À l'instar de tous les sportifs professionnels, la carrière des joueurs de hockey est relativement courte, voire éphémère dans plusieurs cas. Conséquemment, ils ont donc peu d'années à leur disposition pour épargner en vue de leurs vieux jours.

Que peuvent faire les jeunes joueurs de hockey pour se créer un fonds de retraite de façon rapide et efficace? Réponse de Myriam Pairault, fiscaliste et associée de la firme Ernst&Young: «Une méthode de plus en plus fréquente est la mise en place d'une convention de retraite.»

Une convention de retraite est un régime en vertu duquel un employeur verse des cotisations à un dépositaire (une fiducie) au profit d'un employé (l'athlète dans ce cas-ci), explique Mme Pairault dans le dossier «L'imposition d'un joueur professionnel de hockey en Amérique du Nord», paru dans le dernier numéro de la revue Stratège, de l'Association de planification fiscale et financière (APFF).

En prévision de quoi ces cotisations seraient-elles versées dans ledit régime? En prévision soit d'un changement important des services rendus, soit de la retraite, soit de la perte de l'emploi.

Contrairement au REER, ajoute la fiscaliste, l'avantage est qu'il n'y a pas de limite annuelle pour cotiser à une convention de retraite.

De prime abord, convenons que ça ressemble à un abri fiscal hautement intéressant qui permettrait de différer une partie des gros salaires versés aux joueurs de hockey professionnel!

Question: est-ce que la création d'une telle convention de retraite peut également être accessible aux «riches» contribuables qui travaillent dans d'autres domaines que le hockey ou tout autre sport professionnel?

La porte-parole d'Ernst&Young m'a fait savoir que Mme Pairault n'était pas disponible pour répondre à mes questions sur la convention de retraite proposée dans le dossier qu'elle a rédigé pour la revue de l'APFF.

Il m'a donc fallu communiquer avec d'autres spécialistes pour analyser les avantages et inconvénients de la convention de retraite notamment proposée aux jeunes joueurs de hockey de la Ligue nationale.

Tout d'abord, sachez que ce véhicule fiscal peut être accessible à tous les contribuables à haut revenu, peu importe leur domaine d'activité. Il suffit que l'employeur l'offre à ses employés-clés.

Est-ce intéressant comme véhicule fiscal? Le fiscaliste Daniel Lachapelle, associé de la firme comptable Raymond Chabot Grant Thornton, y met un gros bémol.

Pourquoi? Tout simplement parce que les cotisations versées dans une telle convention de retraite sont immédiatement assujetties à un impôt de 50%. Supposons qu'on veuille transférer 1 million dans la convention de retraite. Concrètement, c'est une somme de seulement 500 000$ qui sera versée dans le régime de la convention de retraite, les autres 500 000$ aboutissant dans les coffres de Revenu Canada.

Cet impôt de 50% (perçu d'avance) deviendra remboursable entre les mains de l'employé (par exemple: le joueur de hockey) lorsque ce dernier commencera à percevoir des prestations ou des revenus de sa convention de retraite. Le revenu tiré de sa convention de retraite sera, à partir de ce moment-là, imposable en fonction de son réel niveau de revenu.

Comme le taux marginal d'impôt combiné maximum est actuellement de 48,2%, explique M. Lachapelle, il y a lieu de se questionner sur la pertinence de verser immédiatement à Revenu Canada une ponction fiscale supérieure (50%) sur les revenus différés que l'on transférerait dans une convention de retraite.

Cette ponction fiscale aura beau être ultérieurement remboursable, il est loin d'être acquis que le détenteur d'une convention de retraite puisse grandement en tirer profit! D'autant plus que même les revenus de placement accumulés dans la convention de retraite sont assujettis à la retenue d'impôt de 50%.

Le vice-président de la firme AON Conseil, Martin Dupras, également président de l'Institut québécois des planificateurs financiers (IQPF), doute lui aussi des bénéfices potentiels que la convention de retraite puisse apporter à ses détenteurs.

Il m'a fait parvenir une étude de l'IQPF qui traite des conventions de retraite, lesquelles ont fait l'objet d'un resserrement fiscal depuis décembre 1987. Au nombre des inconvénients, l'IQPF note notamment les suivants:

> l'impôt versé à Revenu Canada est remboursé sans intérêt, augmentant ainsi les coûts du programme lorsque l'objectif est de verser une rente de retraite sur la base d'un régime à prestations déterminées;

> sur une longue période de temps, les conventions de retraite sont très peu efficaces en raison de l'impôt remboursable de 50% qui ne rapporte aucun rendement.

Selon une étude de la firme Watson Wyatt, pour atteindre l'efficacité fiscale avec une convention de retraite, il faudrait que le gouvernement fédéral rabaisse le taux de l'impôt retenu de 50% à un maximum de 33%.

D'ici là, je conseille de mettre la convention de retraite sur la glace.