Si le budget déposé hier par le ministre fédéral des Finances n'a rien de spectaculaire, il est rassurant à plusieurs égards. Les observateurs qui apprécient la multiplication des stratégies et des programmes ont bien sûr été déçus. Par contre, le document a de quoi plaire à ceux qui préfèrent la bonne gestion aux feux d'artifice.

Tel qu'attendu, le gouvernement garde en place son plan de relance économique. Après 28 milliards cette année, une somme additionnelle de 19 milliards sera dépensée en 2010-2011 en allègements du fardeau fiscal, en aide aux chômeurs et dans les infrastructures. Il était trop tôt pour retirer ces mesures. Il aurait été également mal avisé d'en faire davantage, étant donné le déficit de 49 milliards déjà prévu pour la prochaine année financière.

 

Une fois la reprise assurée, le gouvernement se concentrera sur le retour à l'équilibre budgétaire. La tâche ne sera accomplie qu'«à moyen terme» (au moins cinq ans). Le gouvernement canadien demeurant peu endetté en comparaison de celui des autres pays du G8, Ottawa peut se permettre de prendre un peu de temps.

La seule fin du plan de relance permettra au gouvernement de réduire son déficit de moitié. M. Flaherty compte, avec les économistes du secteur privé, sur une solide croissance économique qui fera vite grimper ses revenus (6% à 8% par an) au cours des quatre prochaines années. Pour le reste, le déficit sera effacé grâce à des compressions ciblées (défense nationale, aide internationale) et à un gel des dépenses de fonctionnement de tous les ministères pendant trois ans. D'ici 2014-2015, cette dernière mesure générera des économies annuelles de 2 milliards.

Des compressions sans douleur? Il faudra voir où les différents ministères feront des coupes pour respecter ce gel. Toutes les sommes qui iront à des augmentations de salaires des employés du secteur public devront être récupérées ailleurs, c'est-à-dire dans les services offerts.

Il faut se réjouir du fait que le gouvernement fédéral ne réduira pas ses dépenses sur le dos des provinces. La croissance prévue de la péréquation et des transferts pour la santé et pour l'éducation est maintenue, une excellente nouvelle pour le gouvernement du Québec.

Tout cela peut paraître trop beau pour être vrai. M. Flaherty n'a pas fait preuve d'un optimisme délirant, mais il ne s'est pas laissé de marge de manoeuvre: si jamais l'économie ne se remet pas aussi vite qu'espéré, des compressions supplémentaires - et beaucoup plus pénibles - devront être imposées.

«Nous sommes à un point tournant de notre histoire», a dit le ministre. N'exprimant pas de vision à long terme concernant l'économie de l'avenir, le budget 2010 n'est pas à la hauteur du moment historique annoncé. Cela dit, compte tenu de la conjoncture économique et politique, cette approche terre-à-terre est sans doute de mise.