Un gain de 25,5 millions de dollars, dont la moitié est non imposable! Voilà l'exorbitante somme des gains que William Edmund Clark, président et chef de la direction de la Banque Toronto-Dominion, a encaissée depuis un an grâce au régime d'options d'achat d'actions offert aux hauts dirigeants de sa banque.

Entre mai 2009 et la fin de février dernier, M. Clark a revendu sur le marché les nombreux blocs d'actions qu'il avait acquis en n'exerçant au fil des mois rien de moins que 1,2 million d'options de la Banque TD.

Des six présidents et chefs de direction des grandes banques canadiennes, c'est M. Clark le grand gagnant des généreux régimes d'options bancaires.

Au second rang des gains encaissés au cours des 12 derniers mois par les grands patrons des banques canadiennes, on retrouve Richard Earl Waugh, de la Banque Scotia. Il a exercé quelque 339 000 options: la revente des actions acquises lui a permis d'engranger des profits bruts de 10,7 millions de dollars.

C'est le PDG de la Banque Royale, Gordon Nixon, qui complète le podium des banquiers qui ont le plus bénéficié des régimes d'options au cours de la dernière année. M. Nixon a empoché des gains de 6,7 millions avec la revente de 246 720 actions obtenues à la suite de l'exercice d'un nombre similaire d'options.

Avec des gains nettement inférieurs au trio précédent suivent ensuite le PDG de la CIBC, Gerald McCaughey, et celui de la Banque de Montréal, William Downe.

MM. McCaughey et Downe ont respectivement encaissé 2,4 millions et 1,8 million avec la liquidation d'une partie de leurs options au cours des 12 derniers mois.

Qu'en est-il de Louis Vachon, président et chef de la direction de la Banque Nationale? Niet! Il s'est contenté d'accumuler des options additionnelles. Point à ligne, zéro transaction de levée d'options, ni de vente d'actions.

Chose certaine, les actionnaires de la Banque Nationale ne peuvent pas dire que le grand patron de leur institution abuse de son statut privilégié pour s'enrichir sur leur dos en liquidant des blocs d'options et d'actions. Chapeau à M. Vachon pour son comportement de bon actionnaire. Les cinq autres PDG des grandes canadiennes devraient l'imiter.

Cela dit, les gains réalisés par l'entremise des régimes d'options d'achat d'actions créés à l'intention des hauts dirigeants des entreprises jouissent d'un traitement fiscal hautement privilégié de la part du gouvernement fédéral. Et, par ricochet, les gouvernements provinciaux emboîtent forcément le pas.

En effet, les gains tirés de la revente des actions acquises par levée d'options donnent droit à une généreuse déduction de 50%. Résultat: les hauts dirigeants bénéficiaires des régimes d'options paient de l'impôt sur seulement la moitié de ces gains. Méchant avantage comparativement aux revenus tirés des salaires, primes et commissions, lesquels revenus sont imposables dans leur totalité.

Revenons au grand patron de la Banque TD. Sur les 25 millions de profits tirés de ses options, M. Clark n'a donc pas eu à payer d'impôt sur la moitié de ces gains, soit 12,5 millions de dollars. Ce qui lui a permis de «sauver» près de 6 millions d'impôts.

Sur ses gains de 10,7 millions, M. Waugh, de la Scotia, à économiser 2,7 millions d'impôts, alors que le PDG de la Royale (Gordon Nixon) jouissait d'une économie d'impôt de 1,5 million.

MM. McCaughey (CIBC) et Downe (Banque de Montréal) ont économisé de 400 000$ à 500 000$ d'impôts avec leurs transactions d'options.

Les quelque 78 000 hauts dirigeants des entreprises inscrites en Bourse qui bénéficient des largesses fiscales des régimes d'options d'achat d'actions ont pu économiser en 2007 la jolie somme de 1,2 milliard d'impôt fédéral. Ajoutons à cela un autre 600 millions d'économies d'impôt provincial.

Au cours des débats de la Chambre des communes, cette semaine, le député et critique du Bloc québécois en matière de finances, Daniel Paillé, a tenté à plusieurs reprises d'amener le gouvernement Harper à se prononcer sur l'iniquité d'accorder annuellement une exemption d'un milliard d'impôt sur les gains exorbitants que les hauts dirigeants des sociétés inscrites en Bourse empochent avec leurs régimes d'options.

Ce fut peine perdue! Le premier ministre Stephen Harper et ses ministres Jim Flaherty (Finances), Jean-Pierre Blackburn (Anciens Combattants et Agriculture) et Stockwell Day (Conseil du Trésor) ont tour à tour totalement esquivé cette question d'injustice fiscale envers l'ensemble des contribuables.

Cacher au fisc un revenu de 100$, c'est du vol. Profiter de l'exemption d'impôt d'un milliard sur les gains tirés des options, ça, c'est du placement, aux yeux du gouvernement Harper!