooter dans le studio. C'est pour ces réactions spontanées, branchées sur le coeur, qu'on aime En direct de l'univers.

Ça, et la réconfortante prestation de Fred Pellerin avec les familles nouvellement arrivées au Québec.

À ne pas négliger : la face en point d'interrogation de Pier-Luc Funk quand il a vu Zaz ! Ça ferait un émoji génial.

LA QUATRIÈME ROUE DU RÉVEILLON

À l'année prochaine, qui dérive de l'émission radiophonique À la semaine prochaine de la radio de Radio-Canada, a complété le quatuor des émissions spéciales du 31 décembre. Honnêtement, ce fut la moins intéressante et la moins originale des quatre. L'humour qu'elle renferme paraissait déjà daté. Et en comparaison du Bye bye 2018, En direct de l'univers et Infoman, le manque de budget paraît encore plus criant.

Des gens qui lisent des gags devant un lutrin, ça ne fait pas de la bonne télévision, désolé.

Du côté positif, Dominic Paquet imite Tire le coyote à la perfection, la Denise Bombardier et l'Élise Guilbault de Michèle Deslauriers sonnent comme les vraies et Pierre Verville est probablement celui qui reproduit le mieux la voix de François Legault.