Si les efforts du Québec pour assainir les finances publiques ont été salués par les agences Standard & Poor's et Fitch qui ont toutes deux relevé leur perspective de notation de sa dette, ils restent à la merci de la conjoncture économique.

De 1981 à 2015, le Québec a enregistré sept surplus seulement, même si son économie a tourné à plein régime la moitié du temps (18 années sur 35).

Voilà pourquoi trois chercheurs de la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l'Université de Sherbrooke concluent que les déficits budgétaires du Québec, tout comme ceux d'Ottawa, sont structurels avant tout.

Ha Dao, Matthieu Arseneau et Luc Godbout se penchent d'abord sur les résultats obtenus par Ottawa, en se basant sur l'écart entre le produit intérieur brut observé et son potentiel. Cela permet de déterminer où est rendue l'économie dans le cycle économique.

À partir de ces deux mesures, ils peuvent évaluer si les soldes budgétaires (surplus ou déficits) sont avant tout cycliques ou structurels. Les premiers sont tributaires de la conjoncture tandis que les seconds reposent sur la capacité des recettes fiscales de combler les dépenses gouvernementales.

À mesure que l'activité économique progresse, la composante cyclique des déficits s'estompe. Elle peut même devenir source de surplus quand l'économie tourne à plein régime, comme c'était le cas à l'orée de la récession de 2008-2009.

Évidemment, un déficit ou un surplus peut être le résultat d'une composante cyclique et structurelle, comme c'est arrivé au Québec en 2000, 2006 et 2007, et il arrive même qu'on puisse observer un solde dont les composantes cyclique et structurelle évoluent en sens opposé.

Ainsi, le surplus fédéral de 13,2 milliards observé en 2005-2006 serait le solde de 13,7 milliards attribué à sa composante structurelle et d'un déficit cyclique de 400 millions.

En revanche, pour le solde de 9,6 milliards observé en 2008-2009, seulement 1,8 milliard est attribuable à sa composante structurelle. Cela suggère que l'économie tournait vraiment à plein régime.

Si le surplus structurel a fondu entre-temps, c'est à cause de la diminution de deux points de pourcentage de la TPS et de l'augmentation des transferts aux provinces et aux territoires, rappellent les auteurs.

À Ottawa ou à Washington, on dispose d'un organisme qui étudie cette relation entre les cycles budgétaires et les soldes budgétaires. À Québec, il n'y a pas en revanche d'équivalent au Bureau parlementaire du budget ou au Congress Budget Office.

Les chercheurs tentent de combler cette lacune. Nous renvoyons les esthètes des mathématiques au lien ci-dessus pour apprécier la beauté des équations leur ayant permis d'évaluer les écarts de production entre le PIB observé et son potentiel.

Cet écart peut être négatif quand l'économie ne tourne pas à plein ou positif quand elle tourne à plein régime. Ce serait le cas présentement au Québec, même si à plein régime fait penser davantage au rythme d'une Lada qu'à celui d'une Ferrari.

Cela est dû au déclin de la population âgée de 15 à 64 ans et aux faibles gains de productivité. Variation démographique et productivité sont les deux éléments pour évaluer la croissance potentielle d'une économie.

Les auteurs calculent qu'entre 2008-2009 et 2013-2014, le déficit structurel du Québec équivaut à 0,7 % à 0,9 %, même si l'économie serait revenue à son plein potentiel dès 2012-2013. Le déficit structurel a toutefois été résorbé depuis, mais il pourrait réapparaître cette année sans compromettre l'équilibre. Le surplus conjoncturel le compensant plus qu'entièrement.

Or, préviennent les auteurs, « de tels surplus ne peuvent servir à faire des réductions fiscales ou des bonifications de services publics car de tels gestes ont généralement des effets permanents sur la structure de revenus et de dépenses. »

Entre 1981 et 2015, le Québec a enregistré cinq surplus structurels seulement.

Infographie La Presse

Solde budgétaire du gouvernement fédéral