Le Québec a tout intérêt à se soucier du nouveau gouvernement de Kathleen Wynne. La première ministre de l'Ontario, dont le parti vient d'être élu majoritaire, propose des politiques économiques qui auront une incidence sur le Québec. La plupart des mesures se trouvent dans le budget ontarien déposé - mais non adopté - avant les élections, que Kathleen Wynne a l'intention de reprendre pour l'essentiel.

L'Ontario est la province avec laquelle le Québec a le plus de liens commerciaux. Nos «exportations» vers l'Ontario représentent environ 60% des «exportations» interprovinciales, rappelait le ministère des Finances du Québec dans son récent budget. Voici donc un survol de certains avantages et inconvénients pour le Québec des politiques ontariennes sous Kathleen Wynne.

Avantage: les investissements publics

Le nouveau gouvernement ontarien a promis d'investir 130 milliards de dollars dans ses infrastructures d'ici 10 ans. Principales cibles: les routes, les ponts et les transports en commun. Cet apport de fonds est de nature à relancer l'économie de nos voisins. Chaque dollar investi par le gouvernement dans les infrastructures fait augmenter le produit intérieur brut (PIB) ontarien de 1,14$ à court terme, selon le budget. Or, quand l'économie ontarienne progresse, elle profite tôt ou tard aux entreprises du Québec. De fait, une variation de 1% du PIB réel de l'Ontario donne lieu à une variation de 0,4% du PIB du Québec, selon les estimations du ministère des Finances du Québec.

Avantage: le rattrapage sur la dette

Ces dernières années, les déficits répétés de l'Ontario ont eu pour effet d'y gonfler la dette, à tel point que la province est en train de nous rattraper. Le gouvernement social de Mme Wynne ne devrait pas changer la tendance. En cinq ans, la dette nette de l'Ontario aura bondi de 96 milliards, pour atteindre 289 milliards au 31 mars 2015. Exprimée autrement, la dette y sera passée de 32,5% du PIB à 40,3%, un bond de 7,8 points en cinq ans. Pendant ce temps, au Québec, cette même dette aura crû de 41 milliards, à 192 milliards. Dit autrement, notre dette sera passée de 49,7% de notre PIB à 51,0%, soit un bond de seulement 1,3 point de pourcentage.

Avantage: l'imposition des riches

Dans le budget déposé avant les élections, les libéraux ontariens proposaient de hausser la facture d'impôt des 2% des contribuables les plus riches. Cette hausse aurait pour effet de réduire l'écart avec les riches du Québec, sans toutefois le combler. Essentiellement, le parti de Kathleen Wynne suggérait d'appliquer à un plus grand nombre de contribuables le taux d'imposition maximal de 49,53%. Cet élargissement aurait été fait en diminuant le seuil de revenus à partir duquel s'appliquerait ce taux maximal. Le seuil serait passé de 514 091$ à 220 001$. Au Québec, le taux maximal de 49,97% (provincial-fédéral combiné) s'applique à partir de revenus de 136 272$.

Inconvénient: la bataille de la péréquation

L'Ontario se plaint du traitement qui lui est réservé concernant la péréquation, ce programme de redistribution de la richesse. Cette année, la province voisine recevra 2 milliards, soit 1,2 milliard de moins que l'an dernier. Or, ses revendications touchent directement le Québec. Depuis 2009, le fédéral plafonne les paiements selon la croissance du PIB. Ce plafonnement fait en sorte que les réclamations d'une province comme l'Ontario ont une incidence sur les revenus d'un autre bénéficiaire, comme le Québec. L'Ontario estime perdre 670 millions cette année avec ce plafonnement. Ensuite, l'Ontario se plaint de perdre 300 millions cette année en raison de la décision du Québec de fermer Gentilly-2. Cette fermeture permet au Québec de recevoir plus de péréquation, puisque la province devient temporairement moins riche en raison des coûts de fermeture.

Inconvénient: la réforme de la fiscalité

Le gouvernement Couillard vient de lancer une commission d'examen sur la fiscalité québécoise. Entre autres, la commission évaluera si les nombreux crédits d'impôt aux entreprises atteignent leur but. Or, à ce chapitre, l'Ontario a sept mois d'avance. La province voisine a en effet créé en novembre 2013 son comité technique pour examiner les programmes de soutien aux entreprises, y compris les crédits d'impôt, les subventions et les autres programmes de soutien. Le rapport devait être remis ce printemps, mais les élections en ont reporté le dépôt. Dans son budget non adopté, le gouvernement ontarien se proposait notamment de réformer le crédit d'impôt pour la recherche et développement et celui pour la formation.