Ce fut alors, au moment solennel de notre au revoir, un présent que je t'ai offert. Rien de bien tangible, plutôt des sentiments, un espace remplie de mes baisers qui ne connaitront jamais de fin. Je t'ai offert l'infini amour qui nous lie, en fait une image de ça. Tout inclut et tassé dans une jolie et minuscule bouteille de parfum libéré pour l'occasion de ses tâches habituellement enivrantes.

Je voulais ainsi me lier à toi plus étroitement, au plus qu'un père puisse l'être. Il fallait que ces baisers viennent te tenir la main au cours de toutes années que je savais déjà trop longues. Je ne sais pas comment tu les as reçues. Il est possible que rien de mon intention ait pu paraître tellement le moment était chargé. Mais je ne m'étais pas trompé, voilà maintenant sept années que nous sommes séparés. Pas trop certain de ton image qui loge quand même dans mon coeur. Je suis fatigué de cette distance qui m'accuse. Je suis brisé de cette absence qui tonne en moi. Je suis malade de ton silence qui ne lâche pas. Au jour de ton retour, serai-je encore là pour t'accueillir?

Personne autour de moi ne peut me renvoyer un quelconque apaisement. Aucun ne sait ce qu'est perdre un enfant. Plusieurs se gênent même de m'en parler. Et moi, je ne sais que faire. Ouvrir ma fenêtre sur ces jours sans soleil, c'est chaque fois offrir ma maison à la pluie. Le temps que je réagisse enfin et il me faut nettoyer les planchers, replacer les fleurs dans leur vase et sécher les draps par trop mouillés. Et mes larmes dans tout ça, elles s'ajoutent à ma tache de tout remettre en place. Parfois, je suis quelques jours inondé de ma tristesse qui, elle, ne se ramasse pas.

Toujours cette tension, que faire de moi? Te laisser à tes maîtres ou bien tenir. Un père peut-il faire autrement? Souvent, les souffrants s'attachent à la source de leur souffrance parce qu'au bout il n'y a que cela qui ait un sens. C'est fou. Je le sais. Mais... tu es là, l'autre côté de cette porte qui s'est refermée sur moi. Ne pas perdre de vue cette porte c'est tout ce qui me tient. C'est là où je t'ai vu la dernière fois. Tu avais eu tout juste 11 ans et tu pleurais.