Le projet de loi visant la mise en place de la bonification du Régime de pensions du Canada (RPC) a été déposé jeudi à la Chambre des communes.

Le gouvernement fédéral montre ainsi sa volonté de concrétiser l'entente conclue avec neuf provinces, le 20 juin à Vancouver.

Le Québec ne s'est pas rallié à la proposition fédérale, y allant d'une contre-proposition préliminaire. Elle soustrairait les gagne-petit des nouvelles cotisations afin de leur conserver l'admissibilité au Supplément de revenu garanti (SRG), non imposable et financé par Ottawa.

On ne connaît pas encore au juste la proposition de bonification du Régime des rentes du Québec (RRQ). Le gouvernement entend tenir des consultations cet automne, à une date toujours inconnue. Ce n'est qu'après cet exercice qu'il fera connaître sa position. Elle pourrait différer de celle esquissée au printemps.

La proposition fédérale bonifie le RPC de deux façons : elle porte le maximum de gains admissibles (MGA) pour lequel les employés et les employeurs devront cotiser de 54 900 $, aujourd'hui, à 82 700 $, en 2025. En outre, le taux de remplacement des gains admissibles passe de 25 % à 33 %.

Présentement, la rente annuelle maximale à laquelle un retraité a droit s'élève à 13 110 $. Le document explicatif publié hier par le ministère fédéral des Finances précise toutefois que la rente moyenne versée s'élève à 7552 $ seulement. Cela s'explique par des gains réels en carrière inférieurs au MGA et à un nombre d'années de cotisations insuffisant.

La mise en place de la bonification se fera progressivement de 2019 à 2025. Au bout de la période, les cotisations des employeurs et des employés passeront de 4,45 % à 5,45 % pour chacun.

La bonification du RPC (et du RRQ) est devenue nécessaire avec le désengagement progressif des employeurs privés dans les revenus de retraite de leurs employés.

Les divers régimes volontaires d'épargne-retraite se sont révélés non concluants jusqu'ici, au point où Ottawa craint que 1,1 million de familles canadiennes, soit une sur quatre, ne disposent pas assez d'épargne à la retraite de leur principal soutien.

Le document fédéral apporte une réponse concluante à un des meilleurs arguments de Québec pour ne pas adhérer à la proposition entérinée par les neuf autres provinces.

Québec soutient que cette proposition pénalise les gagne-petit en les obligeant à cotiser pour une bonification de revenus illusoire. Chaque dollar de rente supplémentaire entraînerait une diminution du SRG auquel ils auraient droit sans elle. Bref, ils cotiseraient pour faire économiser Ottawa.

Ce sombre tableau ne tient pas compte de la Prestation fiscale pour revenu de travail (PFRT) qu'Ottawa entend bonifier en même temps que le RPC. La PFRT, qualifiée en juin de « patente un peu compliquée » par le ministre des Finances Carlos Leitao, est un crédit d'impôt remboursable. Il peut atteindre 1814 $ pour un revenu du travail inférieur à 15 915 $. Il diminue à mesure qu'augmente le revenu, jusqu'à disparaître lorsque ce dernier dépasse 28 209 $, soit la moitié du MGA actuel, grosso modo.

« La bonification proposée à la PFRT sera conçue de façon à fournir des prestations supplémentaires afin de compenser approximativement les cotisations supplémentaires du RPC des travailleurs à faible revenu admissibles », lit-on dans le Document d'information publié par le ministère canadien des Finances. Bref, c'est comme si les cotisations additionnelles étaient remboursées. Cela représente une dépense supplémentaire de 250 millions.

Québec veut aussi protéger les PME québécoises qui versent souvent des salaires moins élevés. Sa proposition de juin pourrait leur faire épargner la hausse de cotisations d'un point de pourcentage prévue par la proposition fédérale sur une bonne partie de leurs salaires versés.

Mais à quel prix ? Les PME devront-elles devoir refuser d'embaucher un travailleur qui exigera plus que le revenu maximum exempt de cotisations additionnelles alors que le vieillissement diminue le bassin de main-d'oeuvre ? Devront-elles fractionner des postes à temps plein en temps partiel et doubler la paperasse pour rester sous le seuil des nouvelles cotisations ?

Les PME de neuf provinces sur 10 éviteront ces écueils.

Il est vrai que les cotisations au RRQ sont déjà plus élevées que celles au RPC (5,325 % contre 4,95 %).

La rémunération hebdomadaire moyenne est à l'avenant : 954,61 $ au Canada dans son ensemble, mais 875,18 $ au Québec, selon les données de Statistique Canada sur l'Emploi, la rémunération et les heures de travail pour juillet. Au Canada, elle est stable, au Québec elle diminue depuis un an.

INFOGRAPHIE LA PRESSE