Il y a exactement un an, le dollar canadien valait 79 cents américains. Aujourd'hui, il frôle la parité. On peut certainement se demander comment expliquer une hausse aussi spectaculaire.

Statistique Canada nous a fourni une bonne partie de la réponse cette semaine, avec la publication de ses données mensuelles sur les opérations internationales du Canada en valeurs mobilières.

Non, non, chers lecteurs, ne vous laissez pas rebuter par l'aridité du terme. En réalité, il s'agit d'un dossier très facile à maîtriser.

Tous les jours, les investisseurs résidant à l'extérieur du Canada achètent et vendent des titres canadiens: actions, obligations, marché monétaire, bons du Trésor. De la même façon, les Canadiens achètent et vendent eux aussi des titres émis dans d'autres pays.

Or, il se trouve que le Canada est extrêmement populaire auprès des investisseurs par les temps qui courent. Ses finances publiques sont en bien meilleure santé que dans les autres pays riches. Il a traversé la récession avec moins de dommages. La crise financière a montré que son système bancaire est un des plus solides au monde. Il est superbement bien placé pour profiter d'une relance des prix des ressources.

En janvier, les non-résidents ont acquis, au net, pour près de 12 milliards de dollars de titres canadiens (c'est-à-dire la différence entre les achats de 134 milliards et les ventes de 122 milliards).

Ce montant est énorme, et c'est le troisième mois consécutif que cela se produit. En novembre, il y en avait pour 10,6 milliards; en décembre, pour 11,1 milliards. En additionnant les achats nets des 12 derniers mois, on en arrive à 112 milliards, un record.

Évidemment, pour acheter des titres canadiens, il faut avoir des dollars canadiens. Une caisse de retraite américaine qui veut ajouter des obligations canadiennes à son portefeuille doit donc vendre des dollars américains pour acheter des dollars canadiens. À coups de 10 ou 12 milliards par mois, cela crée une forte demande pour le dollar canadien, et plus la demande est forte, plus la monnaie s'apprécie.

Ce n'est pas tout. Les Canadiens aussi ont compris le potentiel de leurs propres titres. Ils nettoient donc leurs portefeuilles des titres étrangers. Ainsi, en janvier, leurs ventes nettes de titres étrangers ont atteint 5,8 milliards.

C'est très rare que cela se produise. En fait, les Canadiens, depuis la fin des années 90, ont davantage tendance à acheter qu'à vendre des titres étrangers. Depuis 1998, les achats ont systématiquement dépassé les ventes, 11 fois sur 12. Il va de soi que, pour le taux de change, c'est le processus inverse qui joue. Quand un investisseur canadien veut acheter des actions américaines, il doit vendre des dollars canadiens pour acheter des dollars américains, et cela fait monter le billet vert.

Les énormes achats de titres canadiens par des non-résidents, combiné au fait que les investisseurs canadiens se délestent de leurs titres étrangers, expliquent en grande partie la force du huard.

Mais quels sont les produits les plus populaires, et qui sont les acheteurs les plus intéressés?

De loin, ce sont les obligations canadiennes qui ont la cote. En janvier, il s'est vendu au net pour 10 milliards, ce qui représente 85% des achats de titres canadiens par des étrangers. Ce n'est pas un record, mais c'est nettement supérieur à la moyenne. À titre d'exemple, la moyenne mensuelle de 2008 est ressortie à 6,9 milliards, mais ce montant lui-même est très élevé. La moyenne mensuelle entre 1998 et 2008 se situe à 947 millions.

Comme on s'en doute, ce sont les Américains qui sont les principaux acquéreurs de titres canadiens, avec 69% des achats, suivis des Britanniques et des Japonais.

Chez les Canadiens qui investissent à l'étranger, les produits les plus populaires ont été, en janvier, les obligations, et particulièrement les obligations du gouvernement américain, qui comptent à elles seules pour 67% des achats de titres étrangers,

L'été prochain, vous vous frotterez les mains en pensant que vous en aurez beaucoup plus pour votre huard sur les plages de la côte Est américaine. En vacances, vous n'aurez sûrement pas la tête à penser aux opérations internationales du Canada en valeurs mobilières. Et pourtant, c'est grâce à elles que vos vacances coûteront moins cher cette année...