Le député de Papineau Justin Trudeau confirmera ce soir qu'il se lance dans la course à la direction du Parti libéral du Canada. Cette candidature suscite un vent d'enthousiasme (une «trudeaumanie»...) dans certains milieux, notamment au sein du PLC et dans les médias du Canada anglais.

On comprend pourquoi. M. Trudeau est jeune et séduisant. Il porte un nom célèbre. Contrairement aux deux précédents chefs libéraux, il est à l'aise avec les gens. Bref, pour le Parti libéral, Justin Trudeau représente peut-être la dernière chance de résurrection.

Cependant, s'ils le choisissent comme chef, les libéraux prendront un risque. Certes, M. Trudeau a pris de la maturité depuis ses débuts en politique il y a quatre ans. Mais il n'a toujours que 40 ans. Et on cherche en vain dans sa carrière des réalisations qui le qualifient pour devenir chef de parti et premier ministre du Canada.

Jean Chrétien rappelait récemment que Pierre Elliott Trudeau n'avait pas beaucoup d'expérience, lui non plus, quand il est devenu chef du Parti libéral et premier ministre en 1968. Sauf que, à 47 ans, M. Trudeau père avait déjà apporté au débat public une contribution intellectuelle remarquable. De plus, le futur premier ministre avait très rapidement fait sa marque après son élection comme député en 1965.

À l'inverse, depuis son arrivée à la Chambre des communes en 2008, Justin Trudeau n'a à son bilan aucune intervention publique notable. Les seules déclarations dont on se souvienne sont des bourdes.

On sait qu'il veut encourager les jeunes à participer à la vie publique, qu'il juge les politiques du gouvernement Harper contraires aux valeurs canadiennes, qu'il est sensible à la nécessité de protéger l'environnement. Rien là qui soit original ou approfondi.

Quelle est sa vision du Canada de l'avenir? Comment propose-t-il de réconcilier la nécessaire exploitation des richesses naturelles et les exigences environnementales? Quel rôle voit-il pour l'État fédéral dans le développement économique et social du pays? Comment croit-il pouvoir rebâtir les ponts entre les Québécois francophones et les autres Canadiens?

Sur toutes ces questions fondamentales, on ne sait pas grand-chose de ce que pense Justin Trudeau. Cependant, on sait qu'il boxe bien...

Oui, le jeune Trudeau est le fils de l'autre. Oui, il a un certain charisme. Mais à part ça? Dès ce soir, M. Trudeau doit entreprendre de convaincre les Canadiens qu'il est plus qu'un beau gars. Qu'il a des idées, qu'il est sérieux, qu'il peut rassembler, décider, gouverner.