L'expansion de l'économie canadienne d'octobre à janvier a été moins énergique qu'on ne l'avait cru jusqu'ici.

En revanche, l'activité a rétropédalé plus vite en février et mars.

En fin de compte, cela a donné un rythme de croissance moins rapide au premier trimestre et une entrée à reculons dans le deuxième, avant même de subir les affres des incendies de forêt albertains.

Rendu aux deux tiers, le printemps va se solder par une décroissance assez prononcée de la production avec, pour tremplins de rebond estival, le début des travaux de nettoyage des abords des champs de sables bitumineux, la reprise de la production de ce pétrole synthétique et la mise en chantier des investissements fédéraux dans les infrastructures.

Les données publiées hier par Statistique Canada étaient décevantes. À première vue, l'augmentation annualisée de 2,4 % du produit intérieur brut réel est plutôt bon signe, surtout qu'il s'agit de la plus forte expansion depuis l'automne 2014. Elle est la deuxième du G7, derrière celle de l'Allemagne et loin devant le faible 0,8 % observé aux États-Unis.

En réalité, on attendait davantage. Plusieurs prévisionnistes gageaient sur 3 % environ. Plus prudente, la Banque du Canada avait misé sur 2,8 %. En un an, le rythme de croissance est de 1,1 % seulement puisque le Canada était en récession technique au premier semestre 2015.

À la publication des données, le dollar canadien a perdu presque un demi-cent d'équivalence par rapport au billet vert qu'il n'a jamais pu récupérer complètement au cours de la séance.

Les données plus faibles sont à la fois le résultat d'une révision de 0,8 % à 0,5 % du rythme annualisé de l'expansion de l'automne, d'une diminution de 0,6 % à 0,5 % de la croissance (non annualisée) de la production en janvier et d'un repli plus fort que prévu de l'activité en mars (- 0,2 % ou plutôt- 0,246 % pour être précis, au lieu de- 0,1 %).

À première vue encore, la contribution de 1,7 point de pourcentage des exportations nettes (exportations moins importations) reste encourageante, même si elle est moins prononcée qu'au cours des deux trimestres précédents.

En réalité, depuis février, le solde du commerce international de biens se détériore au point où l'on a enregistré un déficit record de 3,4 milliards. Vendredi, on aura les chiffres d'avril que les prévisionnistes soupçonnent d'être presque aussi affreux. Quant à ceux de mai, on ose à peine les imaginer à cause de la forte diminution de la production pétrolière albertaine.

Toujours à première vue, les ménages ont accru leur consommation, qui a augmenté au même rythme observé durant le printemps et l'été derniers. Ils ont dû puiser dans leurs économies pour y arriver. Résultat : leur taux d'épargne a reculé à 3,9 %, le plus faible en deux ans.

À première vue et à la suite d'un examen plus approfondi, les entreprises restent réticentes à investir pour augmenter leurs capacités de production dont le taux d'utilisation atteint des sommets dans certaines industries.

Les dépenses consacrées à l'achat de machines et de matériel ont diminué pour le cinquième trimestre d'affilée. Mince consolation, la baisse de 2,7 % est la plus faible des cinq. Les dépenses en produits de propriété intellectuelle ont chuté de 5,6 %, celles en logiciels, de 7,2 % et celles en recherche et développement, de 4,8 %. (Tous ces chiffres sont annualisés.)

À première vue finalement, le déstockage a retranché de la croissance pour le quatrième trimestre d'affilée. Le niveau des stocks par rapport aux ventes a lui aussi un peu diminué. Souhaitons que ce soit le signal que les entreprises attendaient pour relancer leur production, surtout si la croissance de l'économie américaine s'accélère bel et bien ce printemps, comme plusieurs indicateurs le suggèrent.

Le début du premier trimestre a aussi été caractérisé par une forte chute des cours du pétrole et du dollar canadien. Cela a eu des effets néfastes sur l'indice implicite des prix du PIB. Dit autrement, la valeur de la production a augmenté de 1,4 % seulement en rythme annualisé, soit un point de moins que la croissance du PIB réel. Exprimée en dollars courants, la taille de l'économie atteint 1998 milliards. Cela fait maintenant six trimestres d'affilée qu'elle flirte avec la barre des 2000 milliards, sans la franchir. À la lumière de ce qu'on sait, il faudra sans doute attendre l'été pour vivre cette étape historique.