Quelque 275 000 enfants sont en congé forcé aujourd'hui. Pendant que leurs enseignants tiennent une journée de grève, revendiquant de meilleures conditions de travail, et que le gouvernement maintient la ligne dure, prétextant le contexte budgétaire difficile, se pourrait-il qu'on passe à côté de l'essentiel ?

C'est le début d'un automne difficile. Le tiers des enseignants du primaire et du secondaire - ceux affiliés à la Fédération autonome de l'enseignement (FAE) -  débraient aujourd'hui et d'autres journées de grève pourraient suivre.

« Nous voulons de meilleures conditions de travail et de meilleures conditions d'apprentissage pour les élèves », a indiqué le président de la FAE, Sylvain Mallette, en entrevue éditoriale à La Presse. Et pour la première fois depuis longtemps, les enseignants sentent qu'ils ont l'appui des parents, a-t-il ajouté.

Mais une certaine confusion règne. Depuis quelques mois, des parents se mobilisent effectivement pour défendre « leur » école. Les compressions dans le milieu de l'éducation entraînent des réductions dans les services aux élèves. Les parents se sentent directement interpellés pour le bien de leurs enfants. Ces compressions n'ont toutefois rien à voir avec la négociation du contrat de travail des enseignants.

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Voilà des années que l'on prétend que l'éducation doit être une priorité, qu'il faut valoriser la profession enseignante et placer l'élève au coeur des préoccupations.

D'année en année, la négociation en vue du renouvellement des conventions collectives nous donne plutôt l'impression d'assister à une dynamique toujours plus lourde, comme si l'éducation était réduite à une mécanique complexe, presque mathématique. Le contrat de travail liant le gouvernement à ses employés est certes détaillé, mais ô combien contraignant !

La convention collective de quelques centaines de pages détermine le ratio maître-élèves, prévoit l'ajout de professionnels dans les classes et la codification des élèves en difficulté et les ressources qui leur seront allouées. Quant à la semaine de travail, elle est compartimentée, décortiquée, découpée entre le temps de présence avec les élèves, celui alloué à la correction et la préparation de classe, celui pour les réunions ou la participation à divers comités.

Tout cela, au nom de conditions de travail qui faciliteront la réussite des élèves. Vraiment ?

Les directions d'école sont quant à elles devenues des gestionnaires, soumises à des redditions de comptes et à des enjeux de performance attendus de leur « clientèle ». Clientèle qui, rappelons-le, est formée d'élèves.

À travers cette lourdeur administrative, on réduit, à tort, la qualité de l'éducation à un contrat de travail. On oublie que ce n'est pas une convention collective qui fait un bon enseignant. Que ce ne sont pas les conditions de travail des professeurs qui garantissent qu'un élève réussira ou non. Pour réellement valoriser l'enseignement, il serait peut-être temps de sortir de cette froide logique qui nous mène directement dans un cul-de-sac.