Je n'avais pas encore 18 ans. Brian Mulroney venait d'être élu, le taux de chômage se maintenait au-dessus de 13% et les Expos s'apprêtaient à échanger leur receveur Gary Carter.

Mais de quoi parle-t-il au juste, ce matin? De la dernière année où la Ville de Montréal a obtenu une aussi bonne cote de crédit... en 1984. Après 31 ans de statu quo, l'agence Standard&Poor's vient de hausser cette cote de la dette à long terme de la Ville de A+ à AA-.

Dit autrement, la Ville obtient maintenant la quatrième meilleure cote possible sur une échelle qui en compte une vingtaine. Avant, elle était soudée au cinquiéme niveau. L'agence n'a d'ailleurs pas la réputation de jouer au yoyo avec ses cotes. Avant 1984, Montréal avait maintenu une même cote de AA- pendant 18 ans, sous l'ère Jean Drapeau, avant de descendre à A+.

Le sujet peut sembler insignifiant pour certains, aride pour d'autres, mais il témoigne d'une réelle amélioration de la situation financière de la métropole.

Que dit le rapport de l'agence, au juste? «L'amélioration de la cote reflète notre point de vue concernant les liquidités exceptionnelles de la Ville de Montréal et un environnement politique plus stable. Elle traduit également notre perception de l'économie très forte de la ville et de sa performance budgétaire solide. [...] À notre avis, Montréal a une économie très solide, profonde et diversifiée», est-il écrit dans le rapport de la firme.

Encourageant, n'est-ce pas? L'agence constate qu'au cours des deux prochaines années, la Ville maintiendra des surplus budgétaires équivalant à 0,6% de ses revenus, même après les dépenses en capital (lire investissements).

En 2014, les dépenses d'exploitation de la Ville sont passées sous la barre des 5,0 milliards de dollars, en baisse de 6,4%, et elles reculeront encore de 0,2% en 2015. D'ici deux ans, leur croissance n'excédera pas 3,6%, alors qu'elles avaient bondi de 7,7% et de 5,1% en 2012 et 2013. Selon l'agence, le niveau de taxation demeure toutefois élevé, ce qui limite la flexibilité financière de la Ville.

Petit à petit, donc, la Ville se redonne une marge de manoeuvre. Ce n'est pas rien après la vague de scandales qui a frappé l'administration municipale. Remettre ses finances en bon ordre est un exercice difficile, qui fait grincer des dents, mais il n'y a rien comme des finances en bon ordre pour retrouver sa liberté d'action.

Récemment, certains signataires du manifeste Pour un Québec lucide jugeaient que presque rien n'avait changé au Québec depuis 10 ans, que tout était aussi sombre. Cette amélioration de la note de bulletin de Montréal est plutôt un autre signe que les choses progressent, tranquillement. Et d'ici trois ans, il n'est pas impossible que l'agence de crédit fasse de même avec la cote du gouvernement du Québec. À suivre.

Moins d'évasion fiscale sur le web

Autre bonne nouvelle, si l'on peut dire: la réévaluation en forte baisse de l'évasion fiscale provenant du commerce sur l'internet.

Récemment, le ministère des Finances du Québec a fait une étude pour estimer avec plus de précision les pertes de taxes de vente (TVQ) liées au commerce électronique. Les dernières analyses, moins précises, faisant état de pertes annuelles de quelque 475 millions pour le Québec.

Or, le Ministère juge maintenant que ces pertes et dépenses fiscales s'élèvent plutôt à 177 millions en 2014-2015, soit presque trois fois moins. Pour parvenir à une telle estimation, le Ministère a passé en revue les 600 sites internet de vente les plus importants. De plus, son enquête lui a permis de distinguer les achats qui sont réellement taxables des autres. Résultat: la majorité des 600 sites sont inscrits à la TVQ et perçoivent la taxe.

Dans son analyse, le Ministère distingue deux types de transactions problématiques: celles effectuées sur des sites canadiens hors Québec et celles, plus nombreuses, faites sur des sites web hors Canada. Or, il appert que les pertes liées aux transactions au Canada sont bien moindres que prévu.

Dans la précédente évaluation, ces pertes étaient estimées à 311 millions, alors qu'elles seraient en réalité de seulement 40 millions. Hors Canada, les pertes étaient évaluées à 164 millions, alors qu'elles seraient plutôt d'environ 137 millions.

Bref, le gouvernement perd moins que prévu, bien qu'il s'agisse de sommes importantes. En proportion, ces pertes et dépenses fiscales de 177 millions représentent 1,2% des quelque 14 milliards de dollars de recettes tirés des taxes de vente (TVQ et taxes sur les primes d'assurance, sur l'hébergement et sur les pneus neufs).