C'est le talent, la vitesse, le respect du système, la qualité et la puissance des tirs de P.K. Subban, l'efficacité de l'attaque massive et les arrêts de Carey Price qui ont permis au Canadien de surprendre la Ligue nationale en passant du tout dernier au deuxième rang dans l'Est, cette saison.

Le Tricolore est mieux de s'en souvenir rapidement. En effet, si Michel Therrien et ses joueurs se laissent encore déstabiliser ce soir par Paul MacLean et les Sénateurs, la série Montréal-Ottawa, qui s'annonçait difficile, deviendra soudainement périlleuse, puisque le Tricolore devra remporter trois matchs de suite pour éviter l'élimination.

Quel est le plus gros problème du CH en ce moment?

Non, ce n'est pas Carey Price. Michel Therrien s'est d'ailleurs étouffé lorsqu'on lui a demandé s'il était possible de voir Peter Budaj devant le filet lors du troisième match.

Price n'est pas à la hauteur de Craig Anderson depuis le début de la série. C'est évident. Des buts généreux accordés en début de troisième période lors des premier et troisième matchs ont coulé son équipe.

Mais le Canadien vivra ou périra avec Carey Price entre les poteaux. C'est acquis. C'est tout à fait normal et ça le restera tant et aussi longtemps que l'état-major ne mettra pas en question son statut de numéro un à Montréal.

Déstabilisé

Le plus gros problème du Canadien en ce moment est qu'un joueur, un seul, dérange les Sénateurs, alors que ses coéquipiers sont soit trop dérangés par leurs adversaires pour offrir un plein rendement, soit carrément inutiles.

Malgré ses 5'8'', ses 175 lb et le fait qu'il en soit à ses premiers matchs éliminatoires dans la LNH, Brendan Gallagher est celui qui dérange les Sénateurs.

Jared Cowen, Chris Phillips et Chris Neil ont écopé de pénalités à ses dépens dimanche, alors que plusieurs de leurs coéquipiers ont tenté d'éteindre la bougie d'allumage du Tricolore en l'étouffant le long des bandes et dans les coins de patinoire.

Michel Therrien ne s'est d'ailleurs pas gêné pour dénoncer des coups illégaux en cascades assénés à son jeune joueur.

Il a lancé un cri du coeur identique pour défendre P.K. Subban. L'ennui, dans le cas de Subban, c'est qu'au lieu de pousser l'adversaire à écoper de pénalités à ses dépens, c'est lui qui s'est retrouvé au cachot. Trois fois plutôt qu'une dimanche. Trois fois de suite, en plus.

À la décharge de Subban, il a été victime d'un coup de bâton au visage qui est demeuré impuni en tout début de rencontre, dimanche. Mais le reste du match, Subban s'est occupé davantage de répliquer aux attaques de ses adversaires qu'à jouer au hockey. Rien pour aider le Canadien à gagner.

Outre Gallagher, flanqué de Brandon Prust - qui voudrait bien déranger et le ferait sans doute s'il n'était pas blessé à l'ensemble du corps - et Alex Galchenyuk, qui se retrouve à 19 ans dans une situation inconfortable, personne ne dérange les Sénateurs.

Tomas Plekanec et ses ailiers Rene Bourque et Brian Gionta ont tenté de le faire. Mais ils sont loin d'avoir offert les performances que le Canadien est en droit de s'attendre de la part de trois vétérans.

David Desharnais ne joue pas mal ; il ne joue pas du tout. À un moment donné, il faudra que Michel Therrien cesse de lui offrir des chances de s'en sortir. Des chances que Desharnais a gaspillées bien trop souvent depuis un mois. Depuis bientôt deux mois, en fait, soit depuis la signature de son contrat.

Max Pacioretty? Depuis qu'il a décidé de patiner le long des bandes au lieu de foncer au filet, il n'est plus l'ombre de l'attaquant de puissance qu'il devrait être.

Michael Ryder? Vous savez tout le bien que je pense de lui...

Quant au quatrième trio, les White, Moen et Armstrong ne font peur à personne côté hockey. On sait depuis dimanche qu'ils ne font peur à personne chez les Sénateurs sur le plan de la robustesse non plus.

Aussi bien faire appel à Jeff Halpern!

Therrien contre MacLean

Et il y a les coachs. Principaux candidats au titre d'entraîneur-chef de l'année, Michel Therrien et Paul MacLean ont multiplié les bons coups tout au long de la saison. Ils ont rivalisé de flair, de doigté, de stratégie, de leadership et de psychologie pour soutirer le maximum d'équipes qui étaient loin d'avoir des places assurées en séries éliminatoires.

S'il est encore impossible de dire qui, de Therrien ou de MacLean, devancera l'autre dans la course au trophée Jack-Adams, il est clair que l'entraîneur des Sénateurs a eu le dessus sur celui du Canadien depuis le début de la série.

Pas en matière de stratégies, car le Canadien a largement dominé les deux premiers matchs et il pourrait facilement être en avant dans ce duel, et non le contraire.

Mais MacLean, avec ses commentaires liés à l'incident Eller-Gryba lors du premier match et avec son temps d'arrêt un brin ou deux arrogant avec 17 secondes à écouler au match de dimanche, a déstabilisé Michel Therrien.

Devant les journalistes, hier, Therrien avait retrouvé son calme. Il a reconnu que son équipe devait mieux gérer ses émotions, éviter surtout les débordements nocifs, revenir à la base et jouer au hockey.

Derrière ce calme apparent, on sent toutefois le coach à fleur de peau. C'est normal. Son équipe tire de l'arrière 2-1. Mais pendant que MacLean cache un sourire satisfait derrière sa grosse moustache, Therrien réplique, au lieu d'afficher un je-m'en-foutisme qui serait plus approprié.

Therrien a solidement géré ses émotions cette année. Son calme a permis au Canadien de rebondir rapidement après de mauvaises performances.

Après l'un de ses pires matchs de l'année, le Canadien a plus que jamais besoin de rebondir. Il doit donc compter sur un entraîneur en pleine possession de ses moyens, non un leader tiraillé par les paroles et les stratégies de son adversaire, pour éviter le merdier dans lequel il pourrait s'enliser en perdant encore ce soir.