Ce ne sont pas les négociations de la dernière chance. Pas encore.

Mais après l'annulation d'une première tranche de 82 matchs de la saison régulière, d'autres migrations de joueurs-vedettes vers l'Europe, et l'enfantillage dont les deux parties se rendent coupables en s'accusant mutuellement de contrecarrer les négociations, il est plus que temps que Gary Bettman et Donald Fehr affichent plus de sérieux dans leurs discussions.

Les deux clans se rencontreront cette semaine. Bravo! Mais il serait temps de se parler. De se parler pour vrai et non de simplement prolonger le dialogue de sourds qui mine les négociations. Des négociations qui n'en sont d'ailleurs pas vraiment, puisque les deux clans se contentent jusqu'à maintenant de défendre leur projet au lieu de négocier.

Cette danse en rond fait le bonheur de Gary Bettman. Car le commissaire de la LNH et surtout les propriétaires qu'il représente ne perdent pas grand-chose en ce moment. À moins que vous soyez assez naïfs pour croire que les pertes alléguées s'élèvent vraiment à 100 millions, comme le prétend la LNH. Et que les proprios sont au bord de la faillite en raison de ce manque à gagner associé à l'annulation du calendrier préparatoire.

Premiers pas

Les joueurs ont raison de dire qu'ils ont fait des concessions importantes il y a sept ans. Ils ont aussi raison de prétendre qu'ils sont, pour l'instant, les seuls à donner une fois encore.

Même si je leur donne raison et même si j'impute toujours aux propriétaires toute la responsabilité du conflit actuel, je considère malgré tout que c'est à l'Association des joueurs de faire les premiers pas.

Pourquoi?

D'abord parce qu'ils ont plus à perdre que les propriétaires. À court, à moyen et à long terme. Mais aussi, et surtout, parce que les joueurs, au-delà de toutes les concessions qu'ils consentiront, pourront se reprendre assez rapidement une fois le conflit réglé et la saison relancée.

Le dernier contrat de travail en a d'ailleurs fait la preuve par 70 millions. Revenus au jeu la tête basse, avec l'obligation de remettre 24% de leur salaire à la LNH et de respecter un plafond de 39 millions, les joueurs qui ont survécu au dernier conflit - ceux qui n'ont pas été poussés à la retraite - ont tout récupéré.

Même plus.

Et ce sont justement les propriétaires, après les avoir gardés en lock-out pendant une saison complète, qui ont permis à ces joueurs de tout récupérer.

Loin de profiter du plancher salarial pour gérer de façon plus responsable leurs millions, ces trop riches propriétaires ont visé année après année le plafond, qui fracasse aujourd'hui la barre des 70 millions.

En se basant sur le principe que le passé est souvent garant de l'avenir, les joueurs pourront, une fois le conflit réglé, encore compter sur leurs proprios pour contrecarrer le système qu'ils se battent actuellement pour implanter.

Eh oui! Les proprios sont bêtes de même...

Ancien capitaine du Canadien, Vincent Damphousse avait vu juste en 2005 lorsqu'il a orchestré la série de concessions qui a permis le règlement du conflit. Une série de concessions que Damphousse et les autres membres du comité de négociation avaient dû faire accepter à leur directeur général Bob Goodenow, qui était loin d'être d'accord.

Bien que décrié par les Chris Chelios, Mathieu Schneider et autres ténors de la LNH à cette époque, ce règlement a souri aux joueurs. Même à Chelios et à Schneider. Pourquoi? Parce que Damphousse avait vu plus loin que le bout de son nez. Parce qu'il avait flairé la bonne affaire qui se cachait derrière ce qui donnait l'allure d'une reddition pure et simple.

Qui fera plier Fehr?

Donald Fehr a remplacé Bob Goodenow. Bien qu'il semble plus ouvert d'esprit que Goodenow, Fehr, avec ce qu'il a obtenu pour les joueurs du baseball majeur au cours de sa carrière de féroce négociateur, tient à protéger sa réputation.

C'est normal.

Mais autour de lui, il faudra que des membres plus influents que d'autres au sein du comité de négociations jouent le rôle de Vincent Damphousse lors du dernier lock-out.

Mais qui? Mathieu Darche a toutes les qualités requises pour s'imposer. Il ne jouit toutefois pas de la même réputation que Damphousse à l'époque. Ron Hainey, qu'on voit souvent à la gauche ou à la droite de Donald Fehr et de son frère Steven? Sais pas! Sidney Crosby?

Ce qui est le plus inquiétant dans l'affaire, c'est que Mathieu Schneider, qui militait pour la ligne dure il y a sept ans, occupe aujourd'hui une position importante à l'Association des joueurs. Il a donc l'oreille de Donald Fehr quand il prend la parole.

Si, en plus, Schneider sert de rempart aux joueurs qui seraient prêts à donner un peu plus tout de suite et prendre le pari d'obtenir beaucoup plus tard, le conflit risque de se prolonger, voire de s'éterniser.

La Ligue et l'Association des joueurs n'amorcent pas les rencontres de la dernière chance cette semaine. J'en conviens. Mais jeudi, lorsqu'ils se quitteront, il faudrait que Bettman et Fehr aient des conclusions positives à offrir aux partisans. Ça aiderait à faire oublier que le Canadien devait accueillir les Sénateurs d'Ottawa dans le cadre du tout premier match de la saison 2012-2013. Une saison qui commencera on ne sait pas quand, et qui comptera on ne sait pas combien de rencontres...