Autos-patrouilles maculées de boue, congés de maladie concertés, vêtements non réglementaires: les policiers de Montréal multiplient les actions pour dénoncer le projet de loi 3 sur les régimes de retraite. Autant de gestes qui donnent aux agents des airs de voyous et nuisent à la crédibilité du Service de police de la Ville de Montréal.

Les policiers diront que ces moyens de pression ne nuisent pas à la sécurité publique. Nous ne sommes pas d'accord. Le métier de policier comporte des responsabilités particulières. Outre les militaires, les agents de police sont les seules personnes autorisées à user de la force. Afin qu'ils n'en abusent pas, le fonctionnement des corps policiers est fondé sur la discipline. Et pour que les citoyens acceptent leur autorité d'emblée, les policiers doivent prêcher par l'exemple.

Les moyens de pression choisis par les policiers de Montréal au cours des derniers jours vont à l'encontre de ces principes. Quoi qu'en dise leur syndicat (qui décidément prend les Montréalais pour des valises), les congés de maladie en série de samedi dernier constituent un arrêt de travail illégal, au mépris du Code du travail et de l'ordonnance émise par la Commission des relations de travail. Bel exemple.

Lancer de la boue sur une voiture de police peut sembler inoffensif. Pourtant, comment réagiraient des policiers si un citoyen s'avisait de faire la même chose? Deux poids, deux mesures; rien ne fait plus de tort à la crédibilité du système de justice.

L'uniforme consacre le statut particulier du policier. Il exprime la discipline, l'ordre, la loi. Porter la casquette de son syndicat et des pantalons de camouflage indique qu'avant d'être agents de police, ces gens sont des militants. Leurs vrais patrons sont les chefs de leur syndicat, pas l'état-major.

De tels abus, et d'autres bien plus graves, ont été souvent commis par les policiers provinciaux et municipaux au fil des ans. Chaque tactique de ce genre a entamé l'autorité morale des forces de l'ordre. On s'étonne qu'il en reste.

Il est clair aujourd'hui que les gouvernements ont commis une grave erreur en permettant aux policiers de se syndiquer. Comme l'a souligné le Procureur général du Canada devant la Cour suprême en février dernier, à l'encontre du droit à la syndicalisation réclamé par les policiers de la Gendarmerie royale: «Lorsque les syndicats de policiers sont mêlés à la controverse, ils minent l'image de neutralité de la police. Cela peut contribuer à la détérioration de la confiance et du respect populaires et nuire à la qualité des relations entre la police et la communauté.» Pour s'en convaincre, il suffit d'entendre ce que les Montréalais disent de leurs policiers ces jours-ci.

Les syndicats diront que grâce à eux, les policiers se sont libérés des conditions de travail exécrables qui étaient les leurs autrefois. Sans doute. Cependant, bien que non syndiqués, les membres de la GRC jouissent aujourd'hui d'une rémunération supérieure à celle de leurs collègues de la SQ et de Montréal.

Il n'est évidemment pas question de retirer aux policiers québécois un droit acquis il y a plusieurs décennies. On est donc réduit à espérer qu'un jour, les policiers comprennent qu'ils n'ont pas intérêt à agir comme ils le font. Leur comportement des derniers jours n'incite pas à l'optimisme.