Lorsque Jacques Doucet a conclu la diffusion du dernier match de la saison des Blue Jays de Toronto, mercredi, à l'antenne de TVA Sports, il l'a fait avec le sourire en donnant rendez-vous aux amateurs de baseball dès le printemps prochain.

Rien à voir avec les sanglots qui l'étouffaient le 3 octobre 2004 lorsque, du haut de la tribune de presse du Shea Stadium à New York, Doucet avait, avec peine et émotion, fait ses adieux à des auditeurs qu'il avait bercés de sa voix unique pendant plus de 30 ans.

Assis derrière le volant de ma voiture, j'avais dû me garer tant l'émotion transmise par Doucet était vive, touchante, poignante au terme du dernier match de l'histoire des Expos.

«Les lumières se fermaient sur une association de 36 ans avec les Expos. Les trois premières années comme journaliste à La Presse. Les 33 dernières derrière le micro de CKAC. Je perdais un travail que j'adorais, mais plus encore, les amateurs de Montréal et du Québec tout entier perdaient les Expos et le baseball majeur.»

Séjour salutaire

Contrairement aux Nordiques, qui renaîtront vraisemblablement à Québec dans un Colisée tout neuf, les Expos et le baseball majeur pourraient difficilement ressusciter à Montréal. L'entrée en scène de TVA Sports a toutefois permis aux amateurs de baseball du Québec de réaliser que, malgré ses 71 ans bien comptés, le bon vieux «Grucho» n'a pas sombré avec les Expos. Qu'il est quant à lui encore bien vivant; que sa voix est toujours aussi juste; que son amour pour le baseball est aussi vif et intense qu'au jour de leur première rencontre.

Rien de nouveau pour les amateurs de balle de Québec. Ça non! Par l'entremise des Capitales, l'équipe de la Ligue Can-Am qui a redonné vie au vieux stade municipal, où Gary Carter a déjà capté les offrandes de Steve Rogers avec les Carnavals, alors club-école des Expos, Jacques Doucet a pu faire ce qu'il fait de mieux dans la vie. Ce qui le rend pleinement heureux: décrire des matchs de baseball.

Il voue d'ailleurs une profonde reconnaissance aux Capitales et aux amateurs de sports de la Belle Ville, qui l'ont accueilli à bras ouverts lorsqu'il est débarqué en ville. «Ils auraient pu me faire la vie dure. Me traiter comme le gars de Montréal qui s'en vient voler du travail à un gars de la place. Ce n'est jamais arrivé. J'ai travaillé avec un gars fantastique en François Paquet et j'ai partagé mon amour du baseball avec des gens aussi passionnés que moi au cours des six dernières années», a raconté Doucet, qui est convaincu que sans cette association de six ans avec les Capitales, il n'aurait jamais pu retrouver Rodger Brulotte, son complice de 17 saisons aux micros de CKAC.

«Six ans, c'est une éternité dans le monde des médias. Si j'avais été inactif au cours de cette période, j'aurais été vite oublié et je suis convaincu que les gens à TVA n'auraient jamais pensé à moi.»

Guerre de médias

Témoin au cours de sa longue carrière de nombreux conflits qui ont éclaté dans le merveilleux monde des médias sportifs du Québec, Jacques Doucet espère que la présence de son nouvel employeur n'entraînera pas de luttes intestines.

«À 71 ans, je n'ai plus l'âge pour ce genre de chose. RDS a tenu le baseball à bout de bras depuis le départ des Expos. J'ai eu la chance d'y travailler à titre d'animateur de relève de temps en temps. Pour l'amour du baseball, on ne peut que se réjouir que RDS diffuse les séries qui commencent, que RDS et RDS2 diffuseront quelque chose comme 180 matchs l'an prochain, peut-être plus, et que Rodger et moi en présenterons une soixantaine. C'est tout ce qui compte.»

Avis aux intéressés, Jacques Doucet favorise toujours les Phillies pour remporter la Série mondiale.

Temple de la renommée

Le retour de Doucet sur les losanges du baseball majeur l'aidera peut-être enfin à obtenir la place qui lui revient au Temple de la renommée à Cooperstown. De fait, les amateurs ont jusqu'à 17h aujourd'hui pour joindre leur vote à ceux des amateurs qui l'ont déjà soumis. Ils peuvent le faire en se rendant à l'adresse suivante: https://apps.facebook.com/my-polls/io1lvaf6.

«Les amateurs du Québec m'ont permis de terminer deuxième ou troisième au scrutin quatre fois lors des six dernières années. Je me considère vraiment choyé, car tous ces votes viennent d'ici et rien que d'ici. Le fait de revoir des collègues et amis côtoyés au cours des 30 dernières années ne nuira pas, mais je laisse l'histoire suivre son cours avec Cooperstown.»

Il en va tout autrement avec l'histoire des Expos. Après avoir traité des beaux moments (1968-1984) dans le premier tome de son ouvrage Il était une fois les Expos, Doucet, avec la précieuse complicité de Marc Robitaille (Un été sans point ni coup sûr) publiera le deuxième tome le 8 novembre prochain. Un deuxième tome plus sombre en raison de la longue agonie de l'équipe.

«Les Expos ont attiré 50 millions de spectateurs. Ils ont marqué nos étés. Que reste-t-il pour en témoigner? Youppi! que le Canadien a heureusement récupéré et une bannière qui flotte au Centre Bell. Rien d'autre! Pas même une petite plaque au parc Jarry ou au Stade olympique. Je trouve ça extrêmement désolant.»

Les mots de Doucet, ajoutés à sa voix qu'il fait bon d'entendre de nouveau, permettront de sauver, au moins un peu, l'histoire de cette équipe qui a marqué sa vie.