L'économie et les finances publiques risquent fort de prendre une place beaucoup plus importante que ce que l'on aurait pu imaginer dans la campagne qui s'amorcera dans les jours prochains.

Le scénario auquel on s'attendait, c'était que les libéraux et les caquistes insistent lourdement sur les questions économiques, parce que c'est le point faible du gouvernement du Parti québécois, tandis que les péquistes feraient tout pour ramener le débat sur d'autres terrains et imposer leur propre agenda.

Mais ce n'est pas ce qui est en train de se passer. Depuis les semaines qu'il est en précampagne, le gouvernement Marois a multiplié les interventions économiques: exploration pétrolière à Anticosti, cimenterie en Gaspésie, entente sur le prix de l'électricité pour Alcoa, une pluie d'annonces d'investissements et le deuxième budget du ministre des Finances Nicolas Marceau.

Cette insistance visait certainement à colmater une brèche, à envoyer le message que le gouvernement péquiste ne négligeait pas l'économie.

Ce message peut passer parce que le gouvernement Marois s'est ressaisi après un début de mandat très maladroit et qu'il a trouvé un rythme de croisière.

Le redressement est encore plus marqué en économie, parce que le départ avait été franchement désastreux: déclaration de guerre contre les sociétés minières, nomination effarante de la militante Martine Ouellet comme ministre des Ressources naturelles, politiques fiscales - dividendes, gains de capital - hostiles à l'investissement, moratoire pour le gaz de schiste. Avec ces politiques, le gouvernement péquiste a contribué à casser l'économie québécoise: croissance plus lente, stagnation des investissements, marasme de l'immobilier, création d'emplois anémique.

Mais depuis, le jeu s'est calmé. Le ministre Marceau s'est imposé dans le gouvernement. Mme Ouellet a été muselée. Le gouvernement a déposé une ambitieuse politique économique. Les initiatives récentes favorisent le développement. Est-ce suffisant pour faire oublier le passé et pour rassurer sur l'avenir? Tout dépendra de la dynamique électorale. Mais le PQ, pour l'instant, n'est pas en position de faiblesse.

En finances publiques, le bilan est mauvais. Le gouvernement Marois, au lieu d'éliminer le déficit comme promis, l'a plutôt laissé exploser. Ce devrait être un très lourd handicap, sauf que le chef libéral Philippe Couillard a donné involontairement sa bénédiction au PQ. On pourrait aussi déplorer que le ministre Marceau ait caché la façon dont il compte s'y prendre pour réduire le déficit. Mais c'est un reproche que les partis d'opposition peuvent difficilement lui faire en campagne sans se faire demander, eux aussi, comment ils feraient.

En économie, le gouvernement sortant dispose d'un plan, Priorité Emploi, vague mais ciblant les bonnes priorités, et qui, surtout, propose une série d'initiatives à court terme qui sont autant de bonbons électoraux. Ce qu'on peut surtout reprocher au gouvernement péquiste, c'est qu'après avoir fait fuir les investissements, il doit maintenant dépenser des centaines de millions en fonds publics pour les faire revenir.

Il y a aussi des inconnues, surtout si le PQ formait un gouvernement majoritaire, sur ses intentions réelles en fiscalité, mais aussi sur les effets économiques de la Charte des valeurs, d'un renforcement des lois linguistiques ou de l'agitation périréférendaire. Cela aura un coût, mais c'est un thème difficile à manier, qui peut se retourner contre celui qui l'évoque.

On peut reprocher au PQ la faiblesse de son équipe économique, qui ne sera pas corrigée par l'arrivée massive de candidats comédiens. Mais ni le PLQ ni la CAQ ne peuvent prétendre proposer une équipe du tonnerre.

Plus ça avance, plus les stratèges péquistes doivent découvrir que l'économie n'est pas un boulet, mais plutôt un bon filon, entre autres parce que les libéraux, jusqu'ici, n'ont pas réussi à occuper ce terrain, et que les caquistes, très actifs dans le domaine, ne sont pas une option menaçante.