Cela fait des années que le gouvernement dépense des fortunes pour soutenir les courses de chevaux. On est rendus à environ 400 millions depuis 1995, une somme énorme par rapport à l'importance et à la pertinence de cette industrie.

Ça fait aussi des années que ce secteur est en perte de vitesse. Les Québécois sont de moins en moins intéressés par les courses de chevaux. La situation financière de l'industrie, faute de clients et de revenus, ne fait que se détériorer. Et les plans de relance que nos gouvernements, toutes couleurs confondues, ont concoctés pour sauver l'industrie et les 3000 emplois qu'elle prétend soutenir, ont invariablement été des flops.

Comment se fait-il qu'aucun politicien ne se soit donc rendu à l'évidence, pour dire que cela n'avait aucun sens de consacrer des fonds publics à soutenir une activité sans intérêt et sans espoir. Si cette industrie doit survivre, c'est en volant de ses propres ailes, ou plutôt, en trottant de ses propres pattes.

Cette conclusion, on l'attend toujours de notre monde politique qui, encore une fois, s'est penché cette semaine en commission parlementaire sur cette industrie malade. Personne, même à l'ADQ, ne remet en question le bien-fondé d'avoir subventionné un secteur moribond. Les partis de l'opposition reprochent encore au gouvernement de ne pas faire ce qu'il faut pour sauver le monde des chevaux. Dieu merci, la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget, a affirmé qu'elle ne mettrait pas un sou de plus. Il était plus que temps.

Déjà, quand Bernard Landry, alors ministre des Finances, s'est lancé il y a une dizaine d'années dans le sauvetage de cette industrie, on savait que son intervention était vouée à l'échec. Les faits ont donné raison à ceux, j'en étais, qui avaient critiqué l'interventionnisme de ce politicien si généreux avec l'argent des autres. La relance des courses a été un échec lamentable. Le monde du cheval, même nationalisé, a continué à s'enfoncer dans le crottin. Et les fonds publics ont été utilisés de façon douteuse.

Le gouvernement Charest est intervenu, il a deux ans, pour payer les pots cassés. À priori, son idée de privatiser les hippodromes et ainsi se débarrasser d'un cheval boîteux, pouvait sembler attrayante. Mais en fait, cette privatisation était un autre plan de relance déguisé, encore plus indéfendable parce que les libéraux ne pouvaient pas plaider l'ignorance.

L'entente avec l'entreprise privée choisie, Attractions hippiques inc., dans un processus d'appel d'offres critiqué, prévoyait que Loto-Québec lui remettrait 22% des revenus générés par 1600 appareils de loterie vidéo, que la société d'État sortait des bars pour les installer dans des salons de jeux attenants aux hippodromes. Autrement dit, la relance du secteur par le privé reposait sur une subvention annuelle de 50 millions.

Ça n'a pas marché. Les revenus de ces appareils ont été beaucoup moins élevés que prévu. Pourquoi? Parce que les salons de jeu de Loto-Québec, les Ludoplex, se sont avérés beaucoup moins populaires que prévu, notamment parce que l'on n'y avait plus le droit de fumer et parce que l'opération allait à contre-courant des mesures prises pour lutter contre le jeu compulsif. Et surtout, parce que le déménagement de l'hippodrome de Montréal vers la couronne nord a subi d'importants délais. Attractions hippiques, non viables sans béquille gouvernementale, s'est alors mis sous la protection de la loi sur la faillite.

Il y a une autre raison. Ce modèle de soutien des courses par d'autres modes de pari a été implanté ailleurs, en Ontario et aux États-Unis. Mais ici, ça n'a pas marché parce que les courses de chevaux ont moins de succès qu'ailleurs sur le continent. La ministre Jérôme-Forget a cité des chiffres saisissants. De 1980 à 2007, les paris des hippodromes au Québec sont passés de 345 millions à 142 millions. Mais la grande majorité de ces paris, 82%, ont porté sur des courses qui ne se déroulent pas ici.

Résumons. Une subvention annuelle de 50 millions par année pour aider des chevaux sur lesquels les Québécois ne parient que 26 millions. N'y a-t-il pas un petit quelque chose qui cloche?

Bien sûr, il y a, dit-on, quoique j'en doute, les emplois des 3000 artisans du monde des chevaux. Mais jusqu'où peut-on soutenir une activité qui tourne à vide. Si les Québécois désertaient la malbouffe, se mettrait-on à subventionner les MacDo et les stands à patates de la province pour sauver des jobs?

Acculées à la faillite, Attractions hippiques dénoncent le manque de solidarité de Loto-Québec et exigent que le gouvernement lui remette les 50 millions sur lesquels elle comptait. Il n'y a qu'une seule réponse à donner. Et c'est non.