Bien malin celui ou celle capable de déterminer le rôle exact qu'a joué Seve Ballesteros pour aider son équipe à conserver la Coupe Ryder.

J'ai regardé la pleine lune qui brillait au-dessus de l'estrade sur laquelle les joueurs européens célébraient, et je n'ai pas vu Seve brandir son poing comme il l'avait fait après sa victoire au British Open. Je ne l'ai pas vu sourire. Ça ne veut pas dire qu'il n'était pas là. Ça ne veut pas dire qu'il n'a pas signalé à tous ceux qui dormaient au gaz que Rory McIlroy brillait par son absence moins d'une demi-heure avant son départ. Ça ne veut pas dire qu'il n'a pas aidé José Maria Olazabal à garder espoir et à transmettre cette confiance à ses joueurs.

Mais chaque fois que je regardais l'équipe européenne célébrer, le visage d'Ian Poulter me sautait à la figure. Et je n'avais pas besoin de chercher une lueur dans les reflets de la lune pour déterminer quel rôle l'Anglais a joué dans la victoire de son équipe. Je n'avais qu'à regarder le bilan de ses matchs. Une victoire vendredi matin avec Justin Rose contre Tiger Woods et Steve Stricker. Une victoire samedi matin, encore avec Rose, contre Bubba Watson et Webb Simpson. Une autre victoire samedi après-midi, avec Rory McIlroy, qu'il a trainé sur ses épaules, contre Jason Dufner et Zach Johnson, qui n'avaient pas perdu jusque-là.

Et hier? Poulter a encore gagné.

Fiche parfaite

Poulter a été parfait en fin de semaine. Avec ses quatre victoires, il a porté sa fiche personnelle en Coupe Ryder à 14-3-0. C'est énorme.

Il n'a pas seulement été le leader émotif de cette équipe. Il a été son leader, point.

Rory? Il a été bon. Mais il n'avait pas joué à la hauteur de son rang de numéro un mondial avant son duel d'hier. Il devrait peut-être prendre l'habitude d'arriver à la dernière minute avant ses matchs les plus importants.

Graeme McDowell? G-Mac a été mauvais. Et contrairement à Lee Westwood, Paul Lawrie et même Martin Kaymer qui, comme les deux premiers, a été bien inutile avant de jouer les héros au 18e et dernier trou hier, McDowell n'a pas été fichu de gagner sa dernière partie.

Tout s'est joué samedi

Ian Poulter a été l'ancrage de son équipe. «Ce qu'il a réalisé aujourd'hui n'est rien de moins que phénoménal», a d'ailleurs affirmé le capitaine Olazabal, samedi soir.

Qu'est-ce que Poulter a fait de si phénoménal samedi? Il a maintenu l'espoir dans son équipe.

Lorsque Poulter a égalé l'oiselet de Jason Dufner pour battre les Américains au 18e trou, la défense de la Coupe Ryder est soudainement redevenue possible pour les Européens.

Avec un cinquième oiselet de suite, Poulter permettait à son équipe de retourner au chalet avec un recul de 10-6.

À 11-5, on aurait eu droit à un dimanche sans éclat à Medinah. Pourquoi? Parce que personne, pas même Seve, n'aurait cru aux chances de victoire des Européens.

Mais à 10-6, c'était encore possible. Et ça nous a donné le formidable après-midi de golf que nous avons eu hier.

Stratégie gagnante

Parce qu'il devait donner un grand coup dès le début, Olazabal a fait appel à ses meilleurs joueurs dans le cadre des quatre premiers matchs.

Ils ont répondu. Luke Donald a battu Bubba Watson. Sa victoire a mis le couvercle sur les débordements festifs, et somme toute polis, des amateurs américains en fin de semaine.

Poulter a fait ce qu'il fait de mieux. Il a gagné.

McIlroy a suivi l'exemple.

L'un des tournants de la journée d'hier a mis en vedette Justin Rose et Phil Mickelson. Avec deux trous à faire, Mickelson filait le parfait bonheur. Il filait aussi vers la victoire. Justin Rose lui a scié les deux jambes et a fait disparaître son sourire éclatant avec des oiselets, aux 17e et 18e trous.

Ça donnait quatre victoires de suite pour les bleus. Paul Lawrie est sorti de nulle part et a donné une raclée à Brandt Snedeker, qui pourra se consoler avec les 11,4 millions qu'il a empochés la semaine dernière en gagnant les grands honneurs en finale de la Coupe FedEx.

Sergio Garcia a réalisé un autre tournant avec des victoires aux 17e et 18e trous lui aussi pour battre Jim Furyk.

Quand Garcia a gagné, Lee Westwood avait déjà deux Guinness de bues, puisqu'il a finalement joué du bon golf pour battre facilement Matt Kuchar.

Sorti de nulle part, Martin Kaymer a mis un terme aux hostilités.

Certains diront que les Américains ont cru trop vite qu'ils avaient gagné. Que Tiger Woods et Steve Stricker ont miné les chances de leur équipe. Qu'avec seulement 2 victoires sur les 15 duels disputés hier aux 17e et 18e trous, les États-Unis ont plus perdu que l'Europe a gagné.

Tout ça est peut-être vrai.

Mais ce qui est plus vrai encore, c'est que sans Ian Poulter, son émotion, sa hargne, son talent, l'Europe n'aurait jamais gagné.