Jean-Pierre, de Montréal, est en beau maudit contre Bell Canada.

«Je viens de recevoir mon dernier relevé de compte téléphonique de Bell et je constate qu'en dix mois seulement, soit depuis le relevé du mois d'août 2011, le tarif résidentiel de base est passé de 19,02$ par mois à 24,56$ par mois. Ceci représente une belle grosse augmentation de 29,1%. En dix mois!!!»

«S.V.P., pourriez-vous éclairer mes lanternes sur le «pourquoi du comment» de cette augmentation abusive qu'impose Bell à ses clients? Que peut-il bien s'être passé ces derniers mois pour justifier une telle hausse? ...»

Quand l'inflation se maintient sous les 2,0%, il y a de quoi devenir furieux quand on voit un de ses comptes réguliers exploser de 29% en moins d'un an.

Après plusieurs échanges infructueux de courriels avec la porte-parole de Bell, Marie-Ève Francoeur, j'ai fini par obtenir l'explication qui tente de justifier le bien-fondé de cette spectaculaire hausse de 29%.

Dans les faits, Jean-Pierre a subi deux augmentations tarifaires depuis août 2011. Une première augmentation de 2,77$ par mois est entrée en vigueur le 21 août 2011, ce qui portait le tarif mensuel de sa ligne de résidence à 21,79$. Et le 3 juin dernier, Bell refilait à ses clients résidentiels une seconde hausse mensuelle de 2,77$. Cette seconde modification tarifaire hausse dorénavant le tarif mensuel de la ligne de résidence à 24,56$ par mois.

Jean-Pierre ne le sait pas, mais il doit s'attendre à subir fort probablement d'autres hausses de tarif mensuel dans un proche avenir. Je parie un petit 2$ que d'ici peu de temps sa ligne téléphonique de résidence lui coûtera 30,00$ par mois.

Si tel est le cas, on parlera à ce moment-là d'une augmentation de tarif mensuel qui frisera les 58% par rapport au tarif mensuel qui était en vigueur il y a moins d'un an.

Que peut faire Jean-Pierre pour contrer la forte hausse imposée par Bell Canada à ses clients de ligne résidentielle? Rien!

Imaginez-vous que Bell ne fait ici qu'appliquer la décision du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) d'autoriser les compagnies de téléphone à hausser jusqu'à 30$ par mois le tarif de la ligne résidentielle dans les régions où les services téléphoniques sont déréglementés, comme c'est le cas dans tous les grands centres urbains et des dizaines de municipalités.

Les explications de la porte-parole de Bell, Marie-Ève Francoeur.

«Voici le contexte... En mai 2011, le CRTC a autorisé Bell à augmenter son tarif mensuel pour certaines lignes téléphoniques résidentielles uniques jusqu'à un maximum (un plafond) de 30$ par ligne. Les prix de ces services étaient gelés par le CRTC et n'avaient pas été augmentés depuis 10 ans.»

«Les clients touchés, dit-elle, ont été avisés de cette augmentation soit par un message spécial joint à leur relevé de compte mensuel ou par lettre, directement postée à leur attention.»

Elle tient à préciser que les hausses s'appliquent seulement aux clients qui ne souscrivent à aucun autre service de Bell et qui résident dans des régions où les prix ne sont plus réglementés par le CRTC.

Mme Francoeur affirme que certains clients touchés par cette hausse pourraient même économiser en souscrivant à un de leurs forfaits résidentiels.

Dans le but de justifier les deux hausses de tarifs résidentiels, Mme Francoeur ajoute que de tels changements sont communs dans l'industrie de la téléphonie. Il s'agit d'une industrie où, dit-elle, les dépenses en investissement sont incroyables.

«Bell investit massivement dans son réseau, ses services, etc. Plus que toute autre entreprise en communications au pays: plus de 3 milliards en 2012 seulement. Et Bell continue d'offrir les forfaits combinés parmi les plus bas sur le marché pour les services résidentiels.»

Bravo pour les forfaits! Mais cela en fait une belle jambe aux clients de Bell qui se contentent d'une ligne résidentielle unique. Alors que la déréglementation dans l'industrie du téléphone devait générer une vive concurrence de prix à la baisse, comment expliquer la décision du CRTC de donner le feu vert à Bell pour augmenter le tarif des lignes de résidence jusqu'à 58%?

Par ailleurs, Bell n'en est pas à un différend près avec ses clients.

Bell Canada et Bell Mobilité font actuellement l'objet d'un recours collectif concernant les taux d'intérêt annuels de 42,58% qu'ils chargent depuis juin 2010 à titre de frais de retard sur les soldes acquittés après la date d'échéance des factures.

Les poursuivants demandent à Bell de réduire le taux d'intérêt de 42,58% à 26,82% sur les frais de retard, et de verser aux clients lésés des dommages-intérêts «pour des troubles et inconvénients» de 100$ par personne, plus des dommages punitifs de 200$ pour chaque personne. C'est le bureau d'avocats Paquette Gadler qui représente les poursuivants.

Les concurrents de Bell, comme Cogeco, Rogers, TELUS et Vidéotron, exigent des taux d'intérêt annuels variant entre 19,56% et 26,82% sur les frais de retard.