Nous étions une douzaine autour de Jaroslav Halak. Évidemment que devant une ou deux caméras de télé dans la face, cinq ou six micros «bilingues» sous le menton et des calepins de notes ouverts, le jeune Slovaque est resté sur ses gardes.

Mettez-vous à sa place. Il ne veut pas déplaire à l'organisation du Canadien tant que son agent Allan Walsh n'aura pas réussi à le sortir de Montréal et il se dit qu'il est aussi bien de profiter des rares matchs qu'on lui demande de gagner pour se bâtir une solide crédibilité.

En plus, Halak est gentil comme tout, souriant, avec des yeux vifs d'intelligence. Il voit venir les journalistes avec leurs gros sabots et il sait éviter les pièges en gardant le sourire.

Mais il le fait sans mentir effrontément et sans prendre les partisans du Canadien et les fefans pour des imbéciles. «Je sais que j'ai le potentiel pour être un numéro un dans la Ligue nationale. Mais en même temps, je suis capable d'être patient», a-t-il répondu au détour d'une question.

Mais il est assez futé pour ne pas préciser combien de temps peut durer cette patience...

Si vous fouillez un peu dans la biographie de Jaroslav Halak, vous allez comprendre encore mieux à quel point le Canadien a été injuste envers lui. Il détient déjà des records au sein de l'organisation sans parler de l'incroyable performance qu'il a offerte dans le creux de vague de la saison dernière pour sauver les fesses de l'équipe et de Bob Gainey.

N'en doutez pas : quand on lui parle de ces quatre matchs, Halak s'allume et doit se contenir pour rester prudent. «Je me rappelle ces quatre victoires. Mais j'ai été malade pour le match à Atlanta. Ce sont des choses qui arrivent dans la vie, c'est de la malchance», a-t-il noté avec un étrange fatalisme dans le ton.

Sauf que Carey Price a perdu ce match... et que Halak n'a jamais eu la chance de redonner confiance au Canadien.

Qui va donc garder le but du Canadien ce soir contre les Islanders de New York? Tous les spécialistes qui se sont prononcés ont fini par donner un score égal. Michel Bergeron et Ron Fournier par exemple ont soutenu que le match revenait à Carey Price puisque le Sauveur est étiqueté numéro un, joueur de concession et autres qualificatifs épiques. Les deux veulent que Jacques Martin remette Price devant le filet puisque ça va être bon pour sa confiance d'affronter la pire équipe de la ligue qui, en plus, disputait un match hier soir.

D'autres, et ils ont raison à mon humble avis, demanderaient à Halak d'aller chercher une autre victoire pour son équipe. D'abord, parce qu'il le mérite amplement, et en plus parce qu'il va falloir finir par le reconnaître, depuis février dernier, Halak a été le meilleur des deux.

Pendant combien de temps va-t-on se permettre d'être aussi injuste envers lui?

J'ai assez d'années dans le métier pour ne pas demander directement à Jacques Martin qui allait être son gardien pour le match de ce soir. Je lui ai plutôt demandé quels allaient être les facteurs qui allaient justifier sa décision.

Jacques a presque ri, ce qui est beaucoup dans son cas. Avant de lâcher : «Une bonne nuit de sommeil ! Ça va me prendre une bonne nuit de sommeil. Avec de bons rêves. D'habitude, je fais de bons rêves», a-t-il répondu.

«Présentement, je serais trop fatigué pour prendre la décision. J'ai revu le match une partie de la nuit, je n'ai pas beaucoup dormi et je serais plutôt embrouillé»,

a-t-il continué.

C'était évidemment une façon amusante de s'en tirer.

Mais ça voulait surtout dire que Jacques Martin n'avait pas encore eu le temps de vraiment réfléchir à la question, ce qui me surprendrait beaucoup, ou qu'il n'avait pas encore eu le temps de sonder le coeur et l'âme de Bob Gainey, ce qui ne me surprendrait pas du tout.

Remarquez qu'ils feront bien ce qu'ils voudront, c'est leur club de hockey, pas le mien. Et gagne ou perd, ça ne change pas une miette dans ma vie. Mais sur le plan de l'équité, juste sur le plan humain, j'aimerais que Jaroslav Halak soit traité correctement.

Si c'était le cas, c'est lui qui serait devant le filet.

Sergei K. n'a pas tous les torts

Bob Gainey a failli perdre un autre joueur pour moins qu'un sac de pinottes. Sergei Kostitsyn a déserté les Bulldogs de Hamilton ; on l'aurait vu avec son frère hier à Montréal. Et finalement, conseil fraternel sans doute, il est rentré au bercail avant que l'attaque à cinq ne se mette en branle.

Heureusement, Sergei peut compter sur un agent expérimenté et responsable en Don Meehan. Mais s'il en est rendu à ces extrémités, ça veut dire qu'il est vraiment ulcéré et qu'il désespère d'améliorer sa situation avec le Canadien.

Walk a Mile in His Shoes, chantait Joe South en 1970 ; marchons un mille dans ses souliers et nous allons peut-être trouver que le jeune Kostitsyn a raison de tenter de lever les feutres. Il voit le traitement de faveur dont jouissent Kyle Chipchura et Max Pacioretty, qui sont nuls depuis des lunes, et il doit se dire qu'il est détesté par ses patrons qui le traitent comme un minable.

Il est un tout jeune homme bien loin de sa Biélorussie, un peu, beaucoup mêlé et qui estime qu'on lui joue dans le dos.

DANS LE CALEPIN - La revanche entre Jean Pascal et Adrian Diaconu va être encore plus relevée que le premier combat. Si Jean Pascal, que j'aime beaucoup, se prépare avec la moindre négligence pour ce match, il va en manger une. C'est clair, mon Jean?