Quatre citations qui ont marqué la dernière année, selon nos éditorialistes

« Vas-tu la fermer ! »

Quelle indécence ! Un candidat qui s’exprime ainsi lors d’un débat présidentiel ! Pire, c’est un prétendant à la Maison-Blanche (Joe Biden) qui a tenu ces propos désobligeants alors qu’il s’adressait à un président en exercice ! Shocking, comme disent les Britanniques ! Il faut dire que Donald Trump, lors du débat en question, a fait pire ! Mensonges, insultes, calomnies… un feu roulant d’attaques indignes du chef d’État de la première puissance mondiale. Un rappel que sa présidence avait tiré les États-Unis – et le reste du monde – vers le bas. Si bien que l’insolence de Joe Biden ne semble pas lui avoir nui. Si ça se trouve, bon nombre d’Américains étaient ravis que quelqu’un ose enfin clouer le bec à leur président incontrôlable. Le candidat démocrate a simplement dit tout haut ce que des millions de personnes pensaient tout bas.

– Alexandre Sirois

« Venez me chercher quelqu’un, venez me chercher ! »

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Veillée devant l’hôpital de Joliette en septembre dernier à la mémoire de Joyce Echaquan, Attikamek de 37 ans qui y est morte dans des circonstances scandaleuses.

Ce sont les derniers mots prononcés par Joyce Echaquan, Attikamek de 37 ans morte dans des circonstances scandaleuses à l’hôpital de Joliette le 28 septembre dernier. La vidéo de ses derniers moments est intolérable. Les propos racistes et méprisants prononcés par le personnel médical pourtant censé soigner leur patiente ont secoué le Québec et mis en lumière le racisme que vivent encore les autochtones dans la province. On a appris bien vite que ce qui rend cet évènement exceptionnel, c’est le fait que Joyce Echaquan a eu la présence d’esprit de filmer les circonstances entourant sa propre mort et de les diffuser en direct sur Facebook. Parce que les manifestations de racisme à cet hôpital (et ailleurs aussi évidemment) ne le sont malheureusement pas. Le premier ministre François Legault s’est excusé. Une enquête publique a été lancée. Le PDG du CISSS de Lanaudière a été limogé, et l’évènement a fortement contribué au remplacement de la ministre des Affaires autochtones Sylvie D’Amours par l’ex-policier Ian Lafrenière. Mais ce dernier aura fort à faire pour rétablir les ponts avec les Premières Nations, qui attendent depuis trop longtemps des gestes concrets pour qu’on cesse enfin de tolérer l’inacceptable.

– Philippe Mercure

« Les activités sexuelles les moins risquées pendant que sévit la COVID-19 sont celles où vous êtes seul. »

PHOTO SEAN KILPATRICK, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

La Dre Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada

Qui pensait entendre un jour l’administratrice en chef de la santé publique du Canada inciter les citoyens du pays à pratiquer la masturbation ? C’est pourtant ce qu’a fait Theresa Tam le 2 septembre dernier dans une série de directives qui n’ont évidemment pas manqué d’être tournées en dérision. Ces propos illustrent à quel point la COVID-19 nous aura forcés cette année à couper nos relations (de toutes sortes !) avec les autres. La solitude est un fardeau de plus en plus difficile à supporter pour de nombreux Québécois, et on n’a qu’à observer à quel point les règles de distanciation physique sont difficiles à respecter pour comprendre que l’être humain est un animal fondamentalement social. La santé mentale est le fléau caché de cette pandémie. Selon des chercheurs de l’Université de Sherbrooke, un Québécois sur cinq montre des symptômes de dépression majeure ou d’anxiété généralisée. Les jeunes adultes et le personnel de la santé sont les plus touchés. Dans ce cas comme dans d’autres, la COVID-19 a exposé les failles d’un système criblé de trous. Dans le réseau public, les files d’attente s’allongent. Une réforme (une autre) est à souhaiter ici. Et pour nombre de Québécois qui ne vont pas bien, ça urge.

– Philippe Mercure

« Je ne peux pas respirer »

PHOTO CAITLIN OCHS, ARCHIVES REUTERS

« I can’t breathe », dernière phrase de l’Afro-Américain George Floyd, asphyxié sous le genou d’un policier à Minneapolis le 25 mai, s’est transformée en un cri de ralliement pour le mouvement Black Lives Matter partout dans le monde (ici, manifestation à New York).

C’est arrivé le 25 mai 2020, à Minneapolis. Un policier a maintenu l’Afro-Américain George Floyd plaqué au sol, un genou sur sa nuque. Même si ce dernier le suppliait de le laisser respirer, et ce, pendant 8 minutes et 46 secondes. Jusqu’à ce que George Floyd rende son dernier souffle. La vidéo de cette arrestation est devenue virale. Et la phrase « I can’t breathe » s’est transformée en un cri de ralliement pour le mouvement Black Lives Matter et pour tous ceux qui se battent contre la brutalité policière endémique aux États-Unis. Ce n’était pas la première fois qu’un homme noir asphyxié par un policier prononçait cette phrase avant de mourir. C’est ce qui est arrivé à Eric Garner en juillet 2014, à New York. Reprise sur les pancartes de manifestants, sur des t-shirts et dans des chansons, la phrase « I can’t breathe » exprime, depuis le printemps dernier, le rejet du racisme en général et de la violence policière en particulier. Un chiffre qui en dit long : sur les 300 personnes tuées, bon an, mal an, par la police, plus de 150 ont la peau noire, alors que les Noirs ne représentent que 12 % de la population.

– Agnès Gruda