De nombreux fonctionnaires bénéficient à l'heure actuelle d'une pension dont la valeur vaut plus de 1 million de dollars. Et même jusqu'à 2 millions.

C'est ce que révèle une étude réalisée pour le compte de l'Institut C.D. Howe par James Pierlot, dirigeant du cabinet d'avocats Pierlot Pension Law, étude intitulée La retraite à deux vitesses: comment s'en sortir?

Avis aux fonctionnaires. Les chiffres ci-après n'ont pour véritable motif que de démontrer à quel point le régime des REER n'arrive pas à la cheville de la pension des fonctionnaires. Pas seulement celle des fonctionnaires fédéraux. On pourrait mettre dans le même panier les régimes de retraite des fonctionnaires provinciaux, municipaux et ceux des sociétés d'État...

Dans cette étude, M. Pierlot en arrive à la conclusion que le gouvernement fédéral, de concert avec les provinces, devrait remplacer les limites annuelles de la contribution au REER par une accumulation maximale de l'actif de retraite dans tout REER ou régime de pension à une limite de 2 millions.

Vous avez bien lu. L'expert propose d'abolir le plafond actuel de la contribution annuelle au REER, soit le moindre de 18% de notre revenu gagné aux fins du REER ou 22 450$. Et il le remplace par un plafond à vie au montant de 2 millions de dollars d'actif.

D'où sort-il cet actif REER plafonné à 2 millions? Imaginez-vous que ces 2 millions d'actif retraite représentent actuellement la valeur maximale de l'actif de retraite qu'il est possible d'atteindre dans un régime de pension à prestations déterminées.

Vous trouvez que ce n'est pas réaliste et que M. Pierlot charrie. Eh bien! détrompez-vous.

L'étude démontre qu'après une carrière au gouvernement fédéral, un fonctionnaire gagnant un salaire annuel de 150 000$ au moment de sa retraite aura droit à une rente à vie d'une valeur forfaitaire de 2,1 millions de dollars.

Voilà pour la référence du montant de 2 millions de dollars d'actif. C'est, autrement dit, la somme qu'il faut accumuler dans son REER pour pouvoir bénéficier d'une rente viagère similaire à celle que le fonctionnaire fédéral au revenu élevé aura droit grâce à son régime de retraite à prestations déterminées.

Autre exemple de pension fédérale: le fonctionnaire qui gagne un salaire moyen de 50 000$ au moment de sa retraite aura droit, quant à lui, à une rente à vie d'une valeur forfaitaire de 550 000$. Parenthèse: ce régime de retraite du gouvernement fédéral est financé à hauteur de 35% par l'employé et de 65% par le gouvernement, c'est-à-dire, nous, les contribuables.

«Ces accumulations (d'actif), qui sont similaires aux accumulations possibles dans plusieurs RPA au sein des autres niveaux de gouvernement (provincial, municipal, sociétés d'État), ne peuvent tout simplement pas être atteintes avec un REER pour un salaire équivalent», explique M. Pierlot.

Revenons à notre haut salarié fédéral à 150 000$ au moment de la retraite. S'il avait effectué des cotisations annuelles maximales à son REER tout au long de sa carrière, il aurait accumulé moins de 900 000$ d'actif. Comme on peut voir, il n'y aucune comparaison possible entre le REER individuel et le régime fédéral à prestations déterminées. Même iniquité évidemment entre le REER et les autres régimes à prestations déterminées offerts par les gouvernements provinciaux, les villes, municipalités et sociétés d'État.

«Cette injustice, explique M. Pierlot, découle des règles fiscales dysfonctionnelles qui demeurent inchangées depuis une génération, faisant qu'un quart de la population bénéficie de retraites anticipées et aisées, alors que les trois quarts de la population doivent retarder leurs retraites et se contenter d'un style de vie plus modeste.»

«Le système d'épargne-retraite canadien, ajoute-t-il, semble favoriser les travailleurs du secteur public, et ce, de façon significative.»

Il se base sur les chiffres suivants de Statistique Canada: à la fin de 2010, les fonds de pension et les régimes d'épargne-retraite individuels détenaient 2103 milliards d'actif à l'échelle nationale. Environ la moitié de cet actif se trouve entre les mains des employés du secteur public.

Ainsi, les secteurs public et privé détiennent chacun environ 1050 milliards. «Or, ajoute M. Pierlot, les travailleurs du secteur privé sont quatre fois plus nombreux, donc un employé ou un retraité du secteur public détient en moyenne un actif de retraite quatre fois plus élevé que son homologue dans le secteur privé.»

En raison des limites fiscales qui s'appliquent aux contributions à un REER, l'étude du CD Howe conclut qu'un travailleur du secteur privé «ne peut même pas atteindre la moitié de l'actif de retraite» qui s'accumule systématiquement dans un régime de retraite au bénéfice d'un fonctionnaire.

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Il y a également des entreprises privées qui offrent des régimes à prestations déterminées. La plupart font présentement face à un lourd déficit actuariel. Les employeurs crient au secours, espérant que les gouvernements assouplissent les règles. La Presse est du nombre.