Je suis rouge. J'ai eu la chance de grandir dans une famille considérant la société comme multicolore. J'ai été, dès l'âge de 3 ans, exposée à la langue anglaise, grâce à mes parents et pour mon plus grand bien. Je n'ai jamais appris à considérer celle-ci comme une menace.

Je suis rouge. J'ai eu la chance de grandir dans une famille considérant la société comme multicolore. J'ai été, dès l'âge de 3 ans, exposée à la langue anglaise, grâce à mes parents et pour mon plus grand bien. Je n'ai jamais appris à considérer celle-ci comme une menace.

Je suis rouge. On m'a trimbalée, durant toute mon enfance, dans les provinces environnantes. J'ai découvert avec émerveillement les dunes de l'Île-du-Prince-Édouard, la terre rouge du Nouveau-Brunswick et les tulipes de l'Ontario. J'ai mangé de la poutine très étrange au village de la Sagouine. J'ai pêché sur les côtes de la Nouvelle-Écosse. J'ai rencontré des gens de toutes les couleurs, de toutes les langues. J'ai surtout rencontré des gens de qui je ne me suis jamais sentie étrangère. J'ai appris à différencier les accents, les coutumes et les habitudes. J'ai appris qu'il n'y a pas une personne, une ville ou une province pareille à une autre.

Je suis bleue. Depuis mes premiers balbutiements, je suis une amoureuse inconditionnelle de la langue française. Brel, Ferland, Vigneault, Aznavour, Brassens, Ferrat, Leclerc, Léveillé, Plamondon, Charlebois ont foulé mes pas et résonnent encore dans mes oreilles. À 5 ans, je m'époumonais sur N'importe quoi d'Éric Lapointe. À 14 ans, je voulais être la prochaine Pierre Foglia. À 21 ans, j'étudie en enseignement du français au secondaire.

Je suis bleue. Je me suis autoproclamée Québécoise de souche avec tous les jeunes de mon âge quand les Cowboys Fringants sont venus redorer la cause pour ma génération. J'ai scandé qu'on ne touche pas à ma loi 101 au parc Maisonneuve, tatouée de fleurs de lys.

Je suis bleue. J'assume et partage mon amour pour ma langue et ma province à chaque occasion qui se présente. J'ai voyagé en Amérique latine où j'ai partagé mon quotidien avec des jeunes des quatre coins du globe. Are you French? No, I'm Québécoise!

Je ne suis ni rouge ni bleue. Je suis mauve. Je ne ferai pas de compromis avec mon identité. Je ne me confinerai pas à une idéologie. Qu'aucun n'essaie de m'amputer d'une partie de moi-même. Je conçois mal qu'il n'y ait que deux options au Québec, que l'appartenance soit une question aussi stérile, aussi vide de nuances.  

Du haut de mes 21 ans, je réalise qu'une alliance ne peut pas être basée que sur des ressemblances de culture ou d'origine. Une alliance, une confédération, c'est surtout un partage d'intérêts, de ressources et de valeurs visant l'actualisation du plein potentiel de chaque province au sein du pays. Je n'entretiens pas de vieille rancune contre l'Angleterre. Je ne me considère pas comme colonisée, ni comme assimilée, encore moins comme anglicisée.

Je suis mauve et je m'en porte mieux.