Les piaillements ont commencé à se faire entendre il y a de cela quelques semaines, quand la bande annonce de Sex and the City est apparue sur le site d'Apple.

Et par piaillements, j'entends «piaillements», ce bruit particulièrement aigu, joyeux et agressant que se partagent les canaris et certaines femmes quand elles discutent entre elles. Hiiii! Le fiiiiiilm! Hiiiiii! Carriiiiiie va mariiiiier Biiiiiig! Hiiiiii! Steeeeeve et Smiiiiiith sont tellement miiiiiiignons! Nous avions quantité de «i» à notre disposition et nous avions choisi d'en abuser copieusement.

Comment tu penses que ça va finir? Grande et grave question. Qui a le temps de penser au sort de la planète quand un film aussi important envahit nos écrans? Les plus cyniques d'entre nous levaient poliment les yeux au ciel, impliquant par là que nous étions tellement au dessus de ces triviales préoccupations. Mais quelques heures plus tard, nous avions l'oeil rivé sur l'ordinateur, histoire d'avoir un petit indice de ce qui, après toutes ces années, pouvaient bien encore arriver à ces quatre filles.

Après tout, pendant six ans, elles avaient été une distraction de qualité, une source d'envie vestimentaire, un baume occasionnel, un sujet de conversation, de ridicule et de vraies émotions - elles avaient trouvé le moyen de nous lasser répétitivement avec leurs névroses en nous donnant, de temps en temps, l'impression de ne pas être trop seules. Et puis, filles ou pas, futiles ou non, elles avaient donné ce qu'on appelle poliment un maudit bon show.

Donc pour ma part: inquiétude. Doute. Était-ce vraiment pertinent d'aller déranger ces quatre filles alors que ça leur avait pris six ans à finalement se poser? Ai-je vraiment envie de subir deux heures de névroses et d'angoisses qui au bas mot sont pires que les miennes et font dire à tous les hommes relativement sains d'esprit: c'est pour ça qu'on hésite à s'engager? Les inquiétudes et le nombrilisme de Carrie Bradshaw étaient charmants durant une vingtaine de minutes - seront-ils supportables durant 140 minutes?

Une chose est certaine: ça ne sera pas simple. Les filles de Sex and the City n'ont pas connu la gloire en étant simples et même si nous nous disons régulièrement, entre deux piaillements, qu'elles sont insupportables, nous les aimons à cause de leur complexité qui reflète avantageusement la nôtre.

Cette émission, qui était supposée être une révolutionnaire ode à la gloire des femmes célibataires qui s'assument, était rapidement devenue l'histoire classique de quatre femmes incapables de trouver le bonheur sans un homme. Cette fois, la bande-annonce du film nous apprend que le mariage de Carrie ne fonctionnera pas tel que prévu, que Steve trompera Miranda.

J'ai une intuition: encore une fois, ce sera en grande partie la faute des filles. Mais encore une fois, l'histoire finira bien, même si la bande-annonce commence et se termine en insinuant que les contes de fée n'existent pas. Parce que oui, durant six ans, la série télévision nous a montré, au point d'en être parfois insultante et à la limite sexiste, que les femmes qui veulent tout avoir et encore plus en paient souvent le prix. Mais elle n'a pu s'empêcher, à la fin, de leur livrer le bonheur qu'elles méritaient parce que, justement, elles avaient osé tout vouloir.

Oh et une autre intuition - que dis-je, une certitude: Sweety, the shoes will be faaaabulous...