Hier matin, la Banque du Canada a relevé son taux directeur d'un quart de point pour le faire passer à 0,50%. Ce geste met fin officiellement à un chapitre de notre histoire économique récente, celui qui portait sur la récession de 2008-2009.

Hier matin, la Banque du Canada a relevé son taux directeur d'un quart de point pour le faire passer à 0,50%. Ce geste met fin officiellement à un chapitre de notre histoire économique récente, celui qui portait sur la récession de 2008-2009.

Cette hausse du taux directeur n'a pas vraiment été une nouvelle. On savait que la banque centrale relèverait ses taux cet été après les avoir gelés à un niveau proche de zéro pendant un an. Ce geste n'est donc ni spectaculaire ni dramatique. Il marque d'une certaine façon le retour à la normale. Nous sommes maintenant prêts à écrire d'autres chapitres de notre histoire économique, qui porteront sur d'autres défis et d'autres problèmes. Et ils sont nombreux.

Le fait que le taux directeur ait atteint 0,25%, le plus bas niveau de son histoire, et que la Banque ait annoncé à l'avance qu'elle le laisserait à ce bas niveau pendant une longue période était tout à fait exceptionnel; il reflétait sa volonté de redonner un élan au crédit après le traumatisme de la crise financière qui nous a frappés fin 2008.

Mais ce type de problème est derrière nous. Le retour à la normale a été consacré lundi par la publication des données sur le PIB canadien. Sa croissance a été très forte au premier trimestre, un rythme annuel de 6,1% qui s'ajoutait à la croissance du dernier trimestre de 2009, forte elle aussi à 4,9%. La vigueur de cette croissance est en partie illusoire, en ce sens qu'il s'agit essentiellement de rattrapage du terrain perdu pendant la récession. Mais à ce rythme, le Canada aura retrouvé son niveau d'avant la récession dès le second trimestre de cette année, soit d'ici la fin du mois.

Au-delà des statistiques, ce qui est rassurant, c'est que la hausse du PIB, plus forte que prévu, ne semble pas artificielle. Elle se manifeste dans l'ensemble des postes d'activité. Elle repose aussi sur une vigoureuse création d'emplois. En avril, le Canada avait récupéré les deux tiers des 417 000 emplois perdus pendant la récession. Au Québec, les 69 000 emplois disparus ont été totalement retrouvés.

Ces résultats montrent aussi que non seulement la récession a été moins forte au Canada que dans les autres pays industrialisés, mais que la reprise y est plus vigoureuse. Même l'OCDE, qui affirmait, à tort, l'automne dernier que le Canada serait en queue de peloton, prévoit maintenant que la croissance canadienne, de 3,6% en 2010, devancera les 3,2 % des États-Unis et le 1,2% des pays de la zone euro.

D'autres problèmes se pointent toutefois à l'horizon. À commencer, sur la scène internationale, par la fragilité de la zone euro et la vulnérabilité de pays dont la situation financière s'est aggravée pendant la récession. Ces éléments d'incertitude sont démultipliés par l'incapacité de la communauté internationale de s'attaquer à la cause première de la crise financière de 2008: les ravages de la spéculation.

À ce contexte international difficile s'ajoute un problème bien canadien. Même si elle a fait preuve de résilience, l'économie canadienne n'est pas particulièrement compétitive. Comme l'a noté récemment le gouverneur de la Banque du Canada, Mark Carney, «le niveau de productivité au Canada est passé du troisième rang des 20 pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques en 1960 au quinzième rang des 30 membres qui composent l'organisation aujourd'hui».

Cette faiblesse de la productivité, menaçante, va nous rattraper quand les autres pays auront retrouvé leur rythme de croisière. Et c'est cet enjeu qui devrait être au coeur du prochain chapitre qu'il faudra écrire sur l'économie canadienne.