La crise immobilière américaine aura bientôt cinq ans... et les prix des maisons chutent toujours. Cependant, certaines personnes ont trouvé dans les décombres un peu d'espoir.

Cinquante-sept mois de baisses consécutives.

Depuis le pic historique de juin 2006, les prix des maisons aux États-Unis ne cessent de diminuer, avec un dernier repli de 1,1% enregistré en mars, affirme la société Zilow.

La valeur du parc immobilier a donc fondu de 8,2% en un an, portant à près de 30% (29,5%) la perte moyenne des propriétaires depuis le début de la crise immobilière.

Cinquante-sept chapitres consécutifs, donc, d'une longue histoire d'horreur qui a donné naissance à la crise financière et qui hante encore les Américains et le reste du monde.

Encore les saisies

On croyait avoir atteint le fond du baril il y a deux ans. À l'été 2009, les prix des maisons semblaient se stabiliser à la faveur de la forte baisse des taux d'intérêt et des crédits d'impôt accordés par Washington aux propriétaires en détresse.

Mais l'aide gouvernementale a pris fin l'an dernier et d'autres facteurs, telles la hausse des prix de l'essence et la faible création d'emplois, ont scié les jambes d'une fragile reprise immobilière.

Les marchés de la revente et de la construction sont aujourd'hui des champs de ruines, d'où on extrait toujours des statistiques décevantes depuis le début de 2011.

Les ventes de logements existants ont reculé contre toute attente de 0,8% en avril, a annoncé la semaine dernière l'Association nationale des agents immobiliers (NAR).

Les mises en chantier et les permis de construire de logements ont aussi baissé le mois dernier. Le gros problème: l'offre excédentaire liée aux saisies immobilières, qui découragent les nouveaux projets.

«En liquidant des maisons saisies et en les vendant à des prix dérisoires, [les banques] coulent le secteur immobilier», déplore Richard DeKaser, économiste au Parthenon Group, de Boston.

Le marché américain a été littéralement inondé de ces saisies - quelque 6,5 millions depuis 2006.

Et ce n'est pas terminé. Environ 4,5 millions de propriétaires accusent un retard «sérieux» (trois mois ou plus) dans leurs paiements hypothécaires. Et près du tiers (28,4%) des emprunteurs américains sont toujours «under water» (sous la ligne de flottaison), c'est-à-dire que la valeur de leur propriété est inférieure à la somme empruntée pour l'acquérir, selon Zilow. Tôt ou tard, une bonne part de ces maisons viendra gonfler une offre déjà surabondante.

Aussi, les prévisionnistes croient que le prix moyen d'une maison aux États-Unis (environ 159 000$US) pourrait encore diminuer d'ici un an, de 2 à 15% selon les scénarios plus ou moins pessimistes.

Facile d'imaginer l'effet que cela aura sur le moral des consommateurs, qui assurent 70% de l'activité économique américaine.

Espoir

Ces jours-ci, le paysage immobilier aux États-Unis ressemble à ces régions du Midwest qui ont été balayées par de récentes tornades meurtrières. Pourtant, certaines personnes entrevoient une embellie à l'horizon.

Économiste et professeur à l'Université Berkeley, en Californie, J. Bradford DeLong est de ceux-là. Son argument principal: la construction a tellement ralenti qu'on pourrait éventuellement manquer de maisons aux États-Unis.

Au pic du boom immobilier, à la fin de 2006, les dépenses de construction s'élevèrent à un niveau de loin supérieur à leur tendance de long terme, écrit l'expert dans une étude. Ainsi, début 2007, les États-Unis étaient essentiellement «surconstruits»: environ 300 milliards US par an de trop par rapport à la tendance à long terme.

Avec la crise, les constructeurs ont diminué la cadence, question de rétablir l'équilibre, mais à un niveau plus faible que prévu. Les dépenses en construction ont chuté de 300 milliards sous la tendance historique durant la seule année 2007; puis elles sont restées déprimées durant les quatre années suivantes, affirme M. DeLong.

Or, formation de ménages oblige, les Américains pourraient se retrouver un beau matin avec un déficit d'au moins 1700 milliards US de dépenses non effectuées. «Cela représente beaucoup de maisons, immeubles d'appartements, bureaux et magasins non construits», dit M. DeLong.

De plus, d'autres études indiquent que le taux de vacance du secteur locatif diminue et touche un creux de trois ans. Du coup, les loyers grimpent. Si bien que beaucoup de locataires voudront éventuellement profiter des aubaines sur le marché de la revente...

Un peu d'espoir, donc. Évidemment, pour que cette longue et triste histoire se termine bien, il lui manque un élément essentiel: de nouveaux emplois, en grand nombre. Sans quoi, il faudra se taper plusieurs autres chapitres de cette tragédie américaine.